On appelle antijudaïsme les manifestations d'hostilité des chrétiens et des musulmans à l'égard des pratiquants du judaïsme, autrement dit des juifs, du fait de leur religion. Ce phénomène est caractéristique du Moyen Âge, du moins en ce qui concerne la chrétienté. Il est d'une autre nature que l'antisémitisme moderne, qui définit les juifs du fait de leur race prétendue et non de leur religion.
L'opposition entre chrétiens et juifs remonte au premier siècle de notre ère. À cette époque, dans l'empire romain, le christianisme est volontiers assimilé à une secte juive. Les communautés chrétiennes tout juste naissantes sont confondues avec les communautés juives du pourtour de la Méditerranée (la diaspora). Aussi les chrétiens, soucieux de se démarquer de leurs aînés en religion, tendent-ils par réaction à souligner leurs différences d'avec les juifs.
L’antijudaïsme médiéval est complexe, mélangeant les raisons religieuses, la méfiance et la jalousie, mais aussi des motivations fiscales et politiques.
À partir des croisades, au XIIe siècle, les juifs deviennent la cible des souverains, qui durcissent leur statut (obligation de porter un signe distinctif, interdiction d’être armé...). À la merci des rois et princes, sous la menace permanente d'une expulsion ou d'une confiscation de leurs biens, ils sont périodiquement rançonnés pour renflouer les caisses des États.
Quand les choses vont mal, ils sont désignés comme boucs émissaires, livrés à la vindicte populaire, parfois forcés de se convertir, envoyés au bûcher ou massacrés. C’est particulièrement le cas lors des épidémies de peste qui ravagent l’Europe dans les derniers siècles du Moyen Âge.
Cette hostilité atteint des sommets avec l’expulsion en 1492 des juifs d’Espagne. Dans le même temps, les autres communautés juives d’Europe et du monde islamique sont forcées de vivre dans des quartiers réservés, souvent à l’extérieur des murailles des villes : ce sont les ghettos.
Il existe toutefois des havres de paix et de sécurité pour les juifs. C’est le cas du royaume de Pologne et des États du pape, qui accueillent des juifs expulsés ou fuyant la violence.
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Bernie (08-11-2023 13:14:38)
Excellent article, avec ce qu'il comporte de "partis pris" dus aux inévitables et incertains partages entre histoire et mémoire qui se sont calcifiés au cours des siècles. A propos du ghetto de Venise, il me semble que c'est faire procès au Doge que lui attribuer cette relégation des juifs dans la "décharge locale". La loi juive, qui est très pointilleuse et détaillée, comme celle du Coran qui l'a en partie copiée, demande aux juifs de vivre au plus près des synagogues (au nombre de pas près même). D'où très logiquement le regroupement dans un "ghetto" qui est tout simplement le quartier juif. Il ne faudrait pas que dans quelques siècles, on accuse la république française d'avoir imposé un "ghetto" Chinois dans le 13ème arrondissement de Paris qui n'était pas, il y a encore quelques dizaines d'années, un arrondissement des plus agréables...
Ernestine (16-12-2021 21:47:31)
Juste un petit complément: Pour les inquisiteurs au XIVè siècle, les juifs étaient les premiers hérétiques à poursuivre. Les méthodes de ces inquisiteurs sont connues...D'autre part, le fait qu'on leur interdise de s'intégrer à la structure sociale agraire, il est évident qu'ils participèrent activement, malgré leur persécution itérative, à l'essor économique ET culturel des villes médiévales en Europe, surtout pou la période du Moyen Age tardif. Il suffit de consulter les analyses des livres de compte urbains dans le Saint Empire, par exemple, pour réaliser la hauteur de la contribution fiscale spécifique appliquée à l'encontre des juifs!
jerome (14-06-2020 12:33:37)
"Louis IX (futur Saint Louis) décide de faire brûler tous les manuscrits hébreux de Paris en place publique. Le total représente 24 charrettes"
Permettez moi de préciser que cette place était "place de grève" aujourd'hui Place de l'Hotel de Ville
Merci
shaïtan (26-02-2019 11:20:59)
Un riche article sur une riche et antique histoire.
Bravo Herodote.net.
Epicure (20-02-2019 04:27:16)
Parfait concentré de savoir et de pertinence. Bravo.
L'Histoire ne saurait cependant justifier la persistance de la dénomination de W. Marr (!) qui est une monstruosité intellectuelle, historique et génétique (raciale!)
Les Khazars, Turciques blancs... n'entreraient que pour au maximum 6% des filiations paternelles chez les ashkénazes...les Slaves causaco-ukrainiens R1a au contraire, y auraient une bien plus grande présence génétique (Ydna !) notamment chez les Levi d'Europe (51%) Que dire donc des lignées maternelles reconnues enfin en 2013/14 par Pereira-Costa et Klyosov pour 86 à 92% d'origine Paléolithique (chasseurs-cueilleurs) Européennes....