15 mars 2024

Christian Rioux, chroniqueur du Devoir de Montréal, s'indigne de l'abus de références aux années 1930-1940 dans les médias, qu'il s'agisse de la guerre en Ukraine ou des élections européennes. C'est ainsi Valérie Hayer, tête de liste du parti présidentiel aux élections du 9 juin 2024, qui lance : « Hier, Daladier et Chamberlain ; aujourd’hui, Le Pen et Orbán. Les mêmes mots, les mêmes arguments, les mêmes débats. Nous sommes à Munich en 1938. » L'analogie est déplacée et risible. Tout comme était risible la comparaison entre le siège de Gaza et le ghetto de Varsovie par le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel. « Le génocide est en cours, » avait-il alors avancé...

Cette sempiternelle référence aux « heures sombres du nazisme » a été qualifiée ironiquement de reductio ad hitlerum en 1951 par le philosophe Leo Strauss et réduit le monde à une opposition manichéenne entre le Bien et le Mal. Elle dispense chacun de faire un travail de réflexion. Cela plaît aux incultes qui n'ont rien appris ou tout oublié de la complexité du monde et de l'Histoire. Ils peuvent ainsi moucher un contradicteur sans avoir besoin d'argumenter. On appelle « point Godwin » (du nom de son auteur, l’avocat américain Mike Godwin) le moment quasi-inéluctable où l'un des participants à une discussion politique en vient à cette reductio ad hitlerum faute d'argument raisonnable...