François Villon (1431 - 1463)

Poète et canaille

Portrait présumé de François Villon dans l'édition originale du Testament, 1489, Paris, BnF, Gallica.François de Montcorbier, plus connu sous le nom de François Villon, a vécu sous le règne de Charles VII, à la fin de la guerre de Cent Ans. En dépit de sa courte vie, il est très vite entré dans la postérité comme le premier grand poète de la langue française.

Il est né en 1431 à Paris, dans une « loge » de l’Arsenal, au pied de la Bastille, lieu de vie de l’extrême pauvreté du bas peuple. Son père meurt l’année suivante et l’enfant est élevé par sa mère qui ne sait ni lire ni écrire. Il a sept ans quand elle le conduit chez maître Guillaume de Villon, chanoine de l’église Saint-Benoît-le-Bétourné, rue Saint-Jacques.

Le prêtre le reçoit, le loge et lui donne un cours de français chaque matin. François, passionné par les langues, apprend également le grec et le latin par ses propres moyens. Il a douze ans quand Guillaume l’inscrit à la Faculté des Arts, rue du Fouarre. Il y apprend la grammaire, les lettres et la philosophie (trivium) durant six ans puis, quatre ans plus tard, en 1452, il obtient sa licence et sa maîtrise ès-Arts qui lui donnent le droit d’enseigner. Le jour où il reçoit ses diplômes, il demande à Guillaume de Villon, qui accepte, de porter son nom. François de Montcorbier deviendra pour toujours François Villon.

Muni de ses diplômes, il se présente au rectorat pour s’inscrire comme élève en théologie à la Sorbonne. Mais il est refusé sans explication. Fou de rage, il abandonne les études et se laisse embrigader par ses amis qui vont l’entraîner dans leur débauche. Il y prendra goût quelque temps puis y renoncera après plusieurs mésaventures avec les femmes de petite vertu.

Le soir du 5 juin 1455, alors qu’il bavarde dans un cloître, il voit surgir un prêtre qui court vers lui sans raison, un poignard à la main. Chermoise, l’agresseur, lui entaille le visage. François riposte en sortant de sous son manteau un petit poignard sur lequel Chermoise va se projeter. Il sera conduit à l’Hôtel-Dieu ou il mourra deux jours plus tard, après avoir dicté une demande de grâce pour François, se désignant comme seul responsable du meurtre.

Le soir de la Noël 1456, alors qu’il dîne avec ses comparses, il leur apprend que le roi fait porter, comme chaque année, au Collège de Navarre (l’école de la noblesse française), une bourse de cinq cents écus d’or. François organise le vol et, le lendemain, partage le pactole avec ses comparses. Il quitte là-dessus Paris pour se réfugier à Blois, chez le duc Charles d’Orléans, cousin du roi et poète à ses heures.

En 1461, François Villon passe par Meung-sur-Loire où l’évêque d’Orléans  Thibault d’Aussigny le met au cachot pour des motifs inconnus. Par chance, Louis XI passe par la ville et François lui fait porter un message. Il est aussitôt libéré et l’évêque envoyé dans une vallée perdue du centre de la France !

François poursuit ses déambulations. Il se rend à Moulins, chez le duc de Bourbon mais il se brouille avec le prince et le quitte. Il marche alors vers Paris, reste caché dans les environs de la ville où il écrit Le Testament, son œuvre maîtresse, puis Le débat du cœur et du corps. En novembre 1462, il entre dans la capitale où il est arrêté et détenu au Châtelet pour vol. Il n’y restera que cinq jours sur la promesse de restituer 120 écus d’or, son « gain » du vol au collège de Navarre. Il apprend que ses trois comparses pour le vol ont été pendus.

Après une nouvelle rixe rue de La Parcheminerie, avec les assistants de Maître Ferrebourg, notaire du Roi, il est condamné par sentence du Châtelet a être pendu et étranglé… Tout en interjetant appel, il s'attend à rejoindre le sinistre gibet de Montfaucon (à Paris, 53-57, rue de la Grange aux Belles, près de l'actuelle place du colonel Fabien).

C'est dans cette attente que le poète écrit la célèbre Ballade des pendus :
« Frères humains, qui après nous vivez,
N'ayez les coeurs contre nous endurcis,
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous mercis.
Vous nous voyez ci attachés, cinq, six :
Quant à la chair, que trop avons nourrie,
Elle est piéça dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De notre mal personne ne s'en rie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !... »

Faut-il s'en étonner ? On est à l'époque des danses macabres (ci-dessous celle de la Chaise-Dieu), un motif pictural par lequel l'Église appelle chacun au repentir.

Fort heureusement, un arrêt du Parlement annule le jugement le 5 janvier 1463. Mais en regard de ses antécédents, le poète est banni pour dix ans de Paris, ville, prévôté et vicomté. Il quittera la ville trois jours plus tard.  On ne le reverra plus. A-t-il été tué par un loup, nombreux, la nuit, en cette saison ? Est-il mort d’une maladie qui l’obsédait ? A-t-il réussi à rejoindre le Prieuré de Saint-Maixent, dans le Poitou ? Nous n’en savons rien...  

Le poète a été redécouvert par les romantiques au XIXe siècle, à travers son plus célèbre poème, Le testament. On y lit sa nostalgie et ses regrets :
« Bien sçay, se j'eusse estudié
Ou temps de ma jeunesse folle
Et a bonnes meurs dedié,
J'eusse maison et couche molle.
Mais quoy ! je fuyoië l'escolle
Comme fait le mauvaiz enffant
En escripvant cette parolle
A peu que le cueur ne me fent ! »

François Villon a depuis lors pris place dans la littérature française comme le premier grand poète français avec Charles d'Orléans.

Bibliographie

François Villon, naissance d’une vocation, Roger Jouan, Riveneuve éditions, Paris, Mai 2019,
Villon, Paris sans fin, J. Dérens, J. Dufournet et M. Freeman, avec la collaboration de Roger Jouan, Paris bibliothèques éditions/Le Passage Paris-New York, Paris 2005,
Villon, poète de Paris, Jean Dérens, avec la collaboration de Roger Jouan, Paris bibliothèque éditions, Paris, 2003.

NB : les amateurs de sensations fortes apprécieront aussi les mémoires apocryphes du poète par le romancier Jean Teulé : Je, François Villon (Julliard, 2006).

Publié ou mis à jour le : 2020-08-11 14:34:17
Paul GABION (02-08-2020 17:43:04)

Article très intéressant.
Une petite erreur, cependant, à propos de l’affaire Sermoise :
Si François tue Sermoise le 5 juin 1455, il ne peut (après avoir quitté Paris) y rentrer en janvier 1455, mais plutôt en aout 1456.

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