Abbé Grégoire (1750 - 1831)

Chrétien et révolutionnaire

Henri Grégoire est le fils d'un paysan lorrain. Ayant montré des dispositions pour les études, il est éduqué au collège jésuite de Nancy, ordonné prêtre en 1776 et nommé curé à Embermesnil, en Lorraine.

Déjà quadragénaire quand éclate la Révolution, il va révéler une générosité sans égale au service de causes inédites, de l'instruction pour tous à l'émancipation des juifs en passant par l'abolition de l'esclavage. 

Pierre-Joseph-Célestin François, Portrait de l’Abbé Grégoire, 1800, Nancy, Palais des ducs de Lorraine

Un homme de convictions

Très ouvert aux idées généreuses des « Lumières », l'abbé publie en 1788 un Essai sur la régénération physique, morale et politique des juifs qui est distingué par l'Académie de Metz.

La même année, le 19 février 1788, avec quelques nobles libéraux comme les marquis de Mirabeau, de Lafayette et de Condorcet, il fonde la « Société des Amis des Noirs ». Elle est calquée sur une société fondée quelques mois plus tôt par des Quakers anglais.

Député du clergé du baillage de Nancy aux états généraux en 1789, l'abbé est l'un des premiers à voter la réunion du bas-clergé au tiers-état. Lors de la séance du 14 juillet 1789, il préside par intérim de l'Assemblée nationale quand les députés décident de siéger en permanence.

Il fait voter la Constitution civile du clergé (1790) puis l'égalité des droits civils pour les juifs (1791). Élu évêque assermenté de Blois , il siège à la Convention, dans les rangs de la Montagne (la gauche révolutionnaire).

Son action réformatrice ne faiblit pas. C'est ainsi qu'il fait voter l'abolition de l'esclavage (1794) et se penche sur les patois et dialectes en vue d'établir la suprématie définitive du français, défini comme langue de la liberté et de la démocratie. Grégoire contribue également à la fondation de l'Institut et du Conservatoire des Arts et Métiers.

On lui doit l'invention du mot vandalisme, en référence à des Barbares qui saccagèrent Rome en 455. Il emploie ce mot dans un rapport adressé à la Convention le 11 janvier 1794 où il dénonce les destructions intempestives de monuments et d'oeuvres d'art par les armées républicaines. Avec lui émerge donc le concept de protection du patrimoine.

Absent lors du procès de Louis XVI en 1793, Grégoire se prononce pour sa condamnation tout en réclamant l'abolition de la peine capitale. Après la chute de Robespierre, il devient membre du Conseil des Cinq-Cents (1795-1798) puis du Corps législatif (1800), enfin sénateur (1802).

À la signature du Concordat, il démissionne de son évêché de Bourges. Il se range dans l'opposition libérale sous l'Empire et sous la Restauration. Sa plume ne chôme pas et il publie sans trêve de nombreux traités, en particulier contre le racisme et l'image négative accolée aux Noirs.

Ainsi publie-t-il en 1808 un traité : De la littérature des nègres, dans lequel il soutient que les premiers pharaons étaient Nubiens et qu'en conséquence, les Noirs pouvaient être regardés comme à l'origine de la civilisation égyptienne et pourquoi pas ? de toutes les civilisations occidentales.

À sa mort, il est interdit de sépulture chrétienne en raison de ses engagements passés. Ses funérailles n'en sont pas moins l'occasion d'une grande manifestation populaire, jusqu'à réunir vingt mille personnes.

L'indomptable

Dans son ouvrage De la Révolution, Edgar Quinet dresse le portrait de « l'homme en noir » :
« Nul ne représentait mieux cette Eglise éphémère que Grégoire. Je l'ai vu trente ans après, toujours dans son même habit violet et sa physionomie m'est bien présente une voix douce, un regard humble, la taille haute et je ne sais quoi de tenace et d'indomptable qui avait résisté à la vieillesse; de l'intrépidité dans le caractère, de la timidité dans l'esprit, toujours foudroyé et toujours serein. Le temps n'avait pu l'arracher au catholicisme qui le reniait vivant et devait le proscrire mort. Il continuait d'embrasser les portes sacrées qui se tenaient inexorablement fermées devant lui (De la Révolution, 1865). »

Fabienne Manière
Publié ou mis à jour le : 2022-06-21 11:32:27
Jean MUNIER (05-02-2018 07:37:27)

La différence entre langue et patois n'est que politique, la langue a bénéficié de l'autorité d'un Etat ou d'une institution qui a codifié celle ci.(cf. la traduction de la Bible par LUTHER). H GREGOIRE voulait surtout que le peuple n'ait plus besoin des "services" du hobereau local pour un recours ou une doléance en langue française.

Erik (04-12-2016 15:50:16)

Comme quoi la stupidité de l'extrême gauche étaient déjà présente dans le chef des Montagnards.

Halte là, halte là, halte lààà...

pch (13-03-2015 11:38:27)

Existe t-il une biographie de l'abbé Grégoire ?
Merci

Primo Haouzi (19-03-2014 13:44:00)

"C'est ainsi qu'il fait voter l'abolition de l'esclavage (1794) et se penche sur les patois et dialectes en vue d'établir la suprématie définitive du français." Comment pouvez-vous as... Lire la suite

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