Approchez, Mesdames et Messieurs, et venez découvrir la fabuleuse histoire du cirque qui fait pétiller les yeux des petits et des grands depuis... depuis tout juste 250 ans !
Ne dit-on pas en effet que le premier spectacle de cirque, sous la forme que nous lui connaissons, se tint à Londres le 8 avril 1768 ? Spectacle équestre, dressage d'animaux et autres clowneries sont alors venues compléter les acrobaties d'antique tradition...
Prenez donc part à la grande parade des artistes et des animaux, des pionniers et des réformateurs avant d'entrer à notre suite sous le chapiteau des frissons et des rires ! Attention, le spectacle commence !
NB : faites glisser la souris sur les illustrations pour lire les légendes.
Montre-moi ce que tu sais faire...
On ne saura jamais quand, un beau jour, un hominidé a eu l'idée saugrenue de se mettre la tête en bas pour impressionner ses compagnons, moins habiles ou moins téméraires.
Mais on peut être sûr qu'acrobaties et autres jonglages ont été pratiqués depuis que l'Homme a pris conscience de son pouvoir d'artiste.
L’individu de Tanum, en Suède, représenté dans une position étrange, est-il victime d'une mauvaise chute ou en pleine démonstration de souplesse ?
Il y a peu de doutes, par contre, que du côté du Nil les danseuses savaient se contorsionner à loisir pour animer les spectacles, et l'on sait que la danse de corde est pratiquée dans les rues de Grèce depuis 1300 av. J.-C.
Tout au long de l'Antiquité, on trouve ainsi des témoignages d'exhibitions de professionnels vivant de la maîtrise de leur corps, de leur adresse ou de leur talent de dressage.
Quoi de plus attirant en effet qu'un animal un tant soit peu exotique ou savant ?
Si l'on a gardé peu de traces des grandes ménageries de l'Égypte, on a tous en tête l'image des hippodromes et des amphithéâtres romains où les spectateurs venaient s'abreuver du spectacle des courses de chars ou des combats entre gladiateurs et bêtes sauvages.
Parades, fanfares, voltigeurs et mêmes personnages grotesques déambulant sur le sable, une bonne partie du cirque est déjà là !
Ajoutons quelques funambules semblant marcher au-dessus du public, des ours boxeurs et des fauves hargneux...
On comprend l'habilité de Romulus, le mythique fondateur de Rome, qui aurait institué ces jeux pour attirer ses voisins... et leurs femmes, les Sabines !
Ce succès ne dura que quelques siècles puisqu'à la chute de l'empire romain, les cirques disparaissent, laissant place à de petits spectacles sans commune mesure, du moins en Occident.
Les Mérovingiens, dans leur désir d'imiter Byzance, ne réussirent guère à relancer les jeux de cirque et les amateurs de curiosités durent longtemps se contenter d'admirer les bateleurs ambulants faisant l'animation sur les places de marché.
L'historien Suétone rend compte de la magnificence des spectacles qui ont marqué le retour de Jules César à Rome après ses victoires sur les Gaules, l'Égypte et la Numidie (46 ap. J.-C.) :
« Il donna des spectacles de divers genres : des combats de gladiateurs, des pièces de théâtre jouées dans tous les quartiers de la ville, et même par des acteurs parlant toutes les langues, des jeux dans le cirque, des combats d'athlètes, une naumachie [spectacle de bataille navale]. [...] Aux jeux scéniques, Decimus Laberius, chevalier romain, joua un mime de sa composition. Il reçut de César cinq cents sesterces et un anneau d'or ; et, de la scène il alla, en traversant l'orchestre, s'asseoir sur l'un des quatorze gradins (réservés aux chevaliers). Au cirque, l'arène fut agrandie des deux côtés ; on creusa tout autour un fossé qui fut rempli d'eau, et l'on vit des jeunes gens des plus nobles familles faire courir dans cette enceinte des chars à deux et à quatre chevaux, ou sauter alternativement sur des coursiers dressés à cette manœuvre. Des enfants, partagés en deux troupes, suivant la différence de leur âge, célébraient les jeux appelés Troyens. Cinq jours furent consacrés à des chasses. Le dernier spectacle fut celui d'une bataille rangée entre deux armées, et où combattirent, de part et d'autre, cinq cents fantassins, trente cavaliers et vingt éléphants. Afin d'ouvrir à ces troupes un plus vaste champ de bataille, on avait enlevé les bornes et dressé à leur place deux camps opposés l'un à l'autre. Des athlètes luttèrent, pendant trois jours, dans un stade construit exprès dans le quartier du champ de Mars. Pour la naumachie, un lac fut creusé dans la petite Codète, où s'affrontèrent des vaisseaux à deux, trois, et quatre rangs de rames, chargés de soldats figurant une flotte tyrienne et une égyptienne. L'annonce de tous ces spectacles avait attiré à Rome une si prodigieuse affluence d'étrangers, que la plupart d'entre eux couchèrent sous des tentes, dans les rues et dans les carrefours, et que beaucoup de personnes, entre autres deux sénateurs, furent écrasées ou étouffées dans la foule » (Suétone, Vies des douze Césars, début du IIe s. ap. J.C).
« Monnaie de singe »
Au Moyen Âge, être artiste reste un métier peu envié.
Obligés d'errer de ville en ville pour renouveler leur public, nos saltimbanques, jongleurs, montreurs d'ours et contorsionnistes devaient aussi supporter la mauvaise réputation faite par le clergé.
Au moins ces baladins avaient-ils le privilège d'échapper à l'octroi, à toutes les entrées de villes fortifiées. Les préposés au péage les en dispensaient sous réserve de les réjouir par quelques bons tours. D'où l'expression : « payer en monnaie de singe ».
Au XVIIIe siècle, le pouvoir s'en mêle en leur interdisant d'exercer sur la voie publique, ce qui les oblige à se regrouper pour se produire dans les foires.
De grandes familles voient alors le jour, comme les Chiarini qui n'hésitent pas à innover en présentant des ascensions en ballon ! C'est aussi à cette époque que l'on prend l'habitude d'attirer le badaud dans les filets de belles parades. Mais tout cela demeure teinté d'amateurisme.
Le Singe avec le Léopard
Gagnaient de l'argent à la foire :
Ils affichaient chacun à part.
L'un d'eux disait : Messieurs, mon mérite et ma gloire
Sont connus en bon lieu ; le Roi m'a voulu voir ;
Et, si je meurs, il veut avoir
Un manchon de ma peau ; tant elle est bigarrée,
Pleine de taches, marquetée,
Et vergetée, et mouchetée.
La bigarrure plaît ; partant chacun le vit.
Mais ce fut bientôt fait, bientôt chacun sortit.
Le Singe de sa part disait : Venez de grâce,
Venez, Messieurs. Je fais cent tours de passe-passe.
Cette diversité dont on vous parle tant,
Mon voisin Léopard l'a sur soi seulement ;
Moi, je l'ai dans l'esprit : votre serviteur Gille,
Cousin et gendre de Bertrand,
Singe du Pape en son vivant,
Tout fraîchement en cette ville
Arrive en trois bateaux exprès pour vous parler ;
Car il parle, on l'entend ; il sait danser, baller,
Faire des tours de toute sorte,
Passer en des cerceaux ; et le tout pour six blancs !
Non, Messieurs, pour un sou ; si vous n'êtes contents,
Nous rendrons à chacun son argent à la porte.
Le Singe avait raison : ce n'est pas sur l'habit
Que la diversité me plaît, c'est dans l'esprit :
L'une fournit toujours des choses agréables ;
L'autre en moins d'un moment lasse les regardants.
Oh ! que de grands seigneurs, au Léopard semblables,
N'ont que l'habit pour tous talents !
Jean de la Fontaine, Fables, livre IX, 1678
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
oldpuzzle (04-04-2018 05:05:08)
Des ascensions en ballon au XVIIe siècle ! Un peu étonnant, non ?
Boutté (03-04-2018 18:47:11)
Je suis étonné que vous passiez sur le XX°siècle sans citer les deux prestigieux cirques parisiens Bénouville et Médrano. Bénouville datait du siècle précédent et était consacré au cheval et au trapèze volant.Il était situé rue Bénouville à l'emplacement,je crois,où s'est construit l'hôtel particulier des Giscard. Médrano était plus "généraliste", situé place Blanche. Je m'y suis produit enfant,durant la guerre car les Allemands n'avaient réquisitionné les chevaux ni interrompu le spectacle.Les écuries étaient donc archi pleines d’animaux planqués.
BROURI (03-04-2018 18:37:04)
Fabuleux !