La « peste justinienne »

La pandémie qui met fin à un monde

À son apogée, au milieu du VIème siècle, l’empire romain d’Orient est brutalement affecté par une épidémie de peste, la première connue dans le monde méditerranéen. Elle va ruiner les efforts de l’empereur Justinien pour restaurer la grandeur de Rome. Elle va aussi préparer le terrain à l’arrivée des conquérants arabes sous la bannière de l’islam au siècle suivant…

Et survint le fléau qu'on n'attendait pas...

Arrivé sur le trône de Constantinople en 527 à la mort de son oncle Justin, Justinien s’affirme rapidement comme un empereur à poigne. Très vite, il entreprend de réunifier l'empire romain et de reprendre l'Occident aux rois barbares qui l'ont occupé au siècle précédent. Mais la peste va se mettre en travers de ses plans.

Elle entre dans l’empire romain en suivant la route commerciale de la mer Rouge : elle se manifeste à l’été 541 à Péluse, sur le delta du Nil. Une fièvre s’installe puis des ganglions gonflent et les malades meurent très vite, provoquant un effet de sidération dans la population.

Une fois à Alexandrie, elle profite des rats embarqués sur les navires pour gagner les ports de toute la Méditerranée. Les puces commencent par s’en prendre aux rats du lieu, puis après quelques jours, une fois tous les rongeurs tués, elles s’attaquent aux hommes. La population n’a pas les moyens de se prémunir contre la pestilence alors même qu’elle en est informée.

Fresque représentant l’embarcation Isis Geminiana, découverte en 1865 dans le colombarium 31 de la nécropole d’Ostie, le long de la via Laurentina, IIIe siècle apr. J.-C.

Elle frappe Constantinople à compter de février 542 : rapidement, des milliers de personnes meurent chaque jour sans que personne ne puisse les enterrer. C’est tout l’ordre social et économique qui s’effondre, les marchés ne fonctionnent plus, on ne trouve plus à se nourrir. Au total, c’est sans doute près de la moitié de la population de Constantinople, laquelle comptait plus de 500 000 habitants qui disparaît en quelques semaines.

La pestilence ne s’arrête pas à la capitale de l’Empire, même si ses effets sont moins bien connus ailleurs : elle frappe les villes d’Orient, de Jérusalem à Antioche mais aussi de nombreuses bourgades dès lors que le rat est partout – ainsi que peut-être d’autres vecteurs.

La peste sévit aussi en Occident.  Au-delà de l’empire, elle la Perse et l’armée de l'empereur Chosroès Ier, décimée, est contrainte de battre en retraite devant Justinien.

Des conséquences profondes et durables

À court terme, l’empire byzantin semble surmonter la crise. Tant bien que mal, Justinien et son général Bélisaire parviennent à compenser les pertes dans l’armée pour mener à bien leurs entreprises militaires, mais la crise est aussi économique. Il n’y a plus d’argent pour payer les soldats et malgré une pression fiscale maximale, les impôts ne rentrent plus par manque de contribuables. En 553, Justinien est obligé d’effacer les impôts dus depuis l’épidémie. Aucun de ses successeurs ne parviendra à surmonter la situation : trop peu d’hommes pour gérer un empire trop grand qui ne parvient pas à réduire ses ambitions et s’épuise dans d’interminables guerres avec la Perse...

Publié ou mis à jour le : 2020-04-19 09:59:11
Jacques (19-04-2020 16:07:09)

Cette épidémie de peste serait "la première connue dans le monde méditerranéen" dites-vous... car au cinquième siècle avant Jésus Christ la peste d'Athènes n'en était pas une, n'est-ce pas?
Herodote.net répond : effectivement, l'épidémie qui a frappé la Grèce se rapportait au typhus et non à la peste.

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