Louis XIII (1601 - 1643)

Le précurseur de l'absolutisme

La mémoire de Louis XIII est souvent éclipsée par celle de son brillant ministre Richelieu. Tout semble opposer les deux hommes ; le premier est conscient de ses faiblesses comme le second de son intelligence. Mais l'un et l'autre sont animés par une piété sincère et, surtout, placent l'intérêt supérieur de l'État au-dessus de leur personne.

C'est ainsi que Louis XIII, à une époque charnière, va enterrer les restes de féodalité en France et poser les jalons de l'absolutisme de son fils et successeur Louis XIV.

Béatrice Roman-Amat

« La Naissance de Louis XIII », Jean-Joseph Taillasson, 1783, musée national du château de Pau.

Un assassinat l'assoit sur le trône...

L'héritier du trône est un enfant au naturel joyeux, très proche de son père, Henri IV. Lorsque celui-ci est assassiné par Ravaillac, le 14 mai 1610,  Louis n'a que 9 ans. Né à l'orée du « Grand Siècle », il devient brutalement le nouveau roi de France, mais la disparition de son père le laisse effondré et d'autant plus malheureux que sa mère, Marie de Médicis, ne cache pas sa préférence pour son frère cadet, Gaston. 

Inquiète des prétentions que pourraient faire valoir les princes de sang du royaume, Marie de Médicis s'empresse de se faire confier la régence.

Le sage Sully, principal ministre du défunt « Vert-Galant », doit résilier ses charges le 26 janvier 1611. Les autres ministres de l'ancien souverain, les « barbons », sont conduits à en faire autant. La régente tombe sous l'influence de sa soeur de lait, la Galigaï, qui se prévaut de ses talents de magicienne. Elle confie le gouvernement à son mari, un Italien du nom de Concino Concini, qui se rend très vite impopulaire auprès de la noblesse comme du peuple !

Les grands du royaume se rebiffent et menacent de prendre les armes. Marie de Médicis les calme en réunissant les états généraux à Paris le 27 octobre 1614. Ceux-ci se noient dans des querelles sans fin et le gouvernement les renvoie sur de vagues promesses de réformes. Ils ne seront plus réunis avant 1789. Le 28 novembre 1615, Marie de Médicis organise le mariage de Louis XIII avec la princesses espagnole Anne d'Autriche.

... Un autre lui donne le pouvoir

Le 24 avril 1617, de plus en plus impatient de prendre les rênes du pouvoir, Louis XIII devenu adolescent accepte tacitement de faire assassiner Concini. Il le remplace par Luynes, son Grand Fauconnier, et exile sa mère au château de Blois. C'est le début d'une brouille longue et politiquement lourde de conséquences entre mère et fils. Les premières années du règne personnel de Louis XIII sont secouées par des révoltes des Grands, soutenus par la reine mère, qui n'hésitent pas à lever des troupes et des impôts pour défier l'autorité royale.

Tout change le 29 avril 1624 avec l'entrée du cardinal Armand du Plessis de Richelieu (39 ans) au Conseil du roi. Initialement « créature » de Marie de Médicis, il va gagner progressivement la confiance du roi, auquel tout pourtant l'oppose question tempérament.

Le prélat entreprend d'abord de discipliner la noblesse. Il met un terme à l'hécatombe que les duels provoquent chez les jeunes nobles : il fait ainsi décapiter le comte de Montmorency-Boutteville, coupable de s'être battu malgré ses ordres ! Il sévit aussi contre les complots de la haute noblesse, qui bénéficient du soutien à peine voilé de Gaston d'Orléans, frère cadet de Louis XIII, qui, jusqu'à la naissance d'un héritier (le futur Louis XIV), en 1638, se comporte en futur roi.

Les régions majoritairement protestantes se soulèvent, sous l'impulsion des ducs de Rohan et de Soubise, poussant le roi à intervenir militairement, non pour les convertir au catholicisme (il ne remit jamais en cause l'Édit de Nantes) mais pour assurer l'unité du royaume.

Chef de guerre à l'aise parmi ses troupes, Louis XIII obtient en 1628 la reddition de La Rochelle, après un siège long et cruel conduit avec détermination par Richelieu. Le 1er novembre 1628, le roi entre dans une ville soumise mais ruinée et dépeuplée par la famine. Fort de sa victoire, il accorde aux protestants l'édit d'Alès qui confirme celui de Nantes mais réduit leurs privilèges militaires.

Un duo improbable

En vue de consolider les frontières du pays, Richelieu projette de s'allier aux Suédois et aux protestants allemands en guerre contre les Habsbourg catholiques. Marie de Médicis s'en irrite. Elle tente une dernière fois de reprendre la main. C'est la « journée des dupes » du 11 novembre 1630, où elle presse Louis XIII de le renvoyer mais où le roi décide de lui renouveler sa confiance.

Contre l'avis du parti dévot, partisan du soutien aux pays catholiques, Louis XIII et Richelieu peuvent dès lors soutenir les provinces Unies et la Suède protestantes. Le 19 mai 1635, ils engagent directement la France dans la Guerre de Trente Ans qui déstabilise le Saint Empire en déclarant la guerre à l'Espagne elle-même. En Italie, ils reprennent le contrôle de la vallée de la Vateline, passage stratégique pour l'Espagne, afin d'affaiblir les Habsbourg.

Sur la scène intérieure, jusqu'à sa mort, en 1642, le Premier Ministre n'a de cesse d'affermir l'autorité royale. Il développe la marine et le commerce et crée un corps d'intendants pour faire appliquer les décisions du roi dans les provinces. La rationalisation du système administratif s'accompagne d'une augmentation de la pression fiscale sur le tiers état, nécessaire pour financer les guerres incessantes. Il sanctionne aussi sans pitié la conspiration de Cinq-Mars, ex-favori du roi.

Le règne de Louis XIII et le gouvernement de Richelieu se signalent aussi par l'émergence de la culture classique qui s'épanouira sous le règne suivant. Si triste que soit le roi, on jouit de la vie à grandes rasades dans les hôtels particuliers du Marais. L'époque est au libertinage et les représentants de l'aristocratie se plaisent en la compagnie de Marion Delorme et Ninon de Lenclos. Dans la peinture, Simon Vouet amorce la transition entre le baroque et l'art classique (voir ci-dessus le portrait allégorique de Louis XIII). Pierre Corneille triomphe au théâtre avec Le Cid (1637). Deux ans plus tôt, Richelieu a créé l'Académie française...

Roi puissant et malheureux

Les Français, cependant, dans leur immense majorité, ne tirent aucun bénéfice des succès de la monarchie. Le règne de Louis XIII est marqué par des révoltes anti-fiscales, notamment celles des Croquants et des Nu-Pieds.

Ému par la grande misère du peuple, saint Vincent de Paul fonde en 1634 les Filles de la Charité, un ordre au service des malades et des enfants trouvés. Il participe au renouveau de la foi catholique avec saint François de Sales et mère Angélique de Port-Royal.

Atteint d'une maladie intestinale chronique (sans doute la maladie de Crohn), Louis XIII s'éteint à l'âge de 42 ans, le 14 mai 1643... soit le jour anniversaire de la mort de son père, une particularité qu'il partage avec Winston Churchill et dont on peut penser qu'elle n'est pas entièrement le fruit du hasard. L'un comme l'autre ont pu « choisir » ce jour par un hommage subconscient à l'homme de leur vie.

Il laisse derrière lui son fils aîné Louis, né en 1638 d'un mariage malheureux et longtemps stérile. Comme 30 ans plus tôt, une mort prématurée ouvre une phase de régence maternelle chaotique. « Que l'on ait pu être roi et malheureux, Louis XIII en est assurément le meilleur exemple », écrit Jean-Christian Petitfils dans la biographie qu'il lui consacre.

L'historien souligne cependant que ce roi bègue à la santé fragile, mal aimé de sa mère, qui lui préférait son cadet Gaston d'Orléans, et de sa femme Anne d'Autriche avec laquelle il eut le plus grand mal à concevoir un héritier, fut un grand roi qui sut prendre des décisions difficiles au nom de l'intérêt supérieur du royaume.


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Les souverains français
Publié ou mis à jour le : 2021-08-13 17:27:51
Lison (17-05-2023 19:24:05)

Est-ce vrai que Louis XIII ordonna aux Suisses de massacrer les chats de Richelieu à la mort de ce dernier? Herodote.net répond :La chose paraîtrait curieuse car Richelieu avait couché ses chat... Lire la suite

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