À travers cette étude très détaillée qui a fait l'objet de sa thèse de doctorat, l’historien et chroniqueur Xavier Mauduit nous entraîne dans les arcanes de la Maison de l’Empereur, véritable centre de gravité du pouvoir (Le ministère du faste, 2016)...
Le faste a souvent accompagné l’exercice du pouvoir en France. Plus qu’un simple décorum, il contribue à la gouvernance par l’image qu’il renvoie du souverain. Sous l’Ancien régime, le règne de Louis XIV a donné le ton. Mais la pompe n’est pas l’apanage de la monarchie dans ses différents épisodes. Napoléon Ier a reconstitué une Cour avec son étiquette, ses gratifications et ses réceptions. Les deux premières républiques n’ont pas mis fin au faste du pouvoir.
Plus qu’aucun autre, Napoléon III, à partir de 1852, a tenu à faire de la Maison de l’Empereur la vitrine et le miroir de l’élite de son temps, composée de la noblesse et de la haute bourgeoisie, symboles de la prospérité économique de la France durant cette période.
Au sein de cette Maison s’activent entre 2400 et 2800 personnes du début à la fin du régime : lingères, dames d’honneur, valets de pied, écuyers, aides de camp, officiers d’ordonnance, veneurs, fonctionnaires, chambellans, responsables et employés des domaines, militaires, etc). Un effectif comparable à ceux des Maisons de Napoléon Ier et de Louis XVI.
Réceptions somptueuses, parades, manifestations artistiques ont mis en scène le pouvoir de manière publique comme pour mieux montrer sa puissance et son prestige.
Pas moins de trente millions sont mis à la disposition de l’Empereur pour ses dépenses personnelles et l’entretien des domaines de la couronne. En fait la Cour est un mélange des fondements des expériences précédentes. « Elle est une adaptation, à un moment donné, des exemples du passé avec pour modèle la cour d’Ancien régime », écrit l’auteur. Même si bien sûr, elle ne peut être reproduite à l’identique, notamment parce que les charges honorifiques ne sont plus réservées à la noblesse.
On trouve également un cérémonial qui rappelle la cour de Napoléon Ier, bien que Napoléon III entende se démarquer de son oncle. En 1851, Morny expliquait : « Le Prince-président n’a pas besoin de se réclamer tant de son oncle. On est un grand homme par les faits et non par la cause. » Aussi Napoléon III s’est-il distingué de son aïeul en faisant de la « fête impériale » l’antithèse de l’austérité de la Cour de Napoléon Ier. Il a fait son miel des traditions auliques tout en adaptant la Maison de l’Empereur et sa cour aux évolutions de son époque.
Enfin, en rendant visible sa fonction et les fastes du pouvoir, Napoléon III s’est révélé comme un « passeur » de rites et d’apparats entre les régimes précédents et la République. « La Maison préfigure une institution bien moins étoffée mais tout aussi importante : la Maison du président de la République, réduite au minimum fonctionnel.
De même, la République mobilise l’imaginaire inventé par Napoléon III pour construire l’apparat autour du chef de l’État (…) Le faste maintenu autour du chef de l’État est compréhensible par l’ensemble de la population, des classes populaires aux classes dominantes », écrit l’auteur qui conclut à juste titre : « Encore au XXIe siècle, les présidents sont les héritiers de celui qui fut le premier d’entre eux, par l’adaptation républicaine du faste impérial. »
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