« Roman national » : l’expression fait partie du langage courant depuis la fin du XXe siècle (dico). Mais que signifie-t-elle ? Depuis le début du quinquennat de Nicolas Sarkozy (2007) et surtout depuis la parution en 2009 du livre de Lorànt Deutsch : Métronome, elle est massivement employée pour désigner une manière surannée et rétrograde de raconter l’histoire de France. Mais cette expression avait eu auparavant d’autres sens depuis son apparition à la fin du XIXe siècle.
Vie, mort et résurrection du roman national
Qu'est-ce que le roman national ? C'est d'abord une expression, dont l'histoire a été discontinue. Elle fut inventée une première fois sous le Second Empire par le duo d'écrivains alsaciens qui signait Erckmann-Chatrian, ou par son éditeur, Pierre-Jules Hetzel, qui fut aussi l’éditeur de Jules Verne.
C’est ainsi qu’en 1864, Le Fou Yégof paraît avec la mention « roman national ». Cette désignation est ensuite adoptée par plusieurs auteurs ou éditeurs jusqu'en 1914. Dès lors, elle désigne un genre de fiction qui a la nation comme personnage principal, de la même façon que, dans un « roman familial », le protagoniste est une famille et non un individu.
Très vite, Walter Scott apparaît comme l'inventeur rétrospectif de ce genre avec Waverley paru en 1814. C'est encore dans ce sens que Louis Aragon saluait en 1961 en Mohammed Dib l’« inventeur du roman national algérien » ou Anne-Marie Thiesse détaillant, dans un chapitre de son étude classique sur La création des identités nationales (le Seuil 1999), le rôle qu'avaient pu jouer au XIXe siècle des œuvres de fiction dans l'affirmation de ces identités dans différents pays européens.
L'expression a été inventée une deuxième fois, dans les années 1990, dans un sens très différent par des intellectuels regroupés autour de la revue Le Débat fondée par Pierre Nora et Marcel Gauchet. On parle alors du « roman national de la France » comme d'une fable que le pays se raconte à lui-même pour ne pas voir la réalité qu'il doit affronter : la disparition de son industrie, de sa classe ouvrière et de l'utopie qu'elle portait, de sa puissance mondiale etc.
Dans Voyage au centre du malaise français : L'antiracisme et le roman national (Gallimard, Le Débat, 1993), le sociologue Paul Yonnet estime que l'« immigrationisme » a privé les Français de leur « roman national ». Pour Yonnet, né en 1948, cette déconfiture va de pair avec celle du roman familial de sa génération. Les Français nés après la guerre ont été élevés dans l'idée que leurs parents avaient été des héros, et arrivés à l'âge adulte, ils ont pu penser qu'il n'en était rien à la lumière des travaux de Robert Paxton sur La France de Vichy (Seuil, 1973).
Dans des termes proches de ceux du polémiste Éric Zemmour, il estime que Paxton aussi bien que le cinéaste Marcel Ophuls (Le Chagrin et la pitié, 1969) ont peut-être porté un coup fatal à l'histoire de France en la rendant méprisable. Alors que le monde ouvrier (dont la mémoire est elle-même entachée par les crimes du stalinisme) commence à disparaître, les immigrés et le métissage apparaissent dès lors comme la seule alternative pour une génération militante, qui, s'étant débarrassée d'un roman national traumatisant, adopte ce que Yonnet nomme des « romans ethniques ».
Enfin, le « roman national » est apparu dans un troisième sens au cours des toutes dernières années du XXe siècle sous la plume de l'historien Nicolas Offenstadt. Selon ses termes, le roman national repose sur l’idée selon laquelle « la France a connu une histoire naturelle et continue depuis l’Antiquité, qu’elle forme une unité et une entité depuis les temps les plus reculés. » Ce récit est « une grande fresque » qui « valorise les hommes célèbres et les événements considérés comme fondateurs de la France » (L'Historiographie, PUF, 2017). Offenstadt rassure ses confrères de l'Université en affirmant que « depuis une quarantaine d’années, (…) le "roman national" (…) a subi des attaques de tous les côtés » (Mémoires, luttes et histoire, PUF, 2011) et que, pour ainsi dire, son compte est bon.
Mais en parallèle, dans un pamphlet à grand tirage, L'histoire bling-bling (Stock, 2009), il lance un cri d'alarme contre son « retour » et préface un livre dirigé contre les Historiens de garde (Inculte, 2013), clique hétéroclite d'écrivains vulgarisateurs, d'hommes de radio ou de télévision, tous vigoureusement accusés de vouloir faire revivre le monstre que l'on croyait mort (Lorànt Deutsch, Patrick Buisson, Éric Zemmour, Franck Ferrand, Stéphane Bern etc.). Dès lors, une certaine presse de gauche se lève pour conspuer cette manière de raconter l'histoire, surannée et fausse (un roman, ça n'est pas vrai) et nationaliste (un roman national, c'est forcément nationaliste), tandis qu'à droite, on se mobilise pour porter secours à ce roman (ou plutôt ce « récit », ce qui fait moins faux) national dont personne n'avait jamais entendu parlé quelques mois auparavant...
Le roman national, un cadeau royal
Pauvre « roman national » ! Bien moins figé que ne le supposent ses contempteurs, il a été en constante évolution au cours des siècles.
Avant d'être national, il a d'abord été monarchique. Dès le XVe siècle, les rois de France prennent l'habitude d'appointer des historiographes qui s'acquittent diversement de leur tâche. Une partie d'entre eux, les « historiographes du roi », ont pour mission de faire l'éloge des actions du monarque régnant, tandis que les « historiographes de France » doivent faire le récit de l'histoire du pays, ou plutôt de ses rois et de leur trois dynasties (ou « races »), depuis Pharamond, fondateur supposé de la dynastie mérovingienne.
Si certains de ces historiographes ont fait œuvre utile, on chercherait en vain la trace de quelque écrit d'importance dans les papiers de la plupart de leurs collègues, qui ont souvent acquis la charge comme une sinécure.
En revanche, Jean du Tillet sans être historiographe, est l'auteur d'un Recueil des Roys de France qui a fait date. François Ier lui ayant confié la tâche de réorganiser les archives, il avait pu consulter tous les papiers royaux partout où ils se trouvaient. Il en avait acquis la conviction du caractère original des institutions monarchiques, qui, selon lui, ne devaient rien à l'Antiquité.
Pour cette raison, il rejeta l'hypothèse de l'origine troyenne des Francs – dont il est faux de penser qu'elle a constitué un dogme qu'il fallait respecter sous peine d'être embastillé (contrairement à ce qui est souvent répété, il n'est pas certain que l'abbé Fréret l'ait été pour cette raison en 1715 – et, du reste, ce serait le seul).
À la génération suivante, Girard du Hailland, auteur de la première Histoire de France imprimée, était, lui, bien propriétaire d'une charge d'historiographe. Il défendait, lui aussi, la thèse selon laquelle la monarchie française ne devait rien à l'empire romain sur les ruines duquel elle avait fleuri et qu'elle s'était fondée suivant son propre modèle.
Les historiographes, du moins tant que la monarchie est demeurée tempérée et à l'écoute des corps constitués entre elle et ses peuples, n'étaient pas aux ordres mais jouaient un rôle actif dans la construction théorique d'un État moderne.
Ils ne se privaient pas non plus de se faire les conseillers du monarque, comme Jean de Serres, ancien combattant de la cause huguenote, rallié au parti des Politiques. Au roi Henri IV, il donne en exemple Clovis se convertissant au christianisme, religion commune de son royaume, pour y apporter la paix et en garantir la cohésion.
Le régime monarchique se durcissant, il en a été autrement. Richelieu trouve en Scipion Dupleix une créature docile pour rédiger, quasiment sous sa dictée (il en relisait les épreuves) une histoire de France selon ses vues. Mais Dupleix était un juriste, un « administratif » dirions-nous, au style un peu rude et sans créativité.
Quelques années après son succès, massivement aidé par le soutien du pouvoir, celui de Mézeray le surpasse. Ce fils d'un fermier et chirurgien du Perche, écrivant d'abord à titre privé, fait paraître le premier volume de son histoire de France en 1643.
S'appuyant sur une solide documentation sur les Mérovingiens et servi par une plume alerte, le volume emporte, comme les suivants, un vif succès, attirant sur lui les bienfaits du prince, qui prennent la forme d'une pension de 4000 livres. Gros travailleur, Mézeray refonde en 1662 entièrement son ouvrage, qui, sous le titre d'Abrégé d'histoire de France, rencontre une audience plus grande encore que la version précédente.
C'est à ce moment que Colbert se rend compte que l'œuvre contient d'inacceptables critiques contre la fiscalité royale. Les excuses et les errata de Mézeray ne suffisent pas à lui maintenir sa pension. On recrute à sa place Racine et Boileau, lesquels n'écriront pas une ligne d'Histoire ! Car, au fond, le pouvoir absolu ne devant rien au passé, il n'a pas besoin d'historiographe. Il s'en donnera à nouveau un, à la toute fin du règne de Louis XIV, avec le père Daniel, virtuose de la flatterie. Après lui, l'abbé Velly, à peine plus audacieux, produira la dernière grande histoire monarchique de l'Ancien Régime.
Le roman national et la guerre des races
Après la Révolution, il ne saurait plus être question, théoriquement, d'histoire monarchique. Les événements qui se sont succédés à partir de 1789 ont rendu caduque l'idée selon laquelle les rois étaient les premiers personnages de l'histoire. Pour autant, l'histoire nationale ne surgit pas instantanément après la chute de Louis XVI.
L'histoire que l'on enseigne de plus en plus aux enfants (elle est au programme des écoles primaires supérieures fondées par Guizot) reste fortement marquée par l'histoire monarchique, sous la forme d'abrégés ou d'« épitomés » des œuvres de Mézeray, Daniel, Velly ou encore de Le Ragois (précepteur d'un fils de Louis XIV et de la marquise de Montespan).
Toutefois, les vues exposées dès 1820 par Augustin Thierry progressent. Selon lui, l'histoire de France « véritablement nationale » ne commençait pas avec Pharamond ou même Clovis, mais avec les Gaulois, dont était issu le tiers état, c'est-à-dire neuf dixièmes des Français, les aristocrates étant descendants des Francs, une race germanique ayant imposé sa domination sur la Gaule.
Pour Thierry, alors que les Mérovingiens et les Carolingiens appartenaient à cette race d'envahisseurs, il n'en était pas de même des Capétiens, rois nationaux, voire de libération nationale.
Cette vision s'impose progressivement dans les histoires de France les plus largement diffusées comme celles d'Henri Martin ou de Victor Duruy. Sous le Second Empire puis sous la Troisième république, les Gaulois s'enracinent définitivement dans l'histoire de France, tandis que les rois « francs » sont de plus en plus dénigrés comme barbares ou fainéants au profit des rois « nationaux » bâtisseurs d'un État moderne qu'il appartiendra à la République de consolider. Progressivement aussi, suivant l'intuition de Jules Michelet, l'aspect racial (au sens génétique ou biologique) de l'opposition entre Francs et Gaulois s'estompe.
L’enseignement de l’histoire sur la sellette
Il a appartenu à Ernest Lavisse, dans les débuts de la IIIe République, de codifier le roman national et de le rendre accessible aux élèves des écoles au moment où l'enseignement primaire devenait laïc et obligatoire. Pendant près d'un siècle, la trame en est restée la même malgré bien des ajustements. Le Petit Lavisse lui-même ne fut pas le monolithe que décrivent hâtivement ces détracteurs tardifs.
Les modifications du roman national au cours du XXe siècle ont été l'occasion de débats et de controverses sans fin. L'une des dernières fut lancée en 1987 par Suzanne Citron avec la publication du Mythe national, suivi en 1992 de L'histoire de France autrement. Dans ces deux ouvrages qui forment un diptyque, l'autrice ne réclamait pas la destruction du roman national, mais qu'il soit sérieusement amendé et qu'il s'adapte à ce qu'était la nation française des années Mitterrand. Cette nation vivait une triple mutation, que beaucoup, à gauche et bien au-delà, voyaient du meilleur œil : la décentralisation, l'intégration européenne et l'assimilation de populations nouvelles issues de l'immigration. En bref, Suzanne Citron plaidait pour une histoire de France moins jacobine et moins nationaliste.
Plus de trente ans plus tard, les termes du débat ne sont plus les mêmes. Les débatteurs, loin de discuter des manières dont il faudrait amender le roman national et l'adapter à l'évolution du pays, se partagent entre ceux qui estiment que toucher à la moindre de ses virgules équivaudrait à l'écroulement de la civilisation française et ceux qui réclament sa mise à mort pure et simple. Si la première option est peu recevable, puisque le roman national n'a dû sa longue existence qu'à sa capacité à s'adapter et que son immobilité prolongée ne peut être que synonyme d'une crispation identitaire, la seconde n'est pas plus engageante, du moins si l'on se place d'un point de vue progressiste.
Les ennemis du roman national se sont en effet d'une certaine manière radicalisés depuis les années 2010, jusqu'à se trouver en contradiction avec les valeurs de progrès. Ils ne veulent plus seulement en finir avec un certain « roman national » mais avec « LE » roman national sous quelque forme qu'il puisse prendre : en finir avec une certaine idée de l'histoire de France, mais également avec une certaine idée de l'histoire (comme culture et comme connaissance) et avec la nation (comme cadre politique).
Dans cette affaire, Patrick Boucheron a été, en se plaçant à la tête de l'ouvrage collectif L'histoire mondiale de la France, le général qui s'est proposé de mener l'assaut final.
Le caractère désordonné de ce recueil de 146 petits textes sans ligne directrice (malgré l'intérêt que présentent un grand nombre de ces textes) avait été annoncé dans un livre-programme (L'Entretemps, 2012) dans lequel le futur professeur au Collège de France affirmait qu'il fallait abandonner l'« histoire flêchée » et en appelait à arracher les frises chronologiques des salles de classes.
De plus, il plaidait pour un « décentrage » du regard historien. Il poussait ainsi la légitime et ancienne demande de ne pas même considérer l'histoire du point de vue « européen » ou « occidental » jusqu'à demander à ce qu'elle ne se fasse plus depuis aucun point de vue. Mû par des intentions sans doute généreuses, il en oubliait une évidence que rappelle sa consœur américaine Lynn Hunt : l'Histoire est « forcément écrite d’un certain point de vue et il est difficile de dire ce qu’un point de vue cosmopolite pourrait être : un point de vue qui ne serait de nulle part en particulier, partout à la fois, ou très éloigné de la surface du globe? » (L’Histoire, Pourquoi elle nous concerne, 2019)
Ces discussions seraient de peu d'importance si elles n'avaient des conséquences sur l'enseignement de l'Histoire dispensé aux enfants et aux adolescents, c'est-à-dire aux futurs citoyens.
En effet, ceux qui se veulent les fossoyeurs du roman national, au mieux opèrent une confusion entre l'histoire-recherche et l'histoire-culture, au pire envisagent sérieusement de faire des titulaires du bac des historiens plutôt que des citoyens. Il ne s'agit certes pas de cacher aux jeunes gens la manière dont s'élabore la connaissance historique mais le but premier de l'enseignement doit être de leur fournir un outil qui leur permette de se situer sur un territoire et dans une communauté de destin, ce qui implique l'enseignement d'un roman national. Pourquoi celui-ci serait-il apologétique ?
Il serait absurde de jeter un voile pudique sur les dissensions civiles du passé ou de présenter sous un jour entièrement positif des processus qui ont causé des traumatismes dont les traces demeurent. Mais il est tout aussi absurde et dangereux de dissimuler, en le diluant dans de vagues « thématiques », le long cheminement qui a fait que la France est devenue ce pays que nous avons aujourd'hui en partage, quelle que soit l'ancienneté de notre présence sur son sol.
Pour acquérir cette connaissance, l'« état de la recherche » et surtout les modes qui l'agitent sont de peu d'importance.
Ce qui importe, c'est, par exemple, que le nom de Louis XIV soit connu et situé dans le temps (ce n'est déjà plus le cas pour bien des jeunes gens ayant obtenu leur bac). Le fait qu'il soit considéré comme un grand roi ayant joué un rôle positif ou au contraire que l'on porte sur lui le regard très négatif qui était celui de Madame de Staël, de Michelet ou de Proudhon est une autre question qui n'est pas du ressort de l'enseignement.
Sous l'influence de l'Histoire globale, la discipline est en passe de ne plus être considérée comme un « roman vrai » mais comme une science sociale parmi d'autres, s'intéressant à des problèmes qu'il faut résoudre en appliquant une certaine méthodologie. Le but est de faire de l'élève un « citoyen du monde », en sorte que l'école, selon les termes de Nicolas Offensdadt, ne soit plus « le lieu de l'adhésion ».
Mais est-ce bien souhaitable ? Les jeunes immigrants ne sont-ils pas avant tout à la recherche d'une nouvelle patrie à laquelle adhérer ? Respectons leur envie d'habiter une histoire à laquelle eux-mêmes et plus encore leurs enfants et descendants pourront s’identifier. Faisons vivre le « roman national » dans sa chronologie plutôt que sous forme de thématiques abstraites. C’est une marque d'hospitalité à l'égard de ceux qui nous rejoignent, autant que de respect pour nous-mêmes et pour ceux, aux parcours divers et sinueux, qui nous ont précédés.
Éditeur marseillais, David Gaussen est titulaire d'un doctorat d'histoire. Sa thèse est parue sous le titre L'Invention de l'Histoire nationale en France: 1789-1848 (Gaussen, 2015).
Dans le droit fil de cette thèse, il a publié en février 2020 un essai destiné à un large public : Qui a écrit le roman national ? De Lorànt Deutsch à Patrick Boucheron, l'Histoire de France dans tous ses essais.
Ce livre retrace l’histoire, du « roman national » puis détaille les différentes façons que l’on a eu de faire le récit de la France depuis le Moyen Âge. Il expose comment le roman national a pris la place d’un roman monarchique avant d’être lui-même remis en cause au nom d’une approche mondiale de l’histoire popularisée par Patrick Boucheron. Il plaide enfin pour la réhabilitation d'un roman national « hospitalier », écrit par et pour tous les membres de la société française.
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Bernard (18-11-2024 11:24:25)
Il en est de l'Histoire comme de toute transmission : Il faut d'abord apprendre à croire (en primaire, au collège : c'est le roman national) et ensuite apprendre à douter (au Lycée, a fortiori dans le supérieur). Cela dit, l'Histoire doit s'éloigner un peu des bisbilles de palais et des batailles. Les Pandémies en sont le meilleur exemple. On parle de la colonisation de l'Amérique sans dire que la variole a tué 90% de la population amérindienne, de la 1° guerre mondiale sans (ou si peu) parler de la Grippe espagnole.
lb.dutignet (17-11-2024 19:19:14)
A propos du " roman national" je rejoins assez le commentaire de Philippe .
Le mot " roman " me gêne énormément , car comme il le dit , le roman est une oeuvre de fiction.Or l'écart avec la réalité est trop important , et quand le citoyen s'en aperçoit , la désillusion est toujours trop forte.On risque alors la désaffection vis_à_vis de la " chose publique ", et la réapparition des " Tous pourris " bien pratique pour les tous réactionnaires trop souvent acharnés conservateurs .Ce qui se passe actuellement avec de plus en plus d'abstentions aux élections .
Et puis l'aspect " national" est souvent secoué par les avancées dues aux découvertes archéologiques .A ce sujet la paléontologie et les méthodes liées au traçage de l'ADN rendent ce concept "national " bien ridicule .
Cela met à mal l'idée de la filiation que nous serinent bien des "historiens populaires " , en quête d'authenticité liée au sol et au sang .
On savait que l'homme moderne a encore entre 2 à 3% , parfois même près de 7% , d'ADN de Néandertal .On vient d'apprendre qu'il a aussi des gènes de l'homme de Denisova , un authentique asiatique .Alors la notions de " Français de souche ".......
Dans la même perspective dans '"L'Histoire générale des Révolutions " il apparaît qu'au cours des âges et des territoires sur des continents différents , l'évolution des populations a également suivi ce qui s'est passé en France à la fin du 18° s .
Donc notre peuple n' a pas innové .
Et c'est en cela que l'aspect universel est important , qui met à bas la vision " nationale ", pour ne pas dire " nationaliste " de certains politiques et de leurs thuriféraires médiatiques .
Les moyens de détection modernes , lidar , satellitaires et autres , ,nous révèlent que le monde précolombien a été aussi performant que notre sphère méditerranéenne , sinon plus , d'autant que ces peuples ignoraient le métal , le cheval et la roue !
Alors jouons-la modeste !
Philippe (18-09-2023 10:06:00)
La France a besoin de son histoire, pas d'un "roman" national ! Le roman (faut-il le rappeler ?) est un genre fictionnel. Aux historiens d'établir la vérité historique et de la faire connaître... et libre à chacun de s'en faire un roman. Et s'il arrive qu'un "roman national" vienne à prévaloir, son étude relèvera de l'histoire des idéologies, certainement pas de la célébration ou de la commémoration - en tout cas sur un site dédié à l'histoire.
Des historiens et d'autres intellectuels (Antoine Proust, Simone Weil, Pierre Vidal-Naquet…) se sont insurgés contre la notion de "devoir de mémoire" affirmant à juste titre : il n'y a pas de devoir de mémoire, parce que la mémoire est falsificatrice, il ya un devoir d'histoire. La même hygiène mentale devrait nous obliger, selon moi, à un examen critique de cette tarte à la crème médiatique du "roman national".
Il y a deux façons de considérer l'instruction des jeunes gens pour ce qui regarde le rapport à l'histoire. Ou bien c'est une formation idéologique, et il faut avoir le courage de le dire, et ce n'est pas (cela ne doit pas être) du ressort du professeur d'histoire. Ou bien il s'agit de les instruire de ce qui, dans le passé, les concerne et les détermine, et dont la connaissance est nécessaire à leur liberté, et cela ne relève en aucun cas d'aucune sorte de "roman".
Pour la santé mentale de nos futurs adultes et pour la cohésion sociale, il ne peut pas leur nuire de savoir quand Louis XIV a régné, qu'il a bâti Versailles, qu'il a révoqué l'Edit de Nantes et qu'il a "trop aimé la guerre". Aucune connaissance n'est inutile, et pour se repérer dans l'histoire, il n'est pas douteux que la chronologie est indispensable. Mais il me paraît pour le moins aussi important de les instruire de ce que disaient de la démocratie Siéyès (qui professait que la France ne saurait en être une) , Benjamin Franklin et Tocqueville (entre autres), de leur enseigner l'histoire des institutions et des notions politiques, et de leur faire savoir que les peuples avec qui nous avons une histoire commune n'en ont pas le même "roman". Je ne vois pas comment les enfants issus de l'immigration pourraient relativiser "leur" roman national si nous ne leur donnons pas l'exemple d'un rapport critique avec le "nôtre".