Judaïsme

Hanoucca, de l'exploit guerrier au miracle des lumières

Les 8 lumières allumées pour célébrer Hanoucca.Chaque année, au mois de kislev du calendrier hébraïque, qui correspond plus ou moins au mois de décembre du calendrier chrétien, a lieu durant huit jours la fête de Hanoucca, en hébreu Hag HaHanoukka, la  « fête de l’inauguration ». Elle donne lieu à des collations émaillées de chansons, cadeaux et prières.

On l’appelle également la fête de la lumière car au centre de la pratique se trouve l’allumage de la lumière, dont une nouvelle est ajoutée chaque soir, pour aboutir à 8 lumières allumées le dernier soir.

Cette année 2024, le premier jour de la fête, le 25 du mois de kislev, tombe le 25 décembre. Profitons-en pour revenir sur cette fête juive qui, née d’une victoire nationale, faillit disparaître avant de se rétablir sous des aspects plus universels.

De la révolte des Maccabées à la destruction du Temple

Le Livre des Maccabées raconte comment, en l’an -165, les habitants du royaume de Judée, sous la direction des Asmonéens ou Hasmonéens, une famille de prêtres, réussirent à chasser de Jérusalem les Séleucides, rois hellénistes héritiers d’Alexandre le Grand, qui régnaient en Syrie.

Après avoir réouvert et purifié le Temple, les Juifs inaugurèrent la reprise du culte en fêtant en retard la fête biblique de Soukot, la « fête des Cabanes » qui rappelle l’errance du peuple juif dans le désert. Ils n’avaient en effet pas pu la célébrer en son temps habituel, à l’automne, à cause de la révolte des Maccabées.

Prise de Jérusalem par le roi Antiochus, La Guerre des Juifs de Flavius Josèphe, trad. par Guillaume Coquillart, XVe siècle, Chantilly, musée Condé. Agrandissement : Antonio Ciseri, Le Martyre des Sept Maccabées, 1863.On parla de cette fête différée comme d’une « fête de l’inauguration » (sous-entendu : du Temple). Les Asmonéens, qui désiraient pérenniser leur pouvoir et réussiront quelques dizaines d’années plus tard à se faire reconnaître comme rois, décidèrent de la renouveler chaque année. C’était une façon de célébrer tout à la fois la centralité du Temple et leur propre gloire !

Mais pour ne pas répéter les coutumes de la fête de Soukot, ils ne conservèrent qu’une habitude annexe de cette fête consistant à allumer des lumières dans tout Jérusalem. Cela correspondait bien au temps de Hanoucca, qui a lieu au moment du solstice d’hiver, moment où la lumière du jour recommence à croître.

Il est intéressant ainsi de noter que Flavius Josèphe, chroniqueur historique du premier siècle, cite l’observance de Hanoucca parmi les coutumes juives, mais avoue ignorer complétement pourquoi on y allume des lumières.

Peu à peu, les Asmonéens multiplièrent les célébrations de hauts faits guerriers et introduisirent encore de nouvelles fêtes dans le « rouleau des jeûnes » qui listait les fêtes obligatoires dans le judaïsme traditionnel.

Une Hanoukkia (chandelier à neuf branches) près du mur de Jérusalem pendant la fête de Hanoucca. Agrandissement : les bougies de Hanoucca allumées en Israël.

Invention du miracle de la Lumière du Temple

Après la destruction du Temple par les Romains, en l’an 70 de notre ère, les rabbins pharisiens, qui détestaient les Asmonéens accusés d’avoir provoqué les malheurs du peuple juif, proclamèrent que le rouleau des jeûnes avait perdu son statut d’obligation légale. Toutes les fêtes à la gloire des Asmonéens disparurent, et la coutume d’allumer des lumières à hanoukka ne fut plus observée que par quelques communautés du nord d’Israël et de la Syrie.

Deux cents ans plus tard, l’actualité du Proche-Orient allait redonner une nouvelle jeunesse à la fête de l’inauguration. De 267 à 272, Zénobie, reine de Tadmor (Palmyre), réussit à se constituer un immense empire, de la Mésopotamie à l’Égypte, aux dépens de l’empire romain. Pendant son règne, elle organisa des persécutions systématiques contre les Juifs de ces régions.

La prière sur les miracles de Hanoucca dans un rituel de Fürth, 1738, Jérusalem, Bibliothèque nationale d'Israël.Lorsque l’empereur Aurélien finit par vaincre Zénobie en 272, les Juifs y virent une délivrance miraculeuse et la fête de Hanoucca fut réinstaurée comme signe de cette libération.

Il n’était pas question pour autant d’attribuer ce miracle aux Romains, destructeurs du Temple ; pas question non plus de ressusciter la gloire militaire des Asmonéens.

C’est pourquoi le motif de la fête fut attribué à un miracle de la Lumière du Temple, qui au moment de son inauguration, à l’issue de la révolte des Maccabées, aurait brûlé huit jours au lieu d’une seule journée. Dès lors, à travers les siècles, ce miracle de Hanoucca symbolisa pour les Juifs la victoire de la petite lumière contre l’obscurité de l’exil.

C’est seulement avec l’apparition du sionisme, à la fin du XIXe siècle, que la victoire militaire des Asmonéens refit surface, mais sans supprimer la légende de la « petite fiole d’huile » qui aurait brûlé huit jours, légende qui continue à être raconté dans les communautés juives à travers le monde.

Alain Michel

Publié ou mis à jour le : 2024-12-27 21:04:17
Lorg (22-12-2024 17:31:53)

BRAVO pour la trouvaille !.....eh oui , le Christ était Juif ! Il a fréquenté un "Temple" qui, parait-il , était ni plus ni moins qu'une Synagogue et la quasi-totalité de ses amis et disciples Ã... Lire la suite

Willy (22-12-2024 11:58:58)

Comment expliquer la ressemblance frappante qui existe entre noël et Hanoucca? Même moment de l'année, les bougies d'une par et les sapins illuminés d'autre part N'est-ce pas la preuve que le ch... Lire la suite

Henri75012 (22-12-2024 11:30:23)

Intéressante perspective historique, hors contexte religieux. Etonnement à la lecture de la phrase "Il est intéressant ainsi de noter que Flavius Josèphe, chroniqueur historique du premier siècl... Lire la suite

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