1916 à 2005

Du «Home rule» à l'indépendance

A la veille de la Première Guerre mondiale, la majorité des Irlandais de souche celte aspirent à l'autonomie (le «Home rule»), voire l'indépendance. Faute d'avoir été résolue en temps et en heure, la Question d'Irlande va déboucher sur un douloureux conflit.

«Home rule», bref retour

Différents groupes nationalistes se retrouvent autour d'un certain Arthur Griffith pour fonder en novembre 1905 le mouvement Sinn Fein (Nous Seuls en gaélique) qui prône l'indépendance. Mais il n'y a pas là de quoi ébranler l'Empire britannique...

Au Parlement de Westminster s'opposent les députés irlandais partisans de l'autonomie de l'île et les unionistes. Ces derniers, principalement protestants, souhaitent maintenir l'Acte d'Union de 1801, au moins dans leur bastion de l'Ulster, au nord de l'île. Arrive la Grande Guerre (1914-1918). Les querelles sont mises en sourdine.

Les «Pâques sanglantes» de 1916

Dès le début du conflit, beaucoup d'Irlandais se portent volontaires pour combattre les Allemands mais quelques extrémistes du Sinn Fein préfèrent l'adage : «England's difficulty is Ireland's opportunity» (Les difficultés de l'Angleterre sont des occasions à saisir pour l'Irlande). Ils forment ce que l'on appellera un peu plus tard l'Irish Republican Army (IRA) et montent avec l'assistance des Allemands une insurrection.

À l'heure dite, le lundi de Pâques 1916, un 24 avril, les insurgés occupent plusieurs bâtiments au centre de Dublin, dont la Poste, l'Hôtel de ville, le Palais de Justice et des gares. Ils déploient le drapeau tricolore au-dessus de la Poste et l'un de leurs chefs, le poète Patrick Pearse, lit une proclamation aux badauds. Las, ils sont conspués par la foule qui commence à se rassembler devant le bâtiment. C'est l'échec.

L'armée britannique amène de l'artillerie lourde et bombarde le centre de Dublin. Après cinq jours de résistance, les insurgés capitulent sans conditions au prix de quelques centaines de victimes. Contre toute attente, la férocité de la répression va retourner l'opinion publique en faveur des insurgés et transformer les condamnés en martyrs de la cause irlandaise.

Dans les mois qui suivent, les élections témoignent en Irlande d'un courant de sympathie inattendu en faveur du Sinn Fein, naguère marginal. La paix revenue, les élections générales sont un triomphe pour le Sinn Fein. Le 21 janvier 1919, à Dublin, ses députés constituent un Parlement national (Dail Eireann en gaélique) et lancent un Appel aux Nations en vue de l'indépendance de l'île. Mais Londres ne veut rien entendre... et le président américain Woodrow Wilson fait la sourde oreille.

La «Guerre d'indépendance»

Eamon de Valera, qui dirige le Sinn Fein depuis les États-Unis, constitue un gouvernement parallèle. Sous la direction du jeune Michaël Collins (30 ans), l'IRA, l'armée républicaine, se prépare à la guerilla. Elle dispose de 15.000 ou 20.000 hommes, pour la plupart des paysans qui travaillent le jour et se mobilisent le soir. Le fer de lance est constitué par des colonnes volantes de Volontaires, fortes d'une trentaine d'hommes. La discipline y est sévère et les traîtres exécutés sans façon.

L'insurrection est déclenchée le 21 juin 1919 par l'attaque d'un convoi de munitions. Pour y faire face, , le gouvernement britannique constitue sur une proposition de Churchill deux forces spéciales :
Les Black and Tans en Irlande (1920)– Les «Black and Tans» (Noirs et Fauves), ainsi nommés en raison de leur uniforme : ce sont des vétérans de la Grande Guerre en mal d'emploi et aussi d'anciens prisonniers de droit commun, autant dire des brutes qui se signaleront vite par leurs exactions (ils sont 16.000 au total),
– Les Auxiliaires (ou Auxies) : environ 1500 anciens officiers destinés à encadrer les précédents.

Dans un premier temps, l'IRA organise des coups de main pour se procurer des armes et multiplie les embuscades et les meurtres isolés.Avec l'entrée en lice des Black and Tans, la situation empire. A quelques exceptions près, les forces spéciales se comportent comme une armée d'occupation. Représailles et contre-représailles se succèdent.

Le traité de paix

Les actions de l'IRA, si spectaculaires qu'elles soient, n'emportent pas la décision. Mais le Sinn Fein, par une propagande très efficace, mobilise en sa faveur l'opinion anglaise et internationale. Il arrive aussi à court-circuiter la justice officielle en créant ses propres tribunaux.

Réaliste, le Premier ministre Lloyd George se résout en décembre 1920 à proposer une partition de l'île avec un Parlement autonome à Dublin pour 26 comtés à majorité catholiques et un autre à Belfast pour 6 comtés à majorité protestante sur les 9 que compte l'Ulster.

Le 22 juin 1921, le roi George V lance un appel vibrant à la paix. Le 10 juillet, une trêve est conclue entre l'armée britannique et l'Irish Republican Army. Deux jours plus tard, Lloyd George invite à la table des négociations le représentant de l'Irlande du nord et Eamon de Valera.

De Valera se défile et c'est à Arthur Griffith et Michaël Collins de conduire les négociations au nom du Sinn Fein. Les pourparlers traînent en longueur. Le traité signé à Londres le 6 décembre 1921 prévoit la transformation de l'Irlande du Sud (26 comtés) en un «État libre d'Irlande», virtuellement indépendant avec statut de dominion (comme le Canada ou l'Australie). mais associé à l'Empire britannique.

La guerre fratricide

Dans les rangs du Sinn Fein, certains républicains «idéalistes» s'indignent du serment d'allégeance au roi. Mais le nouveau gouvernement irlandais s'empresse de constituer une armée régulière avec les troupes de l'IRA qui lui sont restées fidèles et mène une guerre fratricide impitoyable contre les séditieux.

En Irlande du Nord (Ulster), pendant ce temps, les unionistes, qui n'ont rien à craindre de l'IRA, multiplient les exactions et les pogroms souvent meurtriers contre leurs concitoyens catholiques avec l'intention évidente de les pousser à l'exil. Le temps passant, la frontière «provisoire» entre les deux parties de l'Irlande se pérennise et la scission entre l'Ulster et l'État libre d'Irlande devient irrévocable, laissant en suspens le sort de la minorité catholique d'Irlande du Nord, soumise à de constantes vexations et discriminations de la part des descendants de colons protestants.

Publié ou mis à jour le : 2018-11-27 10:50:14
Antoine Malette (07-06-2007 02:21:04)

Ayant, comme un grand nombre de Québécois, moi-même des racines irlandaises, l'histoire de l'île d'émeraude m'intéresse de plus en plus. Plus particulièrement l'épisode concernant les Pâques Sanglantes de 1916 jusqu'à la mort de Collins.
Après avoir lu assez sur le sujet, je peux me rendre compte que le peuple irlandais fut longtemps bagarreur, chose un peu normale quand on pense au fait qu'il fut sous constante agression britannique...
Le personnage d’Eamon de Valera m’intrigue particulièrement, surtout de par sa réponse à l’acceptation du traité de Londres. D’autant plus que Collins l’accusa d’avoir prévu le tout et l’avoir envoyé à sa place pour rapporter les mauvaises nouvelles au peuple. Il profita alors de l’occasion pour monter un camp ennemi à celui de Collins et enclencha la marche vers la guerre fratricide. À peine la guerre d’indépendance avait terminé que l’Irlande était de nouveau en conflit (fratricide cette fois). Ce qui est désolant, c’est que Collins voyait dans l’État Libre d’Irlande l’occasion d’éventuellement atteindre l’état d’une République, chose qu’il aurait certainement réussi à long terme avec l’aide d’Eamon.

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