Le 31 août 1907, à Saint-Pétersbourg, l'ambassadeur anglais Sir Arthur Nicolson signe avec le ministre russe des Affaires étrangères Alexandre Iswolski trois accords qui délimitent leurs zones d'influence en Asie centrale et mettent fin à près d'un siècle de querelles. Ainsi prend fin ce que les Britanniques appelaient le « Grand jeu » et les Russes le « Tournoi des ombres ».
L'Angleterre renonce ainsi à ses vues sur le Tibet et la Russie à ses vues sur l'Afghanistan. Par ailleurs, la Perse (plus tard appelée Iran) est divisée en trois zones : le nord sous influence russe, le sud (et ses champs pétroliers) sous influence anglaise, le centre neutre.
Ces accords qualifiés de « révolution diplomatique » satisfont en premier lieu la France, alliée de la Russie et proche du Royaume-Uni, désireuse de réunir l'un et l'autre dans une alliance contre l'Allemagne. Elle n'y réussira que trop bien...
L’expression « Grand Jeu » (the Great Game) a été forgée en 1840 par l’officier britannique Arthur Conolly, qui participa à plusieurs missions de reconnaissance en Asie centrale, dans une de ses lettres adressée au major Henry Rawlinson, connu comme le père de l'assyriologie. Elle fut popularisée beaucoup plus tard par Rudyard Kipling, dans son roman Kim publié en 1901. Le « Grand Jeu » est aussi au coeur des aventures de Corto Maltese, le héros créé par Hugo Pratt en 1967.
Dans la mémoire britannique, cette expression continue de figurer l'Orient mystique, les nomades farouches et la grandeur épique du British Raj. De façon plus prosaïque, elle se rapporte aux rivalités russes et anglaises en Asie centrale, aux confins de leurs empires respectifs, de la Perse au Tibet en passant par l'Afghanistan et le Turkestan.
À part la Perse et le Tibet, tous ces territoires sont le domaine de tribus sédentaires ou nomades constituées en émirats éphémères et combatifs. Musulmans pour l'essentiel, ils ont perdu le souvenir d'une antique grandeur liée au commerce caravanier de la Route de la Soie entre la Chine et le monde méditerranéen.
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