Dans l'Antiquité, les Jeux Olympiques réunissaient tous les quatre ans les Grecs autour de grandes compétitions pacifiques. Ils avaient disparu au IVe siècle de notre ère, après plus de mille ans d'existence. Mais leur souvenir était resté très vif au sein de la jeunesse occidentale, pétrie de culture classique. Et c'est à un jeune homme de bonne famille, le baron Pierre de Coubertin, qu'est revenue l'idée de les ressusciter en leur donnant une dimension planétaire.
Le 23 juin 1894, à la Sorbonne, au coeur de Paris, les délégués de neuf pays fondent le Comité International Olympique (CIO). Ces pays sont la Belgique, la France, le Royaume-Uni, la Grèce, l'Italie, la Russie, l'Espagne, la Suède et les États-Unis. De ce jour date la naissance des Jeux Olympiques de l'ère moderne. La première édition se tient deux ans plus tard à Athènes, du 6 au 15 avril 1896...
Un homme, une idée
Né à Paris, rue Oudinot, le 1er janvier 1863, dans une famille bourgeoise, catholique et monarchiste, Pierre de Coubertin est prédestiné au métier des armes mais lui préfère la pédagogie. Proche du christianisme social illustré par Frédéric Le Play, il se forme à l'institut libre des sciences politiques. Sportif comme de bien entendu, il pratique la boxe, l'équitation, l'aviron et l'escrime.
Il découvre en Angleterre la place du sport dans les études et la formation des élites et en est émerveillé. Il en tire un projet de rénovation du système français d'enseignement : La Réforme sociale. L'idée que le sport contribue à l'épanouissement de la personnalité et à la formation du caractère ne va pas alors de soi. Beaucoup de médecins et d'enseignants s'y opposent au nom de la santé et de la discipline.
Dans une première conférence à la Sorbonne, Pierre de Coubertin avance dès le 25 novembre 1892 l'idée d'« internationaliser le sport ». Il n'a alors que 29 ans ! Il porte son projet à bout de bras, jusqu'à la création officielle du CIO. Celui-ci se donne pour mission de recréer les jeux antiques en évitant les excès du professionnalisme qui avaient gâté ces jeux sur leur fin.
Lors du Congrès de la Sorbonne du 23 juin 1894, le baron de Coubertin donne en premier lieu la parole à un érudit de 62 ans, Michel Bréal, spécialiste des langues anciennes. Celui-ci donne immédiatement le ton en lançant ce qui deviendra la devise des Jeux : « Citius, altius, fortius » (« Plus vite, plus haut, plus fort »). Michel Bréal souffle aussi au baron l'idée d'une course de longue distance inspirée de Marathon.
Le Comité choisit symboliquement un premier président grec en la personne de Demetriou Vikelas et décide d'organiser les premiers jeux à Athènes. En 1896, Pierre de Coubertin prend à son tour la présidence du comité. Il la conservera jusqu'en 1925 avant de devenir le président d'honneur du CIO (note).
Les premiers jeux, à Athènes, en 1896, réunissent en tout et pour tout 241 athlètes représentant 14 nations et 43 épreuves dans 9 disciplines. Les délégations les plus nombreuses viennent de Grèce, France, Allemagne et Grande-Bretagne. Autant dire qu'ils ne recueillent guère d'écho dans le Landernau européen malgré la présence de 50 000 personnes à la cérémonie d'ouverture.
Le baron a obtenu que les Jeux se déroulent d'une fois à l'autre dans une ville différente. Après Athènes doit venir Paris. Pierre de Coubertin espère que ces Jeux-là seront stimulés par la présence concomitante de l'Exposition universelle mais ses espoirs seront trompés et ils passeront eux aussi totalement inaperçus...
Les participants aux Jeux Olympiques se doivent d'être des amateurs (à l'exception des escrimeurs), attirés par la « beauté du sport » et en aucune façon par l'argent. Le baron de Coubertin et ses pairs y voient bien à tort un retour aux traditions antiques car dans les faits, les athlètes grecs étaient grassement rémunérés.
À dire vrai, leurs héritiers de la « Belle Époque », qui appartiennent tous à la haute société européenne comme le baron lui-même, n'imaginent pas d'entrer en compétition sur les stades avec des prolétaires, encore moins avec des indigènes des colonies.
Pour le baron de Coubertin (comme pour la plupart de ses contemporains), il va de soi aussi que les femmes n'ont pas leur place dans les compétitions : « Une olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte (...). Les JO doivent être réservés aux hommes, le rôle des femmes devrait être avant tout de couronner les vainqueurs. » Mais dès 1900, à Paris, elles obtiendront le droit de participer à quelques épreuves (tennis, golf...).
L'interdiction des Jeux aux professionnels est inscrite dans la Charte olympique et dès 1913, l'Américain Jim Thorpe se verra contraint pour cette raison de restituer ses médailles d'or au pentathlon et au décathlon acquises l'année précédente à Stockholm. Mais la réalité finissant par reprendre le dessus, le président du CIO Juan Antonio Samaranch fait voter en 1981 la suppression de la référence à l'amateurisme dans la Charte olympique.
Détournement d'idée
Pierre de Coubertin écrit dès 1892 : « La première caractéristique essentielle de l'Olympisme, c'est d'être une religion. En ciselant son corps par l'exercice comme le fait le sculpteur d'une statue, l'athlète moderne exalte sa patrie, sa race, son drapeau ». En 1908, il reprend à son compte la célèbre formule d'un évêque : « L'important n'est pas de gagner mais de participer » (note).
Le baron conçoit lui-même pour les Jeux de 1920 à Anvers le drapeau officiel de l'olympisme avec cinq anneaux entrelacés représentant les continents et dont les couleurs correspondent à toutes les couleurs qui figurent sur les drapeaux nationaux.
C'est à l'occasion de ces mêmes Jeux qu'est inventé le salut olympique, bras levé, pour la prestation de serment. Ce salut sera repris peu après par le parti nazi et pour cette raison, il est aujourd'hui abandonné.
Aux Jeux suivants, en 1924 à Paris, est officialisée la devise : « Citius, altius, fortius ».
Le jeune baron impose peu à peu sa conception du sport comme moyen d'épanouissement individuel et instrument de cohésion sociale. Il y réussit au-delà de toute espérance ! Le sport et les Jeux Olympiques eux-mêmes vont en effet être récupérés par des gouvernants avides de préparer la jeunesse à ses devoirs civiques et militaires. C'est ainsi qu'aux Jeux de Berlin, en 1936, sous la présidence du Führer, l'hygiénisme olympique flirte dangereusement avec le culte du surhomme tel que le pratiquent les nazis.
Les Jeux Olympiques connaîtront encore de nombreuses avanies liées au contexte politique du moment (Mexico, Munich, Moscou....) mais ils surmonteront à chaque fois les épreuves, forts de l'espérance que placent en eux tous les hommes de bonne volonté.
Vos réactions à cet article
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bmaroy (25-07-2021 11:15:49)
Le sport est incompatible avec l'argent : c'est peut être triste mais c'est incontournable !
Gilles Le BARTZ (21-08-2016 12:07:59)
M de Coubertin a glorifié les JO de Berlin comme une avancée majeure de l'idéal olympique. Je le cite : "La grandiose réussite des Jeux de Berlin a magnifiquement servi l'idéal olympique ". On é... Lire la suite
Monique Bonvallet (23-06-2016 14:25:20)
En complément voir article sur Wikipedia concernant Henri Didon, plus particulièrement les rubriques : Jeunesse, et Didon et Coubertin.