Révolution dans le baroque

Le Caravage, peintre et truand

À la fin du XVIe siècle, la Rome des papes attire les artistes de toute l'Europe. Parmi eux le Caravage, génie au tempérament impétueux. Il va révolutionner l'art hérité de la Renaissance en introduisant un réalisme à l'opposé des canons antiques. Il prend le peuple de la rue et des tavernes pour modèle, y compris dans ses tableaux religieux.

Après sa mort, en 1610, son style, le « caravagisme », fait de clair-obscur et de modèles à mi-corps, va séduire toute une génération de nouveaux artistes, parmi lesquels, en France, Georges de La Tour... 

Camille Vignolle

Caravage, autoportrait en Bacchus malade (galerie Borghèse, Rome, 1595)

Une peinture troublante

Né en 1571 à Caravaggio (Lombardie), dans une famille honorable, sous le nom de Michelangelo Merisi, le jeune homme se rend dans la Rome de la Contre-Réforme catholique, éprise de maniérisme et de baroque. Il manifeste son talent dans des oeuvres profanes ou mythologiques, dans des natures mortes de fruits, des portraits d'hommes des rues, de truands ou de joueurs semblables à lui.

Il entre en 1593 dans l'atelier de Giuseppe Cesari, dit « Le Cavalier d'Arpin », un portraitiste alors très connu. C'est là qu'il réalise son autoportrait en Bacchus malade (ci-dessus) et le Garçon au panier de fruits. Ce chef-d'oeuvre figure dans le butin volé en 1607 par Scipione Borghese, neveu du pape Paul V (Camille Borghese), au Cavalier d'Arpin. Il trône aujourd'hui dans la galerie Borghese (Rome).

Jeune homme avec un panier de fruits (galerie Borghèse, Rome, 1593)Grâce au clair-obscur (chiaroscuro), une technique inventée un siècle plus tôt par Léonard de Vinci, le jeune Michelangelo Merisi donne aux visages un relief théâtral. Nul ne maîtrise comme lui la lumière ni ne rend avec autant de force l'expression des visages et des attitudes comme ci-dessous dans le Crucifiement de saint Pierre.

Ses commanditaires, grands personnages du Saint Siège ou de l'aristocratie locale, lui pardonnent volontiers ses beuveries, son goût pour les jeunes garçons et ses frasques jusqu'au duel fatal qui l'oblige à quitter la Rome des papes...

Le Crucifiement de saint Pierre (Le Caravage, vers 1600, église Santa Maria del Popola, Rome)

Génie en cavale

Le 28 mai 1606, le Caravage tue un homme à Rome, sur le Champ de Mars, suite à une querelle de jeu. Commence alors une cavale qui le mènera jusqu'à Malte. Durant cette période, il va encore réaliser quelques-uns de ses plus grands chefs d'oeuvre.

Celui que l'on surnomme désormais Le Caravage (Il Caravaggio), d'après son lieu de naissance, renonce dès lors aux peintures profanes. Il ne va plus peindre que des sujets religieux, dans des tonalités sombres et avec une violence d'expression extrême qui nous renvoie à la dure réalité de la condition humaine, comme ci-dessous David tenant la tête de Goliath (1605).

David tenant la tête de Goliath, par Caravage (1606, huile sur bois, musée historique, Vienne)

Le peintre, âgé de 35 ans, se rend d'abord à Naples où l'a précédé sa réputation. Mais il n'y reste que quelques mois avant de s'embarquer en juin 1607 pour l'île de Malte, que gouverne un ordre de moines-chevaliers.

Le grand-maître de l'ordre, Alof de Wignacourt, qui admire le peintre, l'accueille avec faste, peu soucieux de son mauvais caractère et de ses crimes passés. Il lui commande son portrait, aujourd'hui au musée du Louvre à Paris, ainsi que d'autres peintures, telle la Décollation de saint Jean Baptiste, aujourd'hui dans la crypte de la cathédrale de La Valette, capitale de Malte.

Le 14 juillet 1608, Le Caravage est fait chevalier de « grâce magistrale » par son protecteur mais cela ne le rend pas plus affable pour autant. Quelques semaines plus tard, il se bagarre à l'épée et au pistolet avec d'autres chevaliers.

Enfermé au fort San Angelo, il s'en évade grâce à des complices et gagne la Sicile à bord de la barque d'un pêcheur. Là, comme précédemment, il est accueilli avec bienveillance, cette fois par des religieux franciscains.

Il peint pour eux Le Reniement de saint Pierre et d'autres chefs-d'oeuvre mais garde la nostalgie de Rome. Après quelques nouvelles bagarres qui le laissent défiguré, il embarque sur un bateau en direction de Rome.

Il débarque à Porto Ercole cependant que le bateau poursuit sa route avec ses effets personnels.

Le peintre n'atteindra jamais Rome où il comptait gagner le pardon du pape. Il meurt le 18 juillet 1610, victime d'une fièvre maligne ou plus probablement d'une septicémie occasionnée par une ancienne blessure au genou.

Publié ou mis à jour le : 2024-10-17 14:34:53
Klakee-Nah (14-01-2024 13:41:42)

Un voyou avec du talent. Cela devait être exceptionnel en ce temps là. Que dire d'aujourd'hui?

Daniéle (31-05-2019 18:32:07)

J’ai beaucoup apprécié l’article sur Le Caravaggio qui est mon peintre préféré Merci

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