Le 21 décembre 1958, Charles de Gaulle est élu pour sept ans à la présidence de la République par un collège électoral qui réunit les parlementaires et d'autres élus, conformément à la Constitution de la Ve République entrée en application le 8 octobre précédent.
Il obtient des 81 000 «grands électeurs» une confortable majorité de 78% des voix (500 abstentions seulement).
Le Général a été appelé au pouvoir le 13 mai 1958, et est devenu ainsi le dernier Président du Conseil de la IVe République, le temps de mettre en route les institutions de la Ve République.
Sa prise de fonctions en qualité de président de la République a lieu au palais de l'Élysée, le 8 janvier 1959 suivant, avec la transmission officielle des pouvoirs par René Coty, dernier président de la République précédente.
Le général de Gaulle nomme aussitôt au poste de Premier ministre son fidèle compagnon de combat Michel Debré et réforme à marche forcée les institutions et l'économie.
Charles de Gaulle a obtenu de l'Assemblée de pouvoir gouverner par ordonnances pendant quatre mois, jusqu'au 4 février 1959, sans passer par la discussion et le vote des textes devant les députés. Il va profiter de cette facilité pour débloquer à marche forcée l'économie du pays, grippée par la crise politique et la guerre en Algérie. Pas moins de 70 textes sont à cet effet promulgués.
Un premier train de mesures permet de combler les vides de la réforme constitutionnelle (mode de scrutin...) ; un deuxième se rapporte aux réformes de structure (hôpitaux, défense...) ; un troisième enfin concerne l'économie.
La France a bénéficié d'une croissance soutenue sous la IVe République avec un taux annuel moyen de 4,9% depuis 1950. Mais l'économie montre des signes d'essouflement. Les réserves de devises représentent l'équivalent d'un mois d'importations seulement et l'inflation s'accélère sur un rythme annuel de 15%. Le ministre des Finances Antoine Pinay et son collaborateur Georges Pompidou font appel à l'économiste Jacques Rueff pour définir les réformes économiques qui s'imposent.
Jacques Rueff réunit à partir du 30 septembre 1958 un comité de huit personnes (président de Péchiney, de la Société générale...). 39 séances plus tard, le rapport, rédigé par Jacques Rueff lui-même, est remis au général de Gaulle le 8 décembre. Il ne compte que 25 pages et s'en tient à quelques mesures essentielles. Le président de Gaulle les fait adopter dans leur intégralité le 23 décembre. Ces mesures sont présentées au public sous le nom de « plan Pinay-Rueff », Antoine Pinay bénéficiant d'une aura exceptionnelle dans la population.
Le plan prescrit en particulier une sévère cure d'amaigrissement de l'administration, allant jusqu'à supprimer la retraite des anciens combattants (cette mesure, symboliquement odieuse, sera plus tard rapportée). Le plan supprime les indexations (notamment sur le blé) et libère résolument les échanges extérieurs. Enfin, il dévalue le franc de 17% et, mesure la plus spectaculaire, crée un « nouveau franc » égal à cent anciens francs. La nouvelle monnaie est lancée officiellement le 1er janvier 1960. Les résultats bénéfiques de ce plan se font sentir très vite avec en1959 un budget en équilibre pour la première fois depuis 1930 et dès 1962 une relance de la croissance et une balance commerciale excédentaire.
Pour parachever ce succès, Jacques Rueff suggère de passer à des réformes structurelles. Pourquoi pas?
Le 13 novembre 1959, un décret constitue un nouveau comité président par le Premier ministre Michel Debré, assisté de Jacques Rueff et d'un autre Polytechnicien, ancien président de la SNCF, Louis Armand.
Le comité Rueff-Armand rend un rapport en juillet 1960, truffé d'idées libérales, visionnaires mais assez générales, dont la plus grande partie resteront lettre morte, y compris la réforme des taxis parisiens ou encore l'abolition de la loi de 1948 sur le blocage partiel des loyers.
À vrai dire, ces réformes de structure peuvent attendre. Avec la fin de la guerre d'Algérie et le « plan Pinay-Rueff », la reprise économique est telle, que le ministre des finances Valéry Giscard d'Estaing doit, dès le 12 septembre 1963, engager un plan de stabilisation destiné à freiner l'inflation.
D'autres réformes s'enchaînent. Ainsi, le 6 janvier 1959, une ordonnance prolonge la scolarité obligatoire jusqu'à 16 ans. Elle est toujours en vigueur. Le 31 décembre 1959 est promulguée la loi Debré sur l'enseignement privé. On lui doit la distinction actuelle entre établissements hors-contrat, établissements sous contrat simple (l'État rémunère les maîtres), établissements sous contrat d'association (l'État participe aussi aux dépenses de fonctionnement et les familles ont en charge les liens avec le culte), établissements privés intégrés à l'enseignement public (écoles d'entreprise).
Enfin, le 16 septembre 1959, dans une déclaration télévisée, le général de Gaulle évoque pour la première fois le « droit des Algériens à l'autodétermination ». C'est un pas décisif vers la résolution du drame algérien.
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