Le 13 septembre de l'an 490 av. J.-C., les Athéniens repoussent à Marathon une tentative d'invasion des Perses.
L'affaire se résout par une modeste charge militaire mais elle n'en suscite pas moins une grande émotion dans toute la Grèce et va bouleverser l'équilibre géopolitique de la région... Il n'est pas interdit de comparer cette bataille à la canonnade de Valmy (1792), elle aussi modeste mais d'une immense portée politique !
Désordres en Asie mineure
Tout commence une génération plus tôt, en 522 av. J.-C., lorsque Darius 1er succède à Cyrus le Grand et Cambyse sur le trône des Achéménides, issu du clan royal des Axamanisiya.
Le « Grand Roi » des Perses et des Mèdes doit faire face dès son avènement à une grave crise de succession. Ses difficultés encouragent les cités grecques d'Asie mineure à rejeter la tutelle perse.
Les Athéniens traversent la mer Égée et se portent à leur secours. Ils débarquent en Asie mineure et brûlent la ville de Sardes.
C'est plus que n'en peut supporter Darius 1er. Après avoir battu les Athéniens près de la rivière Halys, il brûle à son tour Milet et déporte ses habitants en Mésopotamie. Puis il envoie sa flotte vers la Grèce sous le commandement de son gendre Mardonios. Mais la flotte est détruite par la tempête en 492 av. J.-C., non loin du Mont Athos. 300 navires et 20 000 hommes sont portés disparus.
Les Perses en quête de vengeance
La deuxième tentative est la bonne. Sous le commandement des généraux Datis et Artapherne, les Perses et leurs alliés, les Mèdes, débarquent dans la plaine de Marathon, plaine côtière de dix kilomètres de long sur cinq de large, à 35 km d'Athènes environ, de l'autre côté de la presqu'île de l'Attique.
Ils ont été guidés là par un Athénien, Hippias, fils de l'ancien tyran Pisistrate. Ostracisé par ses concitoyens, il a trouvé refuge auprès du « Grand Roi » et s'est mis à son service...
Les envahisseurs sont 100.000 selon la tradition, plus vraisemblablement 20 000. Parmi eux les redoutables Immortels, troupe d'élite du Roi des Rois. Ils ne trouvent en face d'eux que l'armée des citoyens d'Athènes, au nombre de 10 000. Les autres cités grecques ont fait défection, à l'exception de Platées, en Béotie, qui a envoyé un millier d'hommes.
D'après le récit d'Hérodote (Histoires, VI, 102-119), les stratèges ont envoyé à Sparte un messager du nom de Philippidès pour quérir leur soutien. Il aurait parcouru les deux cents kilomètres qui séparent les deux cités en une journée. Les Spartiates se montrèrent disposés à combattre aux côtés des Athéniens mais devaient, selon leur loi, attendre la pleine lune pour se mobiliser...
À Marathon, les dix stratèges se divisèrent entre les partisans d'une action immédiate, conduits par Miltiade, et les partisans de la temporisation, désireux d'attendre leurs alliés. C'est finalement le polémarque Callimaque, commmandant des armées désigné par le sort, qui les départagea en prenant le parti de Miltiade. Les stratèges, chargés de commander à tour de rôle, jour après jour, se désistent l'un après l'autre en sa faveur. Le quatrième jour, enfin, Miltiade choisit de lancer l'attaque.
Les Athéniens et leurs alliés platéens surmontent leur faiblesse numérique. Ils évitent le traditionnel corps à corps désordonné des batailles antiques et se mettent en rang, puis ils chargent les Perses au pas de course, sans se laisser impressionner par leurs impressionnantes armures et leurs flèches.
Aristophane décrira la charge dans Les Guêpes : « Courant avec la lance, avec le bouclier, nous sommes allés à leur rencontre, tout emplis d'une forte colère, en nous mordant la lèvre de fureur. Sous la nuée de flèches, on ne pouvait plus voir le soleil ».
Le centre de l'armée athénienne, trop mince, est enfoncé par les Perses. Mais les Platéens, sur l'aile gauche, et les Athéniens commandés par Callimaque, sur l'aile droite, ont raison de leurs adversaires. Ils réussissent à envelopper l'armée perse et même à se rapprocher des navires perses et les menacer.
Décontenancés par cette nouvelle manière de faire (la première bataille rangée de l'Histoire), les envahisseurs rembarquent sans demander leur reste. Mais c'est avec l'intention de contourner l'Attique par le cap Sounion et de débarquer à Athènes, en profitant de ce qu'elle est sans défense !
Miltiade les prend de vitesse. Avec les héros de Marathon, il traverse l'Attique à marche forcée et arrive à Athènes tandis que la flotte ennemie apparaît au large. Se voyant devancés, les Perses renoncent à poursuivre leur offensive et rebroussent chemin.
Selon un récit tardif de Plutarque (1er siècle de notre ère), Miltiade aurait sans attendre envoyé un messager annoncer la victoire aux habitants d'Athènes, voulant à la fois les rassurer et les mettre en garde contre un débarquement de la flotte perse près de la ville.
Le messager meurt d'épuisement en arrivant sur l'Agora, au pied de l'Acropole, après quatre heures de course. Il aurait tout juste eu le temps de prononcer un mot avant de s'effondrer : « Nenikamen » (on écrit parfois « Nenikikame »), ce qui veut dire : « Nous avons gagné ».
Ce récit est une déformation du récit d'Hérodote (Histoires, VI, 105-106), lequel rapporte qu'un messager du nom de Philippidès aurait été envoyé à Sparte, avant la bataille, pour solliciter l'aide de la cité. La postérité a confondu le messager de Miltiade avec Philippidès.
Le souvenir de ce coureur est à l'origine de l'épreuve la plus prestigieuse des Jeux Olympiques de l'ère moderne, le marathon.
Retentissement
La bataille de Marathon marque la fin de la première guerre médique. Bien que de faible importance par les effectifs engagés et la portée militaire, elle a un retentissement moral considérable.
La Grèce est sauvée grâce à Athènes et la cité asseoit son hégémonie sur ses voisines en prenant la tête de la confédération de Délos, du nom d'une île sacrée où sont conservés les trésors communs à la confédération.
Sous l'impulsion de Thémistocle, le chef du parti populaire, Athènes va aussi se préparer à un nouvel affrontement avec les Perses.
En Perse, cependant, Xerxès succède à son père Darius 1er en 486 av. J.-C. Il prend le temps de réprimer une révolte en Égypte avant de reprendre la guerre contre la Grèce. Cette seconde guerre médique s'achèvera encore au désavantage des Perses à Salamine.
Aujourd'hui encore, dans la plaine de Marathon, on honore le tumulus sous lequel reposent 192 soldats athéniens. Sous un autre tumulus reposeraient 6400 Perses. Sans doute s'agit-il des plus anciens cimetières militaires de l'Histoire.
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Jean Gallet (13-09-2019 17:23:37)
Bonjour Vous parlez des Achéménides comme issus du clan royal des Axamanisiya, il me semble que "HaxāmaniÅ¡iya" veut justement dire Achéménides en ancien perse. Les deux mots désigneraient ... Lire la suite