Le 19 août 1953, le Premier ministre du chah d'Iran, Mohammad Mossadegh (73 ans), est démis de ses fonctions sous la pression des Britanniques. Ces derniers l'accusent d'être à la solde des Soviétiques.
Ils lui reprochent surtout d'avoir nationalisé les gisements pétroliers d'Iran et exproprié la puissante compagnie pétrolière Anglo-Iranian OilCompany. Celle-ci avait été fondée en 1908 par William d'Arcy, suite à l'obtention d'une concession pétrolière en Perse en 1901. Il faudra attendre vingt ans avant qu'un autre pays ose nationaliser son pétrole. Ce sera l'Algérie...
L'enjeu pétrolier
Nationaliste farouche, Mossadegh arrive à la tête du gouvernement en avril 1951 avec la ferme intention de chasser les compagnies étrangères.
Il rejette une offre de l'Anglo-Iranian Oil Company de partager par moitié les profits tirés de l'exploitation du pétrole et, dès le 1er mai 1951, fait voter la nationalisation des puits iraniens et l'expropriation de l'Anglo-Iranian.
Il expulse dans la foulée les techniciens britanniques. Mais son pays manque cruellement de cadres qui pourraient les remplacer et n'a pas de pétroliers pour transporter le pétrole. Qui plus est, le Royaume-Uni menace en représailles de saisir les «bateaux pirates» transportant du «pétrole rouge».
Pour ne rien arranger, des experts français révèlent alors les colossales malversations de l'Anglo-Iranian : corruption massive, dissimulation de recettes....
Mossadegh rompt en octobre 1952 les relations diplomatiques avec Londres. La réaction internationale est immédiate : les marchés se ferment au pétrole iranien, occasionnant une grave crise dans le pays et un conflit aigu entre le Premier ministre et le souverain, Mohammed Réza chah Pahlévi (33 ans).
Un an de luttes à couteaux tirés
Mossadegh doit démissionner du poste de Premier ministre sous la menace d'un coup d'État militaire mais le peuple s'insurge en sa faveur et il reprend ses fonctions au bout de quatre jours d'émeutes sanglantes ! La confiance n'est pas pour autant restaurée entre le souverain et son Premier ministre. Un projet d'assassinat de celui-ci, conduit par le chah, des militaires et des ministres, échoue en mars 1953.
En août 1953, suite à un référendum qui donne quitus au gouvernement pour poursuivre les réformes, Mossadegh dissout le Majlis (le Parlement iranien) et annonce de nouvelles élections.
Mais le 16 août 1953, Mohammed Réza chah envoie ses gardes au domicile de son Premier ministre pour l'arrêter. Surprise ! les gardes de Mossadegh désarment ceux du roi... et ce dernier doit fuir son pays pour l'Italie dans la précipitation. Dans les deux jours qui suivent, les habitants de Téhéran manifestent bruyamment leur joie et déboulonnent les statues du chah et de son père, Réza chah Pahlévi (on écrit aussi Pahlavi), le fondateur de la dynastie.
Le chah déchu peut heureusement faire confiance aux services secrets occidentaux. La CIA américaine, dirigée par Allan Dulles, et le MI6 britannique apportent leur soutien au général Fazlollah Zahedi qui organise le 19 août un coup d'État dans les règles.
La résidence de Mossadegh est bombardée et le Premier ministre ne doit son salut qu'à une fuite par une échelle.
Le chah peut bientôt revenir et faire juger Mossadegh. Celui-ci est condamné à mort mais n'effectuera au final que trois ans de prison.
L'Anglo-Iranian Oil Company retrouve ses biens, en changeant son nom pour celui de British Petroleum (BP), et tout rentre dans l'ordre ! Tout ou presque. Les compagnies américaines, autour de la puissante Standard Oil, profite de l'affaire pour faire leur entrée sur le marché iranien.
L'éviction de Mossadegh consacre l'échec de la première tentative d'un pays du tiers monde d'acquérir la maîtrise de ses richesses naturelles. L'événement a nourri de profonds ressentiments chez les Iraniens jusqu'à la révolution islamiste de 1978-1979.
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Voir les 5 commentaires sur cet article
piesti (13-08-2023 11:21:26)
"... le premier Perse diplômé en droit." Je pense que "Persan" conviendrait mieux. Merci pour ce bon article.Herodote.net répond :Vous avez raison. Cyrus était perse mais ses lointains descenda... Lire la suite
marc-aurel (19-08-2016 11:10:13)
Parfaitement d'accord avec le commentaire de Gilles...
Gilles (24-01-2016 23:23:25)
A noter comme d'habitude l'excellence de la perfide Albion ! Toujours en action, toujours uniquement concernée que par ses intérêts !!
GM