Sitôt après la capitulation du régime nazi, les rivalités entre les vainqueurs conduisent à la « guerre froide ».
Les tensions culminent dans l'Allemagne occupée. Elles aboutissent à la création de deux États rivaux sur les ruines du IIIe Reich hitlérien : à l'ouest, sur les zones d'occupation américaine, anglaise et française, une République fédérale d'Allemagne (RFA, en allemand Bundesrepublik Deutschland), démocratique et libérale ; à l'est, sur la zone d'occupation soviétique, une République démocratique allemande (RDA, en allemand Deutsche Demokratische Republik). La partie occidentale de Berlin est rattachée de façon informelle à l'Allemagne fédérale.
Cliquez pour agrandir
Après la capitulation de l'Allemagne hitlérienne, la conférence de Potsdam (17 juillet - 2 août 1945) organise le sort du pays et de l'Europe : réparations en nature, établissement de la frontière orientale de l'Allemagne sur l'Oder-Neisse, indépendance de l'Autriche, annexion par l'URSS des États baltes, de la Prusse orientale, de la Pologne orientale.
Mais très vite émerge la rivalité entre l'Union soviétique et les Occidentaux. Un « rideau de fer » sépare l'Europe en deux : d'un côté les pays occidentaux sous la protection de l'Amérique et de l'OTAN, qui bénéficient du plan Marshall, de l'autre l'URSS et ses « satellites ». L'Allemagne elle-même est séparée en deux États hostiles l'un à l'autre...
Batailles partisanes
Après la capitulation de l'Allemagne hitlérienne, la conférence de Potsdam (17 juillet - 2 août 1945) a organisé le sort du pays : réparations en nature, établissement de la frontière orientale sur l'Oder-Neisse, indépendance de l'Autriche, jugement des dirigeants nazis...
Les commandants en chef des quatre armées alliées (soviétique, américaine, anglaise et française) administrent chacun leur zone d'occupation. La capitale, Berlin, enclavée dans la zone soviétique, est elle-même partagée entre les « Quatre Grands ». Mais très vite se font jour les rivalités entre l'Union soviétique de Staline et les trois Occidentaux. Churchill, bien que n'étant plus Premier ministre, manifeste publiquement sa crainte d'une nouvelle guerre entre les anciens alliés. C'est le début de la guerre froide.
Dans leur zone d'occupation, les Occidentaux autorisent progressivement la reprise des activités des partis politiques et leur confèrent des responsabilités locales et régionales. Les principaux partis sont le SPD socialiste (Sozialdemokratische Partei Deutschlands), la CDU démocrate-chrétienne (Christlich Demokratische Union Deutschlands) et le LDPD libéral-démocrate (Liberal-Demokratische Partei Deutschlands).
Dans chaque zone occidentale sont reconstitués les anciens Länder (« pays »). Le gouvernement français octroie toutefois un statut d'autonomie à la Sarre, le 12 février 1946, avec l'intention sous-jacente de la rattacher ultérieurement à la France (en définitive, les Sarrois choisiront de redevenir pleinement allemands par le référendum du 23 octobre 1955).
Rien de tel dans la zone d'occupation soviétique ! L'occupant place à tous les postes clés des communistes du KPD (Kommunistische Partei Deutschlands), dirigé par Walter Ulbricht. Cet ancien ouvrier ébéniste né le 30 juin 1893 a été député au Reichstag en 1928 et s'est réfugié à Moscou à l'époque nazie.
Le 2 septembre 1945, en vue de gagner la sympathie du monde rural, les communistes annoncent une expropriation des propriétés des dignitaires nazis et plus largement des propriétés de plus de cent hectares, en vue de les redistribuer aux paysans sans terre. 2,2 hectares sont ainsi prestement redistribués à un demi-million de paysans.
En prévision des élections municipales du 20 octobre 1946, le parti communiste fusionne avec l'aile gauche du SPD et forme le Parti socialiste unifié d'Allemagne (Sozialistische Einheitspartei Deutschlands, SED), dont Walter Ulbricht devient le secrétaire général.
Lors des premières élections, malgré ses 1,3 millions d'adhérents et le soutien actif des organisations de masse (syndicats, organisations de jeunesse), le nouveau parti n'obtient nulle part la majorité absolue mais devient le parti dominant dans la zone soviétique avec 48% des suffrages. À Berlin, il obtient moins de 20% des voix, essentiellement dans la zone soviétique.
De l'alliance à la rupture
Tandis que se dégradent les relations entre Soviétiques et Occidentaux, la municipalité de Berlin est frappée de paralysie par le veto du commandant en chef de la zone soviétique à la nomination du maire élu par les partis dits « bourgeois ».
C'est en définitive l'annonce, le 5 juin 1947, par les Américains du plan Marshall, un plan d'aide à la reconstruction de l'économie européenne, qui met le feu aux poudres. Pour qu'il soit applicable à l'Allemagne, il est impératif de créer une nouvelle monnaie. Les Occidentaux s'y attellent en dépit de l'opposition des Soviétiques.
C'est ainsi que dans les trois zones d'occupation occidentales, le 18 juin 1948, les Allemands sont invités à échanger leurs anciennes coupures (ReichsMark, RM) contre des nouvelles (Deutsche Mark, DM). Les espèces sont converties au taux de 1DM/1RM et les comptes bancaires au taux de 1DM/10RM.
Comme les détenteurs de fortunes acquises de manière douteuse évitent de se présenter à la banque, la masse monétaire diminue brutalement ; les prix se stabilisent et les magasins se réapprovisionnent en toute tranquillité.
Le mérite de l'opération revient au directeur de l'Économie Ludwig Erhard, artisan du « miracle économique ». Cet économiste deviendra député chrétien-démocrate puis ministre de l'Économie et enfin chancelier (1963-1966) de la future Allemagne fédérale.
Les affaires reprennent à l'ouest. Mais à l'est, il en va tout autrement. Dès le 23 juin 1948, les Soviétiques mettent en place une monnaie concurrente et, surtout, le lendemain, décrètent le blocus terrestre de Berlin-Ouest (les trois zones occidentales de l'ancienne capitale) pour y empêcher l'introduction du Deutsche Mark.
Un bras de fer s'engage entre Occidentaux et Soviétiques. Les premiers organisent un gigantesque pont aérien entre Berlin-Ouest et l'Allemagne occidentale pour approvisionner l'enclave et l'empêcher de tomber dans l'escarcelle soviétique. Après onze mois et près de trois cent mille vols, pour le transport de 2,3 millions de tonnes de marchandises, les Occidentaux l'emportent et obligent les communistes à desserrer le blocus. Ils ont vaincu mais au prix d'une séparation désormais inéluctable entre les deux Allemagnes, celle qui a accepté la démocratie représentative et libérale, façon occidentale, et celle qui s'est vu imposer un régime de parti unique, façon soviétique.
Deux Allemagnes
À l'Ouest, les Alliés demandent aux représentants des Länder de convoquer une Assemblée constituante. Celle-ci se réunit le 1er septembre 1948 à Bonn, petite ville tranquille des bords du Rhin.
Elle est présidée par Konrad Adenauer (72 ans). Bourgmestre de Cologne en 1917, ardent pro-européen, il manqua de peu de devenir chancelier du Reich en 1926. Retiré de la politique à l'époque nazie, il revient sur le devant de la scène en créant le parti chrétien-démocrate (CDU).
L'assemblée rédige un projet de Constitution ou Loi Fondamentale qui est ratifié le 12 mai 1949 et conduit le 21 septembre 1949 à la proclamation de la République fédérale allemande.
À l'Est, le Congrès du peuple, qui siège depuis mars 1948, adopte une Constitution le 30 mai 1949. Elle débouche le 7 octobre 1949 sur la naissance de la République démocratique allemande.
La Loi fondamentale (Grundgesetz) du 23 mai 1949 fait de l'Allemagne (RFA) un « État fédéral, démocratique et social ». Elle compte à partir de 1952 dix Länder et Berlin-Ouest (avec un statut particulier). Avec une superficie de 248 000 km2, 60 millions d'habitants et l'essentiel des ressources industrielles de l'ancien Reich, elle pèse d'un poids au moins quatre fois plus élevé que sa rivale, la RDA (100 000 km2, 19 millions d'habitants).
Le président de la République est élu pour cinq ans (et rééligible une fois) par un collège électoral. Mais ses pouvoirs sont limités. Le véritable chef de l'exécutif est le chancelier, élu par le Bundestag (diète fédérale ou assemblée législative) à la majorité absolue.
Le pouvoir législatif est partagé entre le Bundestag et le Bundesrat (Conseil fédéral ou Sénat), le premier ayant le dernier mot dans les projets de loi. La constitutionnalité des lois est garantie par le Tribunal constitutionnel fédéral de Karlsruhe, l'équivalent de la Cour suprême américaine.
Pour ne pas rééditer les erreurs de la République de Weimar, les constituants ont interdit le recours au référendum et l'élection du président au suffrage universel. Ils introduisent une petite dose de proportionnelle dans l'élection des députés pour que soient représentés au Bundestag tous les partis (les partis communiste et néo-nazis n'en sont pas moins interdits).
Le 15 septembre 1949, Konrad Adenauer est élu chancelier et forme un gouvernement de coalition entre chrétiens-démocrates de la CDU et libéraux du FPD, dans lequel Ludwig Erhard devient ministre de l'Économie.
Le statut d'occupation est assoupli jusqu'à être complètement abrogé le 5 mai 1955. Les forces alliées demeurent sur place dans le cadre de l'OTAN à laquelle participe la RFA.
La Chambre du peuple provisoire désigne comme président de la République un vieux militant communiste, Wilhelm Pieck, et comme chef du gouvernement le socialiste Otto Grotewohl. Les députés de la nouvelle Chambre du peuple (Volkskammer) sont élus pour quatre ans sur une liste unique, dressée par le Front national, une coalition au sein de laquelle dominent les communistes du SED.
La réalité du pouvoir appartient au secrétaire général (puis premier secrétaire) du SED, Walter Ulbricht, qui succède assez vite d'ailleurs à Wilhelm Pieck à la présidence de la République. Obligé de se retirer pour raison de santé en 1971, il cèdera la direction du parti à Erich Honecker, lequel restera aux commandes jusqu'à sa démission, le 18 octobre 1989, à la veille de l'effondrement de l'État.
Sur l'histoire de l'Allemagne, nous recommandons de belles synthèses : Histoire de l'Allemagne, de la Germanie à nos jours (Henry Bogdan, Perrin, Tempus, 1999) et Histoire de l'Allemagne des origines à nos jours (Joseph Rovan, Points Histoire, 1984).
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Sellengiv (26-09-2006 11:44:49)
Article intéressant et instructif. Les recherches que vous avez effectuées vous permettent peut-être de répondre à cette question: Pourquoi (et contre quoi) les soviétiques qui étaient arrivés... Lire la suite
bobi (07-06-2006 11:20:34)
Cet article est bien traité dans son ensemble et agréable à lire. Il me paraît assez complet et illustre bien le programme de terminale ES