Georges Rémi, plus connu sous son nom de plume Hergé (les initiales de son nom et de son prénom, RG), est avant tout connu pour être le « père » de Tintin et Milou, nés le 10 janvier 1929.
Cela fait de lui l'un des créateurs belges les plus célèbres du XXe siècle avec Jacques Brel, René Magritte et Georges Simenon.
Enfance tourmentée
Né dans un foyer modeste de Etterbeek, dans la banlieue de Bruxelles, c'est un garçon timide et anxieux, aux antipodes de son héros Tintin, avec une mère qui va peu à peu sombrer dans la folie.
Il gardera toute sa vie un amer souvenir de son enfance et sera lui-même sujet à de fréquentes dépressions.
L'obsession de la folie va hanter ses albums, au moins à partir du Lotus bleu (1934).
Embauché à 18 ans au service des abonnements du quotidien catholique Le Vingtième Siècle, il fait valoir très vite son don pour le dessin.
Il crée Totor pour un magazine de scouts puis Tintin et Milou à la demande de l'abbé Wallez, le patron du Vingtième Siècle.
Perfectionniste en diable
Les premières aventures du jeune héros sont publiées en feuilleton dans Le Petit Vingtième, supplément jeunesse du quotidien. Elles se déroulent au pays des Soviets.
Le succès ne se fait pas attendre. Soucieux de perfection, Hergé multiplie les esquisses avant d'aboutir à un dessin d'une extrême netteté, la « ligne claire ».
Il veille aussi à la bonne articulation du récit, faisant même en sorte que chaque page se termine sur un rebond.
En parallèle avec la bande dessinée qu'il va hisser au rang de « neuvième art », il témoigne aussi d'un immense talent dans la création publicitaire, une activité à laquelle il devra rapidement renoncer pour revenir à ses planches.
En 1934, le dessinateur se fait assister par un jeune étudiant chinois, Tchang, pour la conception des nouvelles aventures de Tintin, qui doivent se dérouler en Chine, Le Lotus bleu.
Il s'agit pour lui de sortir de l'amateurisme et d'éviter les clichés, comme dans Tintin au Congo.
Il ne cessera plus dès lors de se documenter afin de cerner au plus près la réalité du monde, y compris de pays qu'il n'a encore jamais vus.
L'éditeur Casterman, à Tournai, lui propose d'éditer ses aventures sous forme d'albums. Il y en aura 22 au total.
Quand arrivera la couleur, Hergé et son éditeur décideront de refondre les premiers albums. Assisté d'une équipe de collaborateurs, les Studios Hergé, le dessinateur les colorisera et les réduira au format de 62 planches, caractéristique de la nouvelle collection (la première aventure, Tintin au pays des Soviets, restera en l'état avec ses 142 planches en noir).
En 1940, suite à l'occupation de la Belgique par la Wehrmacht, le journal Le Vingtième Siècle disparaît. Faute de mieux, Hergé poursuit la publication des aventures de Tintin dans le supplément jeunesse du quotidien Le Soir. Sortie de L'Étoile mystérieuse, premier album conçu directement en couleur, et arrivée du capitaine Haddock dans Le Crabe aux pinces d'or.
Mais Le Soir est très engagé dans la collaboration avec l'ennemi, ce qui vaut à Hergé d'être plusieurs fois interrogé par la police en septembre 1944, à la Libération. Bien que blanchi deux ans plus tard par un certificat de civisme, il sort très affecté de cette épreuve et songe un moment à fuir la Belgique.
Il est rattrapé par Raymond Leblanc, un résistant notoire qui fonde avec lui le magazine Tintin. Tiré à 60 000 exemplaires rien que pour la Belgique, il entre en concurrence avec Le journal de Spirou, autre héros de la BD belge. Les albums connaissent pour leur part un succès planétaire. Traduits dans 80 langues et dialectes et vendus à ce jour à plus de 230 millions d'exemplaires.
En 1958, Hergé éprouve une grave crise conjugale. Il a épousé un quart de siècle plus tôt Germaine, une collègue du Vingtième Siècle. Sans passion. Sans enfant. Tourmenté par des cauchemars et des rêves de blanc, il se jette dans la création d'un vingtième album à vocation thérapeutique. C'est Tintin au Tibet, une histoire d'amitié entre Tintin et Tchang.
Guéri, il retrouve un semblant de sérénité auprès de sa nouvelle compagne, une jeune coloriste née en 1934 et prénommée Fanny, qu'il épousera en 1977.
Enfin apaisé
Rapidement dépassé par le succès planétaire de sa Comédie humaine, Hergé, trop conscient de ses insuffisances, est demeuré modeste : « Plus ou moins volontairement, je me suis mis dans mes héros, dans Tintin surtout [qui m’offre une image parfaite, trop parfaite de ce que je voudrais être] mais même aussi dans les Dupond et Dupont [qui sont ce que je suis parfois et que je voudrais ne pas être] (...). Quel est celui de tous mes personnages que je préfère ?... Je crois bien que c’est le capitaine Haddock. Il a tellement de défauts que je le reconnais presque comme un ami intime, comme un frère, comme un second moi-même » (Hergé à R.P. Etienne Ascacibar, le 6 mars 1963).
La cinquantaine venue, il s'est mis à la peinture mais il se garde d'en faire état et rougit d'être comparé aux plus grands artistes. « Tintin m'a rendu heureux. J'ai fait de mon mieux ce que j'ai fait et ça n'a pas toujours été facile », se confie-t-il à La Libre Belgique (30 décembre 1975).
Travailleur infatigable et perfectionniste, il s'éteint en pleine gloire à 75 ans, en laissant un album inachevé, Tintin et l'Alph-Art (note).
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