Le 7 octobre 1950, 30 000 soldats chinois pénètrent au Tibet. Les troupes locales se débandent presque sans combattre.
C'en est fini d'un demi-siècle d'indépendance pour le Tibet, une immense contrée que les Chinois appellent simplement Xizang (« l'Entrepôt de l'ouest »).
L'actuelle Région autonome du Tibet, partie intégrante de la République populaire de Chine, est vaste de 1,2 million de km2, soit l'équivalent de la France et de la péninsule ibérique, mais elle n'est peuplée que de 4 à 5 millions d'habitants, soit une densiété quasi-désertique de 4 hab./km2.
La très faible densité du Tibet s'explique par la géographie. Ce plateau, adossé à l'Himalaya, s'étage entre 3000 et plus de 6000 mètres d'altitude, ce qui lui vaut d'être surnommé à juste titre le « Toit du monde ». C'est le berceau de grands fleuves (Brahmapoutre et Mékong). Les ressources se limitent à l'élevage et un peu d'agriculture dans les vallées et les dépressions.
Le règne de l'arbitraire
L'aire de civilisation tibétaine dépasse très largement les frontières de l'actuelle Région autonome. Elle inclut les petits royaumes himalayens du Bouthan et du Sikkim. Fermé aux étrangers de 1792 aux années 1980, le Tibet a été, pendant le millénaire antérieur, très ouvert et réceptif à toutes les influences culturelles (mongoles, chinoises et surtout indiennes).
Lorsqu'un soulèvement républicain renverse la dynastie mandchoue, en 1911, la garnison chinoise de Lhassa est chassée et le Tibet central devient indépendant de facto (NB : de la même façon, les Mongols d'Oulan Bator, prenant acte de la chute des Mandchous, se déclarent indépendants ; ils le sont encore).
Le treizième dalaï-lama, qui avait dû se réfugier en Inde peu avant, retrouve son palais du Potala. Quant au panchen-lama, il doit s'enfuir en Chine en 1924.
Tout change après la Seconde Guerre mondiale. Les Anglais quittent les Indes et cessent en conséquence de s'intéresser au Tibet. À Pékin s'installent les communistes sous la direction de Mao Zedong. Celui-ci, fort de son triomphe, veut rétablir la Chine dans sa grandeur d'antan. Il veut aussi contrôler les zones périphériques, dont le Xizang, dans la perspective d'un affrontement avec ses grands voisins, l'URSS et l'Union indienne.
Quand les Chinois réoccupent le Tibet, le quatorzième dalaï-lama, Tenzin Gyatso (16 ans), prend acte du nouvel état de fait. Ses représentants signent le 23 mai 1951 un accord qui légitime l'occupation et confie les affaires étrangères à Pékin en échange d'une autonomie régionale et du respect de l'identité religieuse.
Le dalai-lama lui-même abolit la corvée et le servage et entame une réforme agraire. Pékin, de son côté, lance un grand programme routier pour relier le Tibet à la Chine proprement dite. Mais les communistes ne tardent pas à violer leurs engagements et à s'en prendre aux monastères.
Un mouvement de révolte se développe dans les provinces orientales du Kham et de l'Amdo qui ont été intégrées à la Chine proprement dite. La tension monte et s'étend au Tibet central.
Dans la nuit du 17 au 18 mars 1959, le dalaï-lama, craignant à juste titre pour sa sécurité, quitte en cachette son palais d'été de Norbulingka et s'enfuit en Inde, où il est bientôt rejoint par une grande partie des élites tibétaines.
Le gouvernement indien, qui est alors en conflit larvé avec son voisin chinois, permet aux réfugiés, dont le nombre atteint rapidement la centaine de milliers, de s'établir à Dahamsala, au pied de l'Himalaya.
À peine le dalaï-lama est-il parti qu'une insurrection éclate à Lhassa. L'armée chinoise la réprime sans ménagement. Le Tibet sort ensuite des priorités du gouvernement maoïste, confronté à des problèmes d'une tout autre ampleur.
Dans les années 1980, la Chine accède à l'économie de marché et se libéralise. Le président Hu Yaobang accorde un peu d'autonomie au Tibet. Celui-ci, jusque-là interdit aux étrangers, s'ouvre au tourisme international. Les Tibétains ne s'en révoltent pas moins en 1987, 1988 et 1989.
Après la révolution avortée de 1989, le régime chinois se durcit. À Lhassa, une répression féroce est menée par le président du parti communiste du Tibet, Hu Jintao, qui deviendra ensuite président de la Chine populaire. Dans le même temps, les Chinois accélèrent la sinisation de la Région autonome en encourageant l'installation de Chinois de l'intérieur (Hans).
L'inauguration d'une voie ferrée en 2007 sort définitivement le « Toit du monde » de son isolement. Mais la révolte de mars 2008 montre que le Tibet n'est pas prêt à devenir une province chinoise comme les autres.
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JDif (01-10-2012 10:07:35)
Il y a quelques erreurs de détail dans cet article. 1°)- Avant le bouddhisme, le Tibet ne pratiquait pas le chamanisme, mais la religion bön qui est encore pratiquée dans quelques endroits au Kha... Lire la suite
Alain Martial (22-04-2008 23:07:23)
A lire l´information sur la Chine à propos de tous les soulèvements dans les provinces périphériques, l´existence de dissidents, j´en vient à me demander si l´on ne pourrait pas prévoir un Ã... Lire la suite
Rincevent (31-03-2008 20:59:22)
Attention, le Tibet était certes un pays (je n'ose dire État) féodal, mais ce n'est pas pour autant que la population avait particulièrement à s'en plaindre. Entendons nous bien, la masse de la p... Lire la suite