Le 14 janvier 1930, André Maginot fait voter une loi en vue de construire une ligne fortifiée sur les frontières orientales de la France.
Très décriée après l'invasion de 1940, cette initiative n'en est pas moins approuvée dans l'instant par la grande majorité de la classe politique et du corps des officiers, y compris le chef de bataillon Charles de Gaulle. Il est vrai qu'elle a parfaitement joué son rôle défensif lors de l'offensive allemande de 1940, son seul vrai défaut étant de n'avoir pas été prolongée jusqu'à la mer.
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La France engage en 1930 la construction de la ligne Maginot. Trois ans plus tard, Hitler arrive au pouvoir. La Sarre, consultée par plébiscite en 1935, rejoint le Reich hitlérien ; peu après, le Führer rétablit le service militaire obligatoire en violation du traité de Versailles...
Haut fonctionnaire, André Maginot (53 ans) s'est engagé comme simple soldat pendant la Grande Guerre. Il a fini celle-ci avec le grade de sergent et la médaille militaire.
C'est l'un des très rares parlementaires à présenter de tels états de service, de sorte que ses collègues n'osent rien lui refuser quand la patrie est en débat... En 1920, il organise le transfert du Soldat Inconnu sous la voûte de l'Arc de Triomphe.
En 1930, ministre de la Guerre dans le gouvernement Tardieu, il reprend la suggestion émise par Paul Painlevé en 1925 de fortifier les frontières orientales du pays. Il plaide pour une ligne de défense flexible, capable de suppléer à la diminution des effectifs militaires prévue à partir de 1935 en raison du déficit des naissances. C'est ainsi qu'il obtient des parlementaires un crédit de 3,3 milliards de francs sur quatre ans.
Mort de la typhoïde deux ans plus tard, André Maginot ne verra pas l'achèvement du chantier et c'est seulement en 1936 qu'un journaliste de L'Écho de Paris, Raymond Cartier, donnera son nom à l'ensemble de fortifications qu'il aura contribué à créer.
Le chantier, le plus grand de son temps, va employer jusqu'à 20.000 ouvriers.
Ce réseau de fortifications à demi-enterrées comporte une cinquantaine de gros ouvrages équipés d'artillerie et quelques centaines de casemates et d'observatoires isolés. Il inaugure une conception purement défensive des stratèges français, à l'opposé de la conception offensive de leurs homologues d'Outre-Rhin. Il témoigne aussi d'une perte de confiance de la classe politique dans l'avenir des relations franco-allemandes... malgré la publication au même moment (1930) d'un mémorandum en faveur d'une union fédérale européenne par Aristide Briand.
Les fortifications débutent sur les bords de la Méditerranée, au-dessus de Menton, et s'égrènent jusqu'à la frontière belge et au-delà, y compris le long du Rhin. Mais dans le massif des Ardennes, jugé infranchissable par le haut commandement français, les autorités se contentent de fortifications légères.
Les Belges refusent par ailleurs que les Français prolongent la ligne Maginot le long de leur frontière car ils craignent d'être sacrifiés en cas de nouveau conflit entre la France et l'Allemagne. C'est ainsi que le long de la frontière avec la Belgique, la ligne Maginot se réduit à quelques ouvrages fortifiés de modeste importance.
Les gros ouvrages de la ligne Maginot couvrent en définitive 140 km sur la frontière du nord-est, longue de 760 km de la mer du Nord à la Suisse.
De l'autre côté de la frontière, le gouvernement allemand réplique dès 1937 avec une autre série de fortifications : la ligne Siegfried. Beaucoup plus légère que la ligne Maginot, elle a surtout vocation à tromper les Français sur la capacité offensive de la Wehrmacht.
Quand la guerre est déclarée à l'Allemagne de Hitler, moins de dix ans après la construction de la ligne Maginot, les fortifications remplissent dans l'ensemble leur office. De septembre 1939 à juin 1940, le fort de Schoenenbourg, au nord de l'Alsace, tire à lui seul près de 20 000 obus en 10 mois. Invaincu, son « équipage » ne se rend que le 1er juillet 1940, six jours après l'armistice, sur ordre express du haut commandement français.
Dans le secteur frontalier de Maubeuge, les hommes du 87e RIF résistent au prix de lourds sacrifices à une percée des blindés de la 5° Panzer du général Schmidt. Dans le secteur frontalier de l'Escaut, à Bouchain, des hommes du 45e RI (régiment d'infanterie), sous le commandement du colonel Desroches, empêchent le franchissement du fleuve du 22 au 26 mai 1940. Ce fait d'armes provoque le 2 juin 1940 la venue de Hitler en personne. Courroucé, le Führer se fait expliquer du haut de la Tour de l'Ostrevant par le général commandant le 8e Korps pourquoi ses unités ont été tenues en échec par un simple régiment d'infanterie.
Le 54e RIF et le 43e RI paient également un lourd tribut en résistant pendant six jours et six nuits aux assauts ennemis, rendant possible l'évacuation des troupes anglo-françaises à Dunkerque.
Au vu de ces exploits, on peut s'interroger sur les résultats de l'offensive allemande si la frontière belge et les Ardennes avaient été plus solidement fortifiées. La ligne Maginot a péché moins par ses insuffisances techniques que par le fait qu'elle ait servi d'alibi aux pacifistes de tout poil qui ont successivement abandonné l'Autriche et la Tchécoslovaquie au prétexte que la France n'avait de toute façon rien à craindre.
Vos réactions à cet article
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Bruno (11-01-2010 11:06:17)
Bravo pour votre article qui explique bien le problème de la protection de la frontière Franco-Belge. Je recommande le livre de Roger Bruce parut en 1974 "Fais sauter la Ligne Maginot" Cette fortifi... Lire la suite
Jacques Boutté (11-01-2010 07:08:59)
J'ai été choqué par les affirmations de Alain Minc dans son livre Une Histoire de France, qui attribue à Pétain le choix de ce concept et son refus par de Gaulle. Dans son survol il ne peut trace... Lire la suite