Deux femmes profitent du soleil au bord d'une rivière... Le film commence de façon idyllique en nous dévoilant d'emblée toute la tendresse qui existe entre une mère et sa fille. Malheureusement, la suite de leur relation va s'avérer plus orageuse. Une dégradation inévitable puisque l'on comprend vite que la mère est totalement obsédée par sa progéniture...
Voilà une situation bien banale qui ferait aujourd'hui les beaux jours des plateaux télé, mais nous sommes à l'époque du Roi Soleil, et la mère n'est autre que madame de Sévigné, présente dans tous les manuels littéraires pour sa maîtrise de l'art épistolaire.
On se doute donc que, en allant voir le film qu'Isabelle Brocard a imaginé à partir de sa correspondance, ce ne sont pas les rebondissements qui vont faire l'intérêt du scénario, ni même sa peinture du XVIIe siècle.
On croise bien quelques personnages qui parlent à notre mémoire de lecteurs, comme madame de Lafayette ou La Rochefoucauld, mais le propos n'est pas de nous replonger dans l'époque. La Cour se résume à deux-trois intrigues galantes, la géopolitique à de vagues allusions au conflit avec la Hollande. Quant au château de Versailles, nous n'en verrons que quelques bosquets.
Aucun doute : nous sommes bien dans une œuvre qui cherche avant tout à s'interroger sur la psychologie de son duo de personnages principaux. D'un côté, madame de Sévigné en mère possessive et donc maladroite, incapable de véritablement cerner les intentions de sa fille. De l'autre Françoise, à la fois attentionnée et intransigeante, aux réactions dignes d'une ado contrariée.
Enfermées dans leurs contradictions, on ne peut qu'assister à la montée de la violence des sentiments, à la perte de contrôle de soi symbolisée par des tenues de plus en plus négligées, tandis que les décors se font oppressants. Mais pourquoi madame de Sévigné est-elle tant attachée à cette fille finalement antipathique, alors que son fils Charles se montre en tous points charmant ?
On voit bien ici toute la modernité du propos sur des relations mère-fille observées avec une loupe qui, semble-t-il parfois, subit l'influence de la psychanalyse. Face à ce mystère, le film reste sans réponse, tout comme il ne fait qu'effleurer le thème de la création littéraire qui a métamorphosé une marquise parmi d'autres en écrivaine incontestée.
Sans être purement féministe, l'œuvre rappelle les difficultés rencontrées par ces femmes d'une autre époque mais qui sont nos contemporaines par leur réflexion sur le couple, leur quête du bonheur, leur attachement à la famille pour lutter contre la solitude. Ce film est finalement un bel hommage a une femme qui n'a cessé de se livrer et qui reste malgré tout fort mystérieuse.
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
niki (07-03-2024 17:22:32)
article intéressant, sur une femme que j'ai adoré étudier lorsque j'étais encore étudiante, j'étais fascinée par les lettres qu'elle écrivait à sa fille, mais je n'imaginais pas les difficult... Lire la suite
Claude Edouard (06-03-2024 12:32:27)
Etudie-t-on encore notre héroïne à l'école? Je peux encore réciter par coeur la lettre apprise à l'école primaire en 1945: "L"archevêque de Reims revenait hier for vite de St Germain..." ... Lire la suite