Pierre Savorgnan de Brazza (1852 - 1905)

« L'ami des Noirs » et le libérateur des esclaves

Pierre Savorgnan de Brazza, Français d'adoption et officier de marine, s'est illustré en Afrique en soumettant pacifiquement le Gabon du roi des Bateké Tio.

Ce succès lui a valu de devenir sous la IIIe République un héros de la colonisation et de la « mission civilisatrice » de la France.

Le jeune Brazza (28 ans), Français d'adoption, devient l'objet d'un véritable culte républicain et l'on se plaît à opposer sa magnanimité à la brutalité de Stanley, un Britannique au service du roi des Belges, avec lequel il est entré en concurrence dans le bassin du Congo.

Brazza, présenté comme l'ami des Noirs et le libérateur des esclaves, est nommé commissaire du gouvernement dans l'Ouest africain puis, de 1886 à 1897, commissaire général au Congo.

Il jette les bases de la future Afrique Équatoriale Française : Congo, Gabon, Oubangui-Chari (aujourd'hui Centrafrique), Tchad et Cameroun...

Alban Dignat

Pierre Savorgnan de Brazza (1886, Alphonse Montchablon, Musée du Quai Branly Jacques Chirac))

Un héros de la France des colonies

Savorgnan de Brazza est né à Castelgandolfo, près de Rome, dans une famille de l'aristocratie romaine, le 26 janvier 1852, sous le nom de Pietro Brazza Savorgnan.

Après des études à Paris, il entre à l'École Navale à titre étranger avec l'appui de l'amiral de Montaignac.

Médiocrement noté et en butte à l'hostilité des autres officiers de marine, il participe après la guerre franco-prussienne à une modeste expédition au Gabon. Là, il conçoit le projet d'explorer le bassin du Congo pour le compte de la France.

Mais à Paris, la IIIe République s'installe et la colonisation ne figure pas encore au rang des priorités nationales.

En 1874, le jeune officier de marine se fait naturaliser français, change son nom en Savorgnan de Brazza et son prénom en Pierre. Il repart aussitôt pour le Gabon avec le seul soutien de son protecteur, l'amiral de Montaignac, devenu entretemps ministre de la Marine.

Au cours d'une première mission, Brazza remonte l'Ogoué, un fleuve côtier qui arrose le Gabon actuel, puis reconnaît le cours supérieur de l'Alima, un affluent du Congo, le grand fleuve d'Afrique centrale.

NB : le Congo n'est pas accessible à partir de son embouchure en raison d'importants rapides ; le cours navigable du fleuve s'interrompt en amont de ces rapides, dans une vaste retenue aujourd'hui connue sous le nom de Stanley Pool et sur les bords de laquelle se tiennent Brazzaville et Kinshasa, ex-Léopoldville.

Lors d'une deuxième expédition, Savorgnan de Brazza fonde Franceville sur le haut-Ogoué.

Il atteint enfin le Congo en descendant l'Almina et, dans le village d'Itiéré, conclut le fameux traité de protectorat avec le Makoko-Iloô (titre officiel du chef des Bateké Tio). Brazza repart pour la France en laissant sur place de petits détachements de soldats, notamment des tirailleurs sénégalais (originaires du bassin du Niger).

Dans le village de N'Couna, qui sera plus tard rebaptisé par la France... Brazzaville et deviendra la capitale de la colonie puis de la république du Congo, l'un de ces tirailleurs, le sergent Malamine, a la frayeur de sa vie quand il voit débarquer en juillet 1881 la puissante troupe de Henry Stanley.

L'explorateur britannique descend le bassin du Congo en suivant la rive gauche (côté sud) et soumet de toutes les manières les populations locales à sa loi. Malamine ne se laisse pas impressionner et lui refuse le passage sur la rive droite. Stanley s'incline. Le roi des Belges devra se satisfaire de la rive gauche du Congo.

Brazza délivre des esclaves dans un village du Congo, image de propagande extraite des Belles Images d'histoire

Triomphe et amertume

À Paris, le traité entre Brazza et le Makoko-Iloô est ratifié le 18 septembre 1882 par la Chambre des députés, dans l'enthousiasme. C'est qu'entre temps, Jules Ferry a converti une bonne partie des élites républicaines au principe de la colonisation.

Brazza, fêté en héros, présenté comme l'ami des Noirs et le libérateur des esclaves, est nommé commissaire du gouvernement dans l'Ouest africain puis, de 1886 à 1897, commissaire général au Congo. Il jette les bases de la future Afrique Équatoriale Française : Congo, Gabon, Oubangui-Chari (aujourd'hui Centrafrique), Tchad et Cameroun.

En février 1905, l'explorateur est consterné par la lecture d'un journal qui évoque des sévices à l'encontre des Noirs en Afrique équatoriale française. Ses successeurs, comme les Belges de l'autre côté du fleuve, sont suspectés de brutaliser les populations locales, voire de les mutiler, quand ils refusent de récolter le caoutchouc.

Brazza réclame et obtient du président Émile Loubet une mission d'inspection. C'est ainsi qu'il retourne dans « sa » colonie du Congo pour découvrir que celle-ci, abandonnée à l'avidité des trafiquants et à la brutalité de certains fonctionnaires, est mise en coupe réglée par les compagnies concessionnaires.

Pierre Savorgnan de Brazza meurt à Dakar sur le chemin du retour le 14 septembre 1905 et l'on murmure qu'il aurait été empoisonné par des trafiquants peu désireux que soient révélés leurs méfaits. De fait, son rapport est enfoui dans les archives sans publicité aucune... L'explorateur bénéficie de funérailles nationales avec sur sa tombe du Père-Lachaise (Paris) cette épitaphe : « Sa mémoire est pure de sang humain. Il succomba le 14 septembre 1905 au cours d’une dernière mission entreprise pour sauvegarder les droits des indigènes et l’honneur de la nation ».

Publié ou mis à jour le : 2023-05-24 13:58:14

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