Le 29 novembre 1830, les Polonais se soulèvent contre l'occupant russe. La répression féroce menée par le tsar Nicolas Ier va marquer le début d'une longue nuit pour la nation polonaise, jusqu'à l'indépendance de 1918.
À Paris, on s'indigne d'un mot maladroit attribué au ministre de la Guerre, le général Sébastiani : « L'ordre règne à Varsovie »...
Nostalgie du passé
La Pologne, grand État prospère sous la Renaissance (l'époque de Copernic), avait disparu de la carte le 24 octobre 1795, victime de ses divisions internes et de l'appétit de ses voisins, Prusse, Autriche et Russie.
Napoléon Ier l'avait brièvement restaurée sous le nom de Grand-duché de Varsovie à la suite du traité de Tilsit. Mais en 1815, à la chute de l'empereur, le Congrès de Vienne place la plus grande partie du pays sous l'autorité du tsar Alexandre Ier.
Les provinces orientales de l'ancienne Pologne, peuplées d'une minorité de Polonais, sont annexées à la Russie proprement dite. Quant à la région de Varsovie, aussi appelée « Pologne du Congrès », elle se voit octroyer par Alexandre Ier un statut de royaume uni à l'empire de Russie.
Le tsar en est le souverain. Par la Constitution du 25 novembre 1815, il lui accorde une très large autonomie avec sa propre armée, son gouvernement et son administration. Il témoigne par ailleurs d'un grand respect de la Pologne, de sa culture, de sa langue et de sa religion catholique. Mais les étudiants, les militaires et la bourgeoisie de Varsovie ne se satisfont pas de cette situation et rêvent d'un retour à l'indépendance d'antan.
L'accession au trône de Nicolas Ier, plus autoritaire que son prédécesseur, ravive leur opposition et débouche sur la création de sociétés secrètes. Dans ce contexte court le bruit que le tsar va envoyer des contingents polonais en France pour rétablir le roi Charles X, victime de l'insurrection parisienne des « Trois Glorieuses ».
Espoir avorté
L'insurrection dite « de Novembre » a été soigneusement préparée. Elle est déclenchée à Varsovie dans la nuit du 29 novembre 1830. Le grand-duc Constantin, qui commande l'armée polonaise, prend la fuite cependant que la diète, autrement dit l'assemblée nationale, proclame l'indépendance du pays.
Les insurgés, d'abord victorieux, étalent très vite leurs divisions et leurs incompétences. Face à la menace d'un retour en force des Russes, ils en appellent aux gouvernements occidentaux mais ceux-ci se gardent d'intervenir.
Le 25 février 1831, à Grochow, au sud-est de Varsovie, l'armée polonaise, avec 40 000 hommes, tient tête à 60 000 Russes au prix de 7 000 tués et blessés. Le général Joseph Chloplicki, qui commande l'armée, est lui-même mortellement blessé.
Le tsar Nicolas Ier reprend finalement Varsovie le 8 septembre 1831 avec 110 000 hommes de troupe, après plusieurs semaines de combat. Il exerce alors une répression féroce.
10 000 patriotes polonais sont contraints à l'exil et beaucoup se rendent en France, au nom de la vieille amitié entre les deux pays. Parmi eux figurent le musicien Frédéric Chopin (20 ans) et son ami le poète Adam Mickiewicz (32 ans), qui deviendra professeur de littératures slaves au Collège de France puis bibliothécaire de l'Arsenal. Tous les deux apporteront une contribution majeure au mouvement romantique.
À Paris, le 16 septembre 1831, le ministre de la Guerre, le général Bastien Sébastiani, est interrogé sur la situation à Varsovie par les députés de la Chambre.
Il informe du débat le journal gouvernemental Le Moniteur en ces termes : « Le gouvernement a communiqué tous les renseignements qui lui étaient parvenus sur les événements de la Pologne (...). Au moment où l'on écrivait, la tranquillité régnait à Varsovie (Mouvements divers) ».
L'opposition se déchaîne contre le maladroit ministre et fait ses choux gras de la formule publiée en légende d'une lithographie dans le journal La Caricature : « L'ordre règne à Varsovie ». C'est cette formule qui est restée dans les mémoires bien qu'elle n'ait jamais été prononcée...
Le comte Bastien Sébastiani sera honoré dans ses vieux jours du titre de maréchal de France eu égard à ses exploits dans les armées de Napoléon Ier. Mais ses dernières années seront cruellement assombries par la mort cruelle de sa fille, la duchesse de Choiseul-Praslin.
Le ciel s'assombrit en Russie
Nicolas Ier met fin à l'autonomie du pays après l'insurrection de 1830. Il transforme le royaume en une simple province russe et entreprend une politique de russification forcée.
L'insurrection de Varsovie marque un tournant pour les nombreuses minorités de l'empire russe. Celles-ci ne bénéficient plus de la bienveillance d'antan. Elles doivent affronter désormais la montée du nationalisme grand-russe.
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Camille (27-11-2024 13:47:57)
La Belgique doit une fière chandelle à la Pologne car suite à sa révolution du 25 juillet 1830 contre le roi Guillaume 1er de Hollande que lui avait imposé le Congrès de Vienne en 1815, le Tsar ... Lire la suite