16 juillet 1949

Communistes et catholiques en guerre contre les comics

Le Téméraire, revue destinée à la jeunesse sous l'Occupation allemandeEn France, sous l’Occupation, les journaux pour la jeunesse étaient censurés ou interdits, sauf à se faire discrets (Cœurs Vaillants, Le journal de Mickey,  Benjamin),  ou à s’engager pour le Maréchal Pétain (Fanfan la Tulipe) ou aux côtés de l’occupant (le Téméraire). 

À la Libération, on vit fleurir de nombreuses publications pour la jeunesse, anciennes et nouvelles, et surtout une invasion de comics américains qui ne manquaient pas de magnifier les exploits des héros américains face aux méchants communistes d’URSS ou encore de Corée.

En réaction à cette invasion d’un nouveau type est promulguée  la loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeuness. Cette loi est activement soutenue par les parlementaires communistes et démocrates-chrétiens (MRP), pour une fois solidaires.

Elle postule que les publications pour la jeunesse « ne doivent comporter aucune illustration, aucun récit, aucune chronique, aucune rubrique, aucune insertion présentant sous un jour favorable le banditisme, le mensonge, le vol, la paresse, la lâcheté ou tous actes qualifiés crimes ou délits, ou de nature à démoraliser l’enfance et la jeunesse ».

Il s'ensuit une vigoureuse campagne de dénigrement alimentée par le Parti communiste  contre Tarzan. Cette publication avait été créée en 1946 par les éditions Del Duca pour succéder à Hurrah, très lue (300 000 exemplaires). Elle comportait des dessins  de Foster, Hogarth et bien d’autres, ainsi que des illustrations de René Giffey pour ses adaptations des Misérables et de Quatre-Vingt Treize de Victor Hugo et  sa série Buffalo Bill. Suite à la campagne du PC, elle doit se saborder.

Les pionniers de l'espérance (Robert Lescureux), 1945Indispensable selon les uns, liberticide selon d’autres, la loi de 1949 est complétée en 1954 par une loi contre les préjugés ethniques et  en 1958 par une ordonnance sur la protection des mineurs.

En attendant, les organisations de jeunesse communistes et catholiques en profitent pour promouvoir leurs magazines et leurs héros. Les communistes lancent le magazine Vaillant dès 1945, en s'inspirant du Téméraire de l'Occupation. Le magazine présente une bande dessinée de science fiction, Les Pionniers de l'Espérance, par Robert Lecureux, héritière d'un genre inauguré aux États-Unis avec Flash Gordon

En février 1969, le lancement de Pif Gadget par les éditions Vaillant va connaître un succès fulgurant avec, certaines semaines, un tirage d'un million d'exemplaires. Le magazine va faire de l'ombre à son concurrent catholique Coeurs vaillants Âmes vaillantes, apparu en 1929. Entre-temps est apparu en 1959 un autre magazine à grand succès, Pilote.

Stimulés par la loi de 1949, qui les a protégés de la concurrence américaine, ces albums et journaux destinés à la jeunesse ont permis à de nombreux auteurs français de bande dessinée de faire leur chemin et de tracer des voies originales jusqu'au XXIe siècle.

Jean-Paul Gourévitch
Publié ou mis à jour le : 2019-05-22 23:49:19

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