Valenciennes consacre une exposition (23 octobre 2009 - 7 février 2010) à l'un de ses enfants, le peintre Jean Baptiste Vanmour (1671-1737), qui peignit sous toutes les coutures Constantinople et la cour du sultan.
Que saurions-nous de l'empire ottoman sans l'activité picturale de Jean Baptiste Vanmour ? Par ses centaines de tableaux, copiés et reproduits dans toute l'Europe, il nous a laissé une aimable et très complète vision de la capitale ottomane et de la Sublime Porte (surnom donné dans les chancelleries à la cour du sultan).
Jean Baptiste Vanmour (on écrit aussi Jean-Baptiste Van Mour) naît le 9 janvier 1671 dans une famille d'artistes à Valenciennes, dans le Hainaut. Notons que Valenciennes est aussi la ville natale d'artistes majeurs : le peintre Watteau et le sculpteur Carpeaux.
Par le traité de Nimègues, en 1678, le roi d'Espagne cède la ville au roi Louis XIV. C'est donc en qualité de Français que le jeune peintre se rend en 1699 à Constantinople ou Istamboul, capitale de l'empire ottoman.
Il vivra jusqu'à sa mort, en 1737, dans le quartier des ambassades, à Galatasaraï, avec le titre honorifique de « peintre ordinaire du roi [de France] et en Levant ».
On ne sait rien de sa vie, sinon qu'il bénéficie de la sympathie du sultan et des dignitaires de la cour. Son atelier reçoit de nombreuses commandes des ambassadeurs européens, désireux de ramener des souvenirs de leur séjour.
C'est ainsi que ses peintures, paysages, scènes de rue et portraits, vont circuler dans toute l'Europe et nourrir l'imagination de ses contemporains.
La notoriété de Vanmour doit beaucoup à un recueil de cent gravures réalisées en 1714 par l'ambassadeur Ferréol d'après ses tableaux. Ces gravures décrivent les personnages emblématiques de Constantinople au début du XVIIIe siècle : dignitaires, religieux, gens du peuple.
Elles traduisent une grande empathie de l'artiste à l'égard de sa ville d'accueil, qu'il perçoit comme une contrée européenne...
Son influence va se prolonger bien au-delà de sa mort. Antonio Guardi à Venise, William Hogarth à Londres, Jean-Baptiste Pater et Carle Van Loo à Paris... s'inspirent de ses modèles pour leurs « turqueries », souvent en en rajoutant dans l'exotisme érotique. Un modèle de Vanmour se retrouve même dans Le Bain turc de Jean-Dominique Ingres, au siècle suivant.
La ville que découvre Vanmour en 1699 est l'une des plus grandes cités du monde, avec un total de 600 000 habitants, soit autant que Londres ou Paris. Elle occupe les deux rives de la Corne d'Or, un chenal qui débouche sur la mer de Marmara, face à l'Asie.
C'est une ville très cosmopolite où se croisent toutes les populations de l'empire.
Les Grecs et les Arméniens chrétiens occupent les fonctions les plus enviables dans le commerce, les affaires et l'administration.
Les janissaires, fantassins d'élite, tiennent le sultan sous surveillance. C'est à eux que le sultan Ahmet III doit son avènement en 1703. Il leur devra aussi sa déposition en 1730.
Entretemps, sous son règne éclairé, l'empire connaît un automne doré, la « période des tulipes », caractérisé par une grande ouverture sur l'Europe et un épanouissement des arts.
Le sultan a le bon goût d'accueillir le roi de Suède Charles XII, après sa défaite à Poltava, ce qui lui vaut d'être agressé par le tsar Pierre le Grand. Il enlève la Morée (le Péloponnèse) aux Vénitiens mais se fait battre à Belgrade par le prince Eugène et doit signer le traité de Passarowitz, qui amorce le repli des Turcs dans les Balkans.
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