L'Histoire en quatrième

La France de 1815 à 1914

Tout le long du XIXe siècle, la France n'a pas cessé d'être tourmentée par le souvenir glorieux et tragique de la Grande Révolution et des guerres napoléoniennes. De là une grande instabilité politique sur fond de développement économique.

 

La monarchie est restaurée sans enthousiasme après la chute de Napoléon 1er.

Les royalistes bon teint en veulent à Louis XVIII, le frère du malheureux Louis XVI, d'avoir déguerpi lâchement lors du retour de Napoléon 1er de l'île d'Elbe. Ils lui en veulent aussi d'avoir installé au gouvernement des régicides et de franches crapules comme le ministre de la police Fouché.

Les anciens émigrés de l'aristocratie aspirent à prendre leur revanche et à récupérer leurs biens. Ils entretiennent la «Terreur blanche». Les anciens soldats de Napoléon renouent avec les petitesses de la vie quotidienne et ruminent leur amertume...

Le vieux roi n'en montre pas moins de la bonne volonté. Se refusant à réunir une Assemblée constituante, il «octroie» une Charte qui institue une monarchie constitutionnelle avec une assemblée législative élue au suffrage censitaire: seuls 90.000 citoyens assez riches pour payer un impôt ont le droit de voter.

Ce régime marque l'irruption sur la scène politique de la bourgeoisie: grands propriétaires, hommes d'affaires et professions intellectuelles.

A la mort de Louis XVIII, en 1824, son frère lui succède sous le nom de Charles X. Celui-ci, soutenu par un parti ultra-royaliste, veut revenir à une conception plus traditionnelle de la monarchie. Il se fait sacrer à Reims selon un cérémonial désuet, rétablit la censure et réduit encore le nombre d'électeurs.

Ces mesures soulèvent contre lui la bourgeoisie. Face à la montée de l'opposition, le gouvernement cherche à restaurer sa popularité en envoyant un corps expéditionnaire en Algérie. Malgré cela, quelques semaines plus tard, les 27, 28 et 29 juillet 1830, des manifestations estudiantines et bourgeoises ont raison du régime.

Comme son frère Louis XVI, le roi renonce à faire donner la troupe. Il préfère s'exiler. Les insurgés des «Trois Glorieuses», désignent... son cousin le duc d'Orléans pour lui succéder comme roi des Français sous le nom de Louis-Philippe 1er.

La monarchie bourgeoise

Louis-Philippe 1er se contente de réviser la Charte mais adopte le drapeau tricolore de la Révolution et élargit la base électorale à 200.000 personnes. La bourgeoisie conservatrice triomphe mais doit compter avec l'opposition légitimiste à droite (les partisans du comte de Chambord, le petit-fils de Charles X) et l'opposition républicaine à gauche.

Sous la monarchie de Juillet (parce que née en juillet 1830), la France entre de plain-pied dans l'ère industrielle. On extrait la houille du Nord, on construit les premiers chemins de fer, les grandes aciéries du Creusot, les usines textiles d'Alsace...

François Guizot, chef du gouvernement à partir de 1840, encourage l'entente cordiale avec l'ennemie héréditaire, l'Angleterre. Il lance à la bourgeoisie son célèbre mot : «Enrichissez-vous... par le travail et par l'épargne».

Lassée par la petitesse de ces ambitions bourgeoises qu'a illustré avec brio le romancier Honoré de Balzac, l'opposition républicaine multiplie les attaques contre le régime.

Mais pas davantage que la bourgeoisie conservatrice, elle ne prend la mesure des changements sociaux amenés par la révolution industrielle et de l'apparition d'une classe ouvrière nombreuse, misérable et par-dessus tout méprisée.

Le 23 février 1848, une insurrection éclate à Paris. Elle dégénère très vite. Louis-Philippe 1er se refuse à faire donner la troupe. Comme les autres rois ses prédécesseurs, il préfère se sacrifier et prend le chemin de l'exil.

Cette fois, les républicains ne se laissent pas déborder. Ils proclament à l'Hôtel de Ville de Paris la IIe République (la Ière ayant été instaurée en septembre 1792 après la chute de Louis XVI).

Éphémère république

Animée par de grands bourgeois libéraux comme le poète Alphonse de Lamartine ou le physicien François Arago, la Seconde République montre d'emblée des intentions généreuses et compatissantes à l'égard des plus humbles.

Le gouvernement provisoire prend des mesures audacieuses comme d'instaurer le suffrage universel (pour les hommes seulement), de reconnaître la liberté de la presse et de réunion, d'abolir la peine de mort en matière politique ou encore d'abolir l'esclavage dans les colonies.

Dès le 26 février 1848, il ouvre aussi des Ateliers nationaux dans l'intention louable de fournir du travail et un petit revenu aux chômeurs qui s'agitent dans les grandes villes. Mais très vite, ces ateliers devinrent des foyers d'agitation socialiste.

Élue en avril 1848, l'Assemblée constituante, composée pour l'essentiel de bourgeois conservateurs, n'eut rien de plus pressé que de faire l'économie de ces ateliers où par exemple l'on creusait des trous pour les reboucher ensuite.

Il va sans dire que les ouvriers concernés n'acceptent pas la perte de leur gagne-pain. De grandes émeutes se produisent à Paris du 23 au 26 juin 1848. Elles sont réprimées sans compassion aucune par les troupes du général Cavaignac. Le sang coule en abondance. 4.000 insurgés sont déportés en Algérie. Désormais, les ponts sont coupés entre la bourgeoisie républicaine et les représentants des ouvriers.

Quand a lieu le 10 décembre 1848 l'élection du président de la République, l'heureux élu n'est autre qu'un prince au grand coeur, Louis-Napoléon Bonaparte, neveu du grand empereur. Il a su toucher le coeur des foules en promettant la paix et des mesures sociales hardies.

Dans les années qui suivent, l'Assemblée n'en poursuit pas moins une politique conservatrice qui lui vaut l'hostilité populaire. Le prince-président garde ses distances et développe quant à lui son programme politique empreint de générosité.

Comme la Constitution lui interdit de se représenter pour un deuxième mandat de quatre ans, il se résout à restaurer l'Empire de son oncle!

C'est ainsi qu'un coup d'État savamment préparé lui permet de renverser la République et d'instaurer un régime autoritaire le 2 décembre 1851, presque sans effusion de sang.

L'Empire est officiellement proclamé le 2 décembre 1852 (anniversaire du sacre de Napoléon 1er et d'Austerlitz).

Un Empire entre tradition et modernité

En matière économique, le Second Empire s'inscrit dans la continuité de la monarchie de juillet. La France bénéficie d'un grand essor industriel et commercial. Un réseau bancaire moderne collecte l'épargne des particuliers et la dirige dans l'industrie et les grands travaux (chemins de fer, canal de Suez...).

Paris se transforme et prend sa physionomie actuelle avec ses immeubles en pierre de taille dits haussmanniens, du nom du préfet Haussmann à l'origine de cette transformation. Le lacis de ruelles hérité du Moyen Âge laisse la place à un réseau de larges boulevards et d'avenues rectilignes.

L'activité industrielle et la spéculation immobilière sont à l'origine de grandes fortunes.

Dans le même temps, explorateurs et militaires donnent à la France de nouvelles colonies (protectorat du Cambodge, Sénégal, Nouvelle-Calédonie...).

Malheureusement, l'empereur ne s'en tient pas là. Il veut aussi rendre à la France une place de premier rang dans le concert des nations. C'est ainsi qu'il s'engage avec l'Angleterre en 1854 dans une guerre contre la Russie, coupable d'avoir attaqué impunément la Turquie. Le congrès de Paris consacre la victoire de la coalition et la place éminente obtenue par l'empereur.

Celui-ci ne s'en tient pas là. Il apporte son aide militaire au roi de Piémont pour chasser l'Autriche de l'Italie et faire l'unité de la péninsule. Le roi de Piémont donne à la France Nice et la Savoie en signe de reconnaissance.

Mais les catholiques français s'irritent de la situation faite au pape, privé de ses États et quasiment reclus à Rome. Qu'à cela ne tienne. Napoléon III lâche du lest et inaugure l'Empire libéral en vue de s'assurer le soutien de la gauche républicaine et démocratique.

Là-dessus, tandis que les États-Unis éprouvent les affres de la guerre de Sécession, il tente d'imposer un empereur aux Mexicains avec l'objectif de créer un grand État catholique et latin qui fasse contrepoids aux États-Unis. Mais son projet échoue piteusement et le ciel s'obscurcit brusquement quand, en 1866, la Prusse du chancelier Bismarck écrase l'Autriche à Sadowa.

Le 19 juillet 1870, poussé par son opinion publique, l'empereur déclare la guerre à la Prusse. Le 2 septembre, il est fait prisonnier à Sedan. Le surlendemain, les Parisiens proclament dans la liesse la République. C'est la IIIe du nom.

Naissance douloureuse de la République

Les républicains qui rêvaient de refaire le coup de Valmy et de chasser l'envahisseur doivent vite déchanter. En janvier 1871, Paris capitule. En février, une assemblée est élue à la va-vite et ratifie les préliminaires de paix.

Le 18 mars 1871, des Parisiens excédés par un long siège et les humiliations de la défaite se soulèvent.

Le gouvernement provisoire présidé par Adolphe Thiers choisit d'abandonner Paris aux émeutiers. Dans l'improvisation la plus totale, ces derniers proclament la Commune (une réminiscence de la Grande Révolution de 1789).

Leurs illusions ne durent que six semaines. C'est le temps qu'il faut à Thiers pour lancer ses troupes sur Paris et exterminer les militants ouvriers et socialistes (environ 25.000 morts et des milliers de déportés).

La IIIe République peut s'installer sans crainte d'opposition sociale. La question ouvrière est évacuée des débats politiques.

La IIIe République ébauche ses textes constitutionnels au gré des circonstances. Le régime est fondé sur le suffrage universel et la prépondérance du Parlement. Le pouvoir exécutif est confié à un président du Conseil (il s'agit du conseil des ministres) désigné par un président de la République élu par un collège spécial pour une durée de sept ans.

Le 14 juillet devient fête nationale en souvenir de la prise de la Bastille. Les libertés publiques et notamment la liberté de la presse sont pleinement assurées.

Jusqu'à la loi de séparation des Églises et de l'État de 1905, la vie politique est dominée par l'anticléricalisme des républicains de gauche. Jules Ferry, ministre de l'Instruction publique, impose dans les années 1880 l'école primaire obligatoire, gratuite et laïque en remplacement de l'enseignement par les religieux. Son objectif est de ruiner l'influence de l'Église sur les enfants et de former de bons patriotes.

L'antisémitisme fait son apparition avec l'affaire Dreyfus, le drame d'un officier juif condamné par erreur et maintenu en prison après que son innocence ait été démontrée.

En politique extérieure dominent les questions coloniales. Le désir de revanche sur l'Allemagne, qui a battu la France en 1870 et annexé l'Alsace et la Lorraine du nord, s'effiloche au fil des années mais il renaît en 1911 avec la question du Maroc qui met aux prises les deux pays.

A la veille de la Grande Guerre de 1914-1918, la France, qui est le seul des grands pays européens à avoir un régime républicain, apparaît comme une destination à la mode pour tous les bourgeois, les intellectuels et les artistes. La Tour Eiffel, du haut de ses 1000 pieds (300 mètres), témoigne des succès de la République. C'est la «Belle Époque».

Pour aller plus loin

Suivez les tristes déconvenues des républicains de la chute de Louis-Philippe 1er au coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte [récit]

Voyez comment le cynisme des uns et l'incompétence des autres ont provoqué le drame de la Commune [récit]

Priez pour que ne se reproduisent pas en France les querelles entre religion et État [récit]

Des outils pour comprendre
- Se repérer dans le temps :


Frise chronologique de l'Histoire (1815-1914)

La France du XIXe siècle a pris l'habitude d'une succession rapide de régimes et de Constitutions:

- 1814: première Restauration monarchique; le roi de France Louis XVIII octroie une Charte constitutionnelle,

- 1815: retour de Napoléon 1er; promulgation de l'«Acte additionnel aux constitutions de l'Empire»,

- 1815: deuxième abdication de Napoléon 1er et deuxième restauration de la monarchie avec Louis XVIII,

- 1824: mort de Louis XVIII; son frère est sacré roi de France à Reims le 29 mai 1825 sous le nom de Charles X,

- 1830: abdication de Charles X; son cousin devient roi des Français sous le nom de Louis-Philippe 1er, avec une Charte révisée par les députés,

- 1848: abdication de Louis-Philippe 1er le 24 février; proclamation de la IIe République, promulgation d'une Constitution le 21 novembre, Louis-Napoléon Bonaparte est élu au suffrage universel président de la République le 10 décembre,

- 1851: coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte, approuvé par plébiscite le 21 décembre,

- 1852: révision de la Constitution et proclamation de l'Empire le 2 décembre; Louis-Napoléon devient Napoléon III,

- 1870: l'empereur est déchu et la IIIe République proclamée le 4 septembre, deux jours après la défaite de Sedan; formation d'un «gouvernement de la Défense nationale» sous la présidence du général Louis Trochu,

- 1871: une Assemblée nationale est élue le 8 février; elle désigne Adolphe Thiers chef du gouvernement exécutif de la République française puis le 31 août président de la République,

- 1873: Thiers démissionne; le maréchal de Mac-Mahon devient pour sept ans président de la République,

- 1875: vote de l'amendement Wallon qui instaure officiellement la République et de différentes lois constitutionnelles.

Vérifier les connaissances

- Qui appela-t-on l'«enfant du miracle»? [réponse]

- Qui fut le premier président de la République française? [réponse]

- Quel est le célèbre procès qui inspira la création de l'État d'Israël? [réponse]

- La IIIe République faillit être renversée par un populaire et séduisant général. Son nom? [réponse]

De quelle agréable façon mourut le président Félix Faure? [réponse]

André Larané
Publié ou mis à jour le : 2020-05-02 18:31:48

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