Par le sénatus-consulte du 18 mai 1804, le Sénat français déclare : « Article premier. Le gouvernement de la République est confié à un empereur, qui prend le titre d'Empereur des Français... »
Ce texte curieux, aussi appelé « Constitution de l'An XII », établit l'Empire français sans abolir formellement la République !... Ce n'est que deux ans plus tard, en 1806, que les formes républicaines de l'État disparaîtront, en même temps que le calendrier révolutionnaire.
Calcul politique
Le général Bonaparte, appelé en 1799 pour sauver la Révolution, a magistralement réussi à écarter la menace d'une restauration de la monarchiste et d'un retour à l'Ancien Régime, qui aurait lésé beaucoup de monde, à commencer par les acquéreurs de biens nationaux.
Après avoir instauré le Consulat, il a pu conclure la paix avec les puissances étrangères dont l'Angleterre, rétablir la paix religieuse à l'intérieur des frontières et mettre en application la plupart des réformes administratives engagées par le précédent régime, le Directoire.
Mais cette oeuvre gigantesque a été accomplie d'une manière de plus en plus autoritaire, la majorité rurale du pays étant restée nostalgique de l'ancienne monarchie.
Pour consolider son pouvoir, Bonaparte se fait dans un premier temps octroyer le Consulat à vie, avec le droit de désigner lui-même son successeur, par le plébiscite du 2 août 1802. Cette quasi-royauté n'a d'autre effet que d'exciter un peu plus l'opposition royaliste.
Le Premier Consul décide donc de franchir un pas supplémentaire en devenant Empereur héréditaire sous le nom de Napoléon 1er. Cette curieuse monarchie républicaine est présentée comme une forme de reconnaissance des citoyens français envers celui qui a clos la Révolution, et restauré la paix et la prospérité.
Mais pour l'intéressé lui-même, ancien protégé de Robespierre le Jeune, qui n'a jamais renié la Révolution, l'instauration de l'Empire résulte aussi d'un calcul froid et rationnel : il s'agit de ramener la France dans le concert des nations européennes, dont toutes, à l'exception notable de la Suisse, sont des monarchies héréditaires ; pour cela, il ne voit pas de meilleur moyen que de la rattacher au modèle dominant.
Le terme d'empereur est préféré à celui de roi, que les révolutionnaires ont en horreur. Il renvoie également à l'Antiquité classique, très prisée dans les cercles cultivés, ainsi qu'aux Mérovingiens et Carolingiens que redécouvrent les archéologues et les historiens. Enfin, il place Napoléon 1er sur un pied d'égalité avec les deux principaux souverains du continent, l'empereur d'Allemagne et le tsar de Russie.
Le sacre, à Notre-Dame-de-Paris, le 2 décembre 1804, va solenniser la fondation de l'Empire.
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Aucune réaction disponible