L'amiral Horace Nelson livre sa dernière bataille au large du cap Trafalgar, non loin de Cadix, le 21 octobre 1805. Il a 47 ans.
Un homme de toutes les audaces
L'Angleterre ayant formé une troisième coalition contre la France et Napoléon Ier, l'amiral Nelson, qui a déjà plusieurs victoires à son actif, reprend du service à la tête de l'escadre de la Méditerranée.
C'est que Napoléon a réuni 200 000 hommes à Boulogne et envisage de les faire débarquer en Angleterre avec pas moins de 3000 embarcations. Cela ne se peut qu'à la condition d'une couverture par la marine française, le temps de traverser la Manche.
L'amiral Pierre de Villeneuve, un officier sans grand talent auquel on a reproché d'avoir fui à Aboukir, a néanmoins été promu par le ministre de la Marine Decrès à la tête de la flotte de la Méditerranée.
Il a la consigne de semer les Anglais et de les entraîner vers les Antilles, où il fera sa jonction avec deux autres flottes alliées avant de revenir vers la Manche.
La première partie du plan se déroule comme prévu. Nelson poursuit l'escadre française jusqu'aux Antilles.
Mais les flottes alliées n'ont pas attendu Villeneuve et ce dernier, obéissant aux ordres, attend pendant une quarantaine de jours l'arrivée de Nelson. Lorsque celui-ci est annoncé, le Français tente de revenir au plus vite pour couvrir le débarquement en Angleterre.
Sur son chemin, il croise une escadre anglaise, la canonne mais renonce à la poursuivre. Enfin, traqué par Nelson, il se réfugie dans le port espagnol de Cadix où des navires espagnols, alliés de la France, viennent le rejoindre.
Pour complaire à Napoléon Ier qui l'attend à Boulogne et l'accable de reproches, Villeneuve se résout à sortir de la rade de Cadix. Fatale décision, au demeurant inutile, Napoléon ayant déjà quitté Boulogne et renoncé à envahir l'Angleterre. Aux 33 navires franco-espagnols font face 27 navires anglais.
De façon classique, l'amiral de Villeneuve dispose sa flotte en « ligne de file », face à la flotte ennemie. Qui plus est, il alterne navires espagnols et français : pas très pratique pour communiquer !
Nelson, qui le voit venir, transmet à l'aide de pavillons un message codé à chacun de ses 27 vaisseaux : « L'Angleterre attend de chacun qu'il fasse son devoir ! » Vers midi, bien qu'en infériorité numérique, il engage la bataille mais choisit, lui, de disposer ses navires en deux colonnes parallèles, perpendiculaires à la ligne ennemie.
Les deux colonnes percent le centre et la gauche ennemies avant que l'aile droite du contre-amiral Dumanoir puisse intervenir.
Surpris par l'audace de la manoeuvre et mal commandés, les Français et leurs alliés perdent en une après-midi la moitié de leurs navires. Seuls une dizaine de navires franco-espagnols rescapés arriveront à se réfugier dans la rade de Cadix. Les Anglais ne perdent aucun navire.
Ils s'offrent au surplus la capture de l'amiral Villeneuve. Libéré quelques mois plus tard, celui-ci se suicidera dans une chambre d'hôtel, à Rennes, le 22 avril 1806, pour échapper à un procès infamant et quelque peu injuste, considérant les ordres contradictoires donnés par l'Empereur qui l'ont conduit au désastre.
Cette dernière grande bataille de la marine à voile fait environ 5 000 morts du côté des vaincus dont l'amiral espagnol Gravina, 450 seulement du côté des vainqueurs. Mais parmi eux Nelson lui-même.
L'amiral anglais ne peut s'empêcher d'arborer une myriade de décorations, se désignant ainsi à la vue de l'ennemi.
Il est blessé sur le pont de son navire, le bien-nommé Victory, par une balle tirée de la hune du Redoutable. Le héros meurt en apprenant son triomphe. Son corps est ramené à Londres... dans un tonneau de rhum, seul moyen d'éviter une décomposition prématurée.
Il est inhumé dans la cathédrale Saint-Paul, à Londres, au terme de funérailles nationales (la veuve de l'amiral ne permet pas à Lady Hamilton d'y assister). La plus belle place de la capitale lui est depuis lors dédiée, avec une colonne de pierre qui supporte sa statue... et la compagnie des pigeons.
L'invasion de l'Angleterre n'aura pas lieu. La défaite de Trafalgar enlève à Napoléon Ier tout espoir de débarquer en Angleterre et de soumettre la « perfide Albion ».
Avant même la bataille navale, l'empereur a pris conscience des faiblesses de l'amiral de Villeneuve et compris qu'il ne pourrait pas compter sur l'appui de son escadre. Dès le 3 septembre 1805, il a levé le camp de Boulogne, entraînant la Grande Armée à marche forcée vers Vienne. Ce sont alors les batailles d'Ulm, Austerlitz et quelques autres victoires tout aussi glorieuses.
Mais quelque prestige que l'empereur retire de ses succès terrestres, il est désormais prisonnier du Continent et n'a plus les moyens de vaincre l'Angleterre. Sur le long terme, privée d'une marine conséquente, la France ne sera plus en mesure de concurrencer l'Angleterre dans les entreprises coloniales.
De nos jours encore, dans la « Royale » (la prestigieuse flotte de guerre léguée à la République française par l'Ancien Régime), officiers et marins portent une cravate noire nouée sous le col dans l'échancrure de la vareuse en signe de deuil de Trafalgar.
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