Le 23 janvier 1860 est signé le traité de libre-échange franco-britannique. C'est le début d'une courte période de désarmement douanier qui va séduire à peu près toute l'Europe.
Français et Anglais avaient déjà tenté d'abattre les barrières douanières dans une autre période heureuse. C'était le 26 septembre 1786, avec la signature à Londres du traité Eden-Rayneval. Mais cette première « mondialisation » des temps modernes n'avait pas résisté aux guerres de la Révolution et de l'Empire.
Après la chute de Napoléon Ier et le retour de la paix, les Anglais ont très vite confirmé leur prépondérance mondiale dans le commerce maritime et l'industrie (charbon, chemin de fer, textile). Ils se sont du coup reconverti au libre-échange, y voyant le moyen de consolider leur avance sur leurs concurrents continentaux. C'est ainsi qu'ils ont abrogé en 1846 les « corn laws ».
Ces lois protectionnistes avaient été votées après 1815 à l'initiative des grands propriétaires terriens afin de protéger la paysannerie contre les importations à bas prix de céréales américaines.
Le gouvernement anglais sacrifie tout à la fois les « corn laws » et son agriculture afin de permettre aux ouvriers de se nourrir à moindre prix avec des céréales d'importation. Cela a pour effet de relâcher la pression sur les salaires et par voie de conséquence de favoriser les exportations industrielles.
L'abrogation des « corn laws » relance les exportations britanniques mais celles-ci montrent assez rapidement des signes d'essouflement. Le traité franco-britannique de 1860, négocié par les économistes Michel Chevalier et Richard Cobden, va opportunément leur offrir un deuxième souffle.
Le premier des négociateurs est un polytechnicien titulaire de la chaire d'économie politique du Collège de France.
Le second est un économiste qui a fait fortune en ouvrant en 1828, dans le Lancashire, une manufacture de toiles peintes. Idéaliste, il anime la Ligue anglaise contre les « corn laws ». Il est convaincu que le libre-échange est la clé de la paix et de la prospérité universelles.
Les deux négociateurs bénéficient du soutien déterminé de William Gladstone, chancelier de l'Échiquier (ministre de l'Économie) dans le cabinet Palmerston et l'appui décisif de l'empereur des Français Napoléon III.
Conclu en cachette des industriels français qui vont s'y opposer en vain, ce traité traduit une libéralisation sans précédent des échanges commerciaux. C'est aussi le signe éclatant de l'entente cordiale entre Napoléon III et la reine Victoria et du rapprochement entre les deux ennemis héréditaires que sont la France et l'Angleterre.
Le traité franco-britannique est suivi d'autres traités entre la France et l'Angleterre et leurs autres voisins européens. Ils aboutissent à un désarmement douanier de l'Europe. Le monde occidental atteint un équilibre qu'il ne retrouvera plus de sitôt.
Le rapprochement franco-britannique se traduit la même année par une expédition conjointe en Chine. Le principal fait d'armes de cette équipée est la mise à sac et l'incendie du Palais d'Été.
Il s'ensuit la signature de la convention de Pékin avec le gouvernement impérial chinois. Par cette convention, les Chinois, contraints et forcés, ouvrent leur marché aux produits européens. Cet autre triomphe de l'idéologie du libre-échange se solde par la ruine de l'empire mandchou et l'appauvrissement à grande vitesse de ses habitants.
Vos réactions à cet article
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Bernard (21-01-2024 17:36:25)
Il s'agit bien ici d'un "libre"-échange et de la pire espèce. Les Occidentaux n'ont pas colonisé la Chine. Il lui ont imposé avec des canonnières des comptoirs dotés d'extra-territorialité pour... Lire la suite
Anonyme (23-01-2018 11:45:48)
Cette guerre fut une entreprise coloniale et certainement pas le résultat de l'"idéologie du libre- échange", comme le laisse entendre cet article. Le colonialisme consiste pour un gouvernement à ... Lire la suite