Rome ne s’est pas faite… ni défaite en un jour. Ce grandiose empire qui nous a tant donné offre à son apogée le spectacle d’une perpétuelle empoignade.
Cela commence avec César, assassiné cinq ans après sa prise de pouvoir. Son petit-neveu Auguste est assez chanceux pour mourir dans son lit après un long et glorieux règne. Mais dans le demi-siècle qui suit, de 14 à 69 de notre ère, quel carnage ! Sept empereurs et des meurtres en cascade.
Le poison et le poignard triomphent à la cour… Ce qui n’empêche pas les citoyens de vaquer à leurs affaires, tout comme les cinquante millions de sujets qui font allégeance à Rome, des îles britanniques à l’Euphrate.
César et Auguste, deux destins très différents
L'empereur Auguste est traditionnellement associé dans l'imaginaire occidental à son grand-oncle et père adoptif Jules César.
Les empereurs romains qui leur ont succédé pendant quatre ou cinq siècles n'ont jamais manqué d'associer les noms de César et Auguste à leur titulature... et nous nous les remémorons chaque été en juillet, le mois de Jules (César) et août, le mois d'Auguste.
Pourtant, il n'est guère de personnalités et de destins aussi dissemblables.
Jules César, dilettante issu d'une illustre famille patricienne de Rome, révéla sur le tard son génie militaire, son courage et son charisme.
Promptement assassiné par ses adversaires après cinq ans de dictature, il eut néanmoins le temps de réformer la République sénatoriale et d'ouvrir la voie au successeur qu'il s'était choisi en la personne de son petit-neveu.
Auguste, de son vrai nom Octave, est le fils d'un notable romain et de la nièce de César.
Il a seulement 19 ans à la mort de celui-ci, en 44 av. J.-C.. Il va user de toutes les ressources de son esprit rusé pour éliminer ses rivaux et ses propres alliés et assurer sur Rome et ses immenses possessions un pouvoir sans partage.
Retors et brutal, homme à femmes quelque peu pervers, pleutre sur le champ de bataille, cruel à l'égard des vaincus, Octave témoigne néanmoins dès ses jeunes années d'une habileté politique qui lui permet de l'emporter sur de fortes personnalités, des hommes mûrs et des guerriers tels que Brutus, Marc Antoine et Cicéron.
À la différence de César, il a l'habileté de respecter les formes républicaines du régime et de ne jamais prétendre à la monarchie, de façon à ne pas contrarier les ambitions personnelles du millier de sénateurs qui aspirent à suivre la carrière des honneurs jusqu'au consulat.
Il se contente de concentrer entre ses mains toutes les magistratures utiles et se satisfait du titre de Princeps senatus (le « premier du Sénat ») qui lui est attribué en 28 av. J.-C. (nous en avons tiré le mot prince).
Une fois son pouvoir bien établi, il va cultiver jusqu'à sa mort l'image d'un patriarche bienveillant et aux mœurs frugales, attentif à préserver la paix civile et soucieux d'éviter les guerres de conquête inutiles.
Trois mariages et pas d'héritier direct
Auguste, heureux dans presque toutes ses entreprises, a cependant échoué à assurer la transmission héréditaire du pouvoir en dépit d'une réputation méritée d'homme à femmes et de trois mariages...
Encore désigné sous le nom d'Octavien, le futur empereur épouse d'abord, vers 42 av. J.-C., la très jeune Claudia (ou Clodia) pour sceller son alliance avec Marc Antoine, ancien lieutenant de César.
Claudia est la belle-fille de Marc Antoine, née d'un premier mariage de son épouse Fulvie. Mais Octavien se fâche avec Fulvie et lui retourne sa fille en assurant ne pas avoir consommé le mariage.
Peu après, il se marie avec Scribonie (ou Scribonia), veuve d'un premier mari et séparée du deuxième dont elle a eu deux enfants. Avec Octavien, elle a une fille, Julie. Ce sera le seul enfant légitime de l'empereur.
Mais la naissance, au lieu de souder le couple, a pour effet de le dissocier. Reprochant à Scribonie son inconduite, Octavien se sépare d'elle le jour où naît leur fille, en octobre 39 av. J.-C...
Le goujat, qui a 25 ans, songe déjà à se remarier.
Il a des vues sur Livie (Livia Drusilla), une aristocrate d'environ 18 ans aussi fine que belle. Certes, elle est mariée à un patricien éminent, Tiberius Claudius Nero, dont elle a déjà eu un fils, Tibère, et dont elle porte le deuxième enfant, un garçon qui sera prénommé Drusus. Mais c'est un détail sans importance pour le maître de Rome. Il l'oblige à divorcer et l'épouse sur le champ.
Leur union sera longue et plutôt heureuse, ne s'éteignant qu'à la mort d'Auguste, 52 ans plus tard, mais elle restera stérile.
Faute de fils pour lui succéder, l'empereur marie dans un premier temps sa fille Julie (14 ans) avec le fils de sa sœur Octavie, Marcus Claudius Marcellus. Mais celui-ci meurt prématurément deux ans plus tard.
Auguste demande alors à son ami et complice Agrippa (Marcus Vipsanius Agrippa) de bien vouloir consoler sa fille. Agrippa (43 ans) se sépare donc de sa précédente épouse et se marie avec Julie (17 ans), non sans réticence car si sa nouvelle épouse est belle, elle est aussi réputée pour son inconduite. Le couple aura cinq enfants en dix ans, avant que ne meure Agrippa ; trois garçons : Gaius Caesar, Lucius Caesar, Agrippa Postumus, et deux filles : Julie et Agrippine.
Auguste place ses espoirs en Caïus et Lucius pour lui succéder et les adopte dès avant leur naissance. À la mort de leur père Agrippa, en 12 av. J.-C., il confie à son beau-fils Tibère le soin d'élever les deux garçons. Quand ils arrivent à l'âge de quinze ans, il les présente au Sénat et les fait nommer consuls !
Surnommés les « Princes de la Jeunesse » (principes iuventutis), Caïus et Lucius ont toutes les qualités souhaitables.
Les Romains les adulent et leur élèvent des statues et des temples, comme la magnifique Maison Carrée de Nîmes. Mais le sort s'acharne sur la famille d'Auguste : Lucius meurt à Marseille en l'an 2 de notre ère et son frère aîné l'apprend alors qu'il se bat contre les Parthes.
Profondément affecté, il se laisse blesser et fait dire à l'empereur qu'il se démet de tous ses titres. Il meurt sur le voyage du retour, en Lycie (Asie mineure).
Le vieil empereur encaisse ce coup du sort sans sourciller et adopte en vue de sa succession son troisième petit-fils Agrippa Postumus. Sur les instances de Livie, il adopte aussi et surtout son beau-fils Tibère, un homme capable mais avec lequel il n'a guère d'affinités. Il lui demande en prime d'épouser sa fille Julie, veuve d'Agrippa. Tibère s'exécute bien que profondément amoureux de sa première épouse, Vispania.
Auguste ne s'en tient pas là. Afin de ne pas complètement éliminer sa lignée, il impose à Tibère, qui a déjà un un fils de Vispania, Drusus II, d'adopter son neveu Caïus Julius Caesar. C'est le fils aîné de son frère Drusus et d'Antonia la Jeune, nièce de l'empereur (elle est la fille de sa sœur Octavie et de Marc Antoine).
Ces arrangements de fin de règne vont tourner court : en 6 de notre ère, l'empereur septuagénaire choisit d'exiler son petit-fils à Sorrente puis sur l'île de Pianosa en raison de son caractère violent et de ses relations troubles avec sa soeur Julie la Jeune. Celle-ci ainsi que sa mère Julie l'Aînée, la propre fille de l'empereur et l'épouse de Tibère, sont exilées à leur tour sur l'île de Pantadaria (aujourd'hui Ventotene) puis assignées à résidence à Rhegium, en Calabre, en raison de leur inconduite notoire.
L'empereur s'éteint en pleine gloire à 76 ans, le 19 août de l'an 14 après J.-C., dans les bras de Livie. Déjà honoré comme le « Père de la Patrie », il reçoit sitôt après sa mort les honneurs de l'apothéose, c'est-à-dire qu'il est hissé au rang des divinités.
Embrouilles familiales
C'est en définitive Tibère qui hérite à 56 ans de l'oeuvre immense de César et d'Auguste ! Rome lie son destin pour un demi-siècle à la dynastie julio-claudienne, issue tout à la fois de la gens Julia (Auguste) et de la gens Claudia (Livie).
Pendant un quart de siècle, Tibère va administrer l'empire avec sagesse, malgré l'atmosphère sulfureuse du palais et les complots dont il est la cible. Les plus violents sont le fait du préfet Séjan, un parvenu en lequel il a mis toute sa confiance.
Faut-il s'en étonner ? Quelques mois après son accession au principat, Agrippa Postumus trouve la mort dans son lointain exil, sans doute sous l'effet du poison. Julie, indigne épouse mais tout de même aussi seul enfant du divin Auguste, meurt pareillement.
Ces deux assassinats seront inscrits au passif de Tibère par les historiens Tacite et Suétone mais sans doute ont-ils été plus vraisemblablement ordonnés par sa mère Livie, pour des raisons d'État et par haine personnelle.
Tibère s'inquiète pour sa part de la popularité grandissante de son neveu et successeur présomptif Germanicus, ainsi surnommé du fait de ses victoires sur les Germains. Marié à Agrippine l'Aînée, fille de Julie et Agrippa, il est plus proche que l'empereur du divin Auguste.
Pour prévenir une révolution de palais, Tibère l'envoie en mission en Asie mineure avec pleins pouvoirs sur les gouverneurs locaux, en vue de pacifier l'Arménie. Dans le même temps, sans doute sur une recommandation de Livie, il nomme son confident Pison (Cneius Calpurnius Piso) gouverneur de Syrie.
Très vite, les deux hommes en viennent à se disputer. Germanicus chasse Pison de sa province mais tombe malade au retour d'un voyage en Égypte en 19 de notre ère. Dans son agonie, il accuse Pison de l'avoir empoisonné. Agrippine ramène ses cendres à Rome et obtient de Tibère la mise en accusation de Pison. Ce dernier se réfugie dans le suicide.
La guerre fait rage entre Séjan et Agrippine l'Aînée, qui en veut à l'empereur d'avoir laissé empoisonner son mari. Tibère s'en va prendre du repos sur l'île de Capri, dans le golfe de Naples, et laisse les mains libres au préfet du prétoire Séjan. Celui-ci fait déporter Agrippine l'Aînée sur l'île de Pandataria et envoie son fils Nero sur l'île de Pantia où il le contraint de se suicider. Drusus III, deuxième fils de Drusus et Agrippine, est enfermé sous la colline du Palatin.
Tibère, à Capri, se montre affligé par ces sanctions malgré les arguties de Séjan. Il appelle auprès de lui le troisième et dernier fils de Germanicus et Agrippine, Caius Caesar Germanicus, surnommé « Caligula » par les légionnaires du temps où il accompagnait son père à la guerre. Sur lui reposent les espoirs de perpétuation de la famille julio-claudienne.
Là-dessus, coup de théâtre. Antonia, veuve de Drusus et mère de Germanicus, plaide la cause de ses petits-fils auprès de Tibère. En désespoir de cause, elle lui révèle comment est mort en 23 de notre ère, à 36 ans, Drusus II, le fils que l'empereur a eu de sa première épouse, Vispania.
Drusus II avait percé très tôt l'ambition démesurée de Séjan et les deux hommes en étaient venus aux mains. Séjan, pour se venger, avait alors séduit Livilla, fille d'Antonia et épouse de Drusus II, et l'avait convaincue d'empoisonner son mari en lui promettant le pouvoir !...
Trahi par celui en qui il avait placé toute sa confiance, Tibère va se montrer impitoyable. Il rentre à Rome, fait condamner Séjan par le Sénat et l'exécute sur place. Il ordonne aussi la mise à mort de tous ses proches, de sa famille et de ses enfants, une mesure cruelle mais sans doute justifiée pour prévenir une vengeance ultérieure.
Suétone (70-130), chroniqueur tardif, soucieux de ménager le Sénat et donc de salir la mémoire de Tibère, prend plaisir à exagérer l'ampleur de la répression avec des détails comme celui-ci : « Quant aux vierges, comme une ancienne coutume défendait de les étrangler, le bourreau les violait d'abord et les étranglait ensuite » (Vie des douze Césars).
Fuyant les complots, Tibère choisit de demeurer pour de bon à Capri... sans toutefois se livrer aux
Il s'applique à protéger le jeune Caligula mais laisse son frère Drusus III mourir de faim sous le Palatin, son implication dans un complot contre l'empereur étant avérée.
Au printemps 37, le 16 mars, comme il se déplace en Campanie, le voilà qui étouffe et s'évanouit, victime d'une crise cardiaque. On le croit mort. Las, il revient à lui. Jugeant qu'il avait assez vécu, le nouveau préfet du prétoire Macron (aucun lien de parenté avec un président de la République) prend le parti de l'étouffer. Il a 79 ans.
Excès en tous genres
L'avènement de Caligula (25 ans) se présente sous les meilleurs auspices. Le jeune homme desserre les cordons de la bourse et proclame une amnistie générale. Il va aussi récupérer les cendres de sa mère et de son frère pour les déposer dans le Mausolée d'Auguste, à Rome.
Mais le rêve ne dure pas. Au bout de sept ou huit mois, en octobre 37, son attitude change du tout au tout, sans doute à la suite d'une maladie neuronale. Il devient imprévisible, violent et outrancier. Sa première victime est un courtisan qui avait promis de donner sa vie pour la guérison de l'empereur. Caligula le force à honorer sa promesse et se tuer...
L'empereur se fait adorer comme un dieu, donne le titre de consul à son cheval préféré, vit maritalement avec sa soeur Drusilla et exile les deux autres, Agrippine la Jeune et Livilla. Il enferme les épouses des patriciens dans un lupanar de son palais pour les déshonorer et tenir leur mari à sa merci. Il assassine aussi d'excellents citoyens pour s'approprier leurs richesses.
On lui prête l'exclamation : « Qu'ils me haïssent pourvu qu'ils me craignent ». Mais sans doute n'a-t-il pas su se faire assez craindre car il est assassiné à 28 ans, le 24 janvier 41, dans un couloir menant au théâtre, par des officiers de sa garde prétorienne qui ne supportaient plus les humiliations dont ils étaient l'objet.
Maîtres de l'empire et ne sachant qu'en faire, les prétoriens décident, sur la suggestion d'un simple soldat, de le remettre à l'oncle de l'empereur défunt, Claude (50 ans). Ils le repèrent caché derrière une tenture et tremblant de subir le sort de Caligula et des autres membres de sa famille.
Claude, frère cadet de Germanicus, est le fils de Drusus et Antonia la Jeune. Il est petit-fils de Livie par son père, d'Octavie et Marc Antoine par sa mère. Son bégaiement lui a permis de vivre à l'écart des complots. Une fois au pouvoir, il va administrer sagement l'empire en restaurant les traditions et en répartissant les secrétariats entre ses affranchis, Pallas, Narcisse, Callistus et Pallas.
Mais il va être victime de sa libido. Marié plusieurs fois, Claude a eu de sa première femme une fille qu'il fait exposer, la soupçonnant d'être le fruit d'un adultère ! Bien entendu, il a répudié cette première épouse et également la seconde. Mais ce fut pour épouser ensuite Messaline (14 ans), dont il a eu deux enfants, Octavie et Britannicus.
Petite-fille d'Antonia la Jeune, Messaline témoigne de moeurs extrêmement libres comme beaucoup de matrones de la haute société romaine de cette époque. L'historien Suétone, qui ne porte pas la dynastie julio-claudienne en grande estime, l'accuse de tuer ses amants et ses rivales ainsi que de se prostituer au vu et au su de l'empereur dans les lupanars du Trastevere (de l'autre côté du Tibre).
Narcisse, qui l'a d'abord soutenue, finit par craindre pour sa vie. En 48 de notre ère, avec les autres affranchis, il fait croire à Claude que les augures ont prédit la mort du « mari de Messaline » dans l'année. Messaline est entraînée dans une mascarade de noce avec son amant du moment, au cours de laquelle elle répudie l'empereur ! Là-dessus, Claude survient et la fait mettre à mort. Elle a 23 ans.
Claude, qui approche de la soixantaine, ne veut pas en rester là et jette son dévolu sur sa nièce Agrippine la Jeune, de vingt-six ans sa cadette. Elle est la soeur du défunt Caligula et l'un des neuf enfants de Germanicus et Agrippine l'Aînée. Par sa grand-mère maternelle Julie, elle descend en ligne directe d'Auguste. Par sa grand-mère paternelle Antonia l'Aînée, elle descend de Marc Antoine.
Agrippine a été mariée une première fois à 14 ans à son oncle Domitius Ahenobarbus, fils d'Antonia l'Aînée. Il lui a donné un fils, Néron (Lucius Domitius Ahenobarbus), né le 15 décembre 37, avant de la laisser veuve trois ans plus tard.
Quand Claude lui offre le mariage, Agrippine est la maîtresse de son affranchi Narcisse. Le vieil empereur va très vite tomber sous la coupe des amants terribles.
Dans le désir de livrer l'empire à son fils unique, Agrippine obtient pour son fils la main d'Octavie, fille de Claude. L'union est célébrée en 53 mais ne sera jamais consommée. Puis elle convainc Claude de l'adopter et fait éloigner Britannicus, le propre fils de l'empereur. La même année, elle se fait attribuer par le Sénat le titre prestigieux d'Augusta que seule avait possédé jusque-là Livie, l'épouse d'Auguste.
Mais l'empereur finit par s'inquiéter de ses agissements. Il désigne Britannicus comme son héritier. Agrippine l'apprenant le fait empoisonner dans la nuit du 12 au 13 octobre 54 en lui servant, dit-on, un plat de champignons vénéneux. Elle cache sa mort pendant quelques heures, le temps qu'arrive la garde prétorienne. Alors, elle les encourage à proclamer Néron empereur en leur offrant une coquette somme d'argent.
Empereur à 17 ans, assisté du sage Sénèque, Néron se montre d'abord bienveillant et débonnaire. Il n'en fait pas moins assassiner Britannicus quelques mois après son accession au pouvoir afin d'éliminer un rival dont pourrait se servir sa propre mère.
Se méfiant de plus en plus de celle-ci, il chasse du Palatin (la résidence impériale) son amant Pallas, l'un des anciens affranchis de Claude, puis Agrippine elle-même.
Le temps passant, Néron ne tarde pas à céder aux délices troubles du pouvoir absolu. Il prend son épouse Octavie en haine et, avec des compagnons d'orgie, va s'encanailler dans le Trastevere.
Il noue aussi une liaison avec la belle Poppée Sabrina, une femme plus âgée que lui, mariée à son compagnon de débauche Othon (il sera le deuxième et éphémère successeur de Néron à la tête de l'empire).
À l'instigation de sa maîtresse et sans doute aussi sur les conseils de Sénèque qui s'inquiète de l'autoritarisme d'Agrippine, il décide d'assassiner celle-ci en 59. Mais la chose s'avère compliquée car Agrippine est sur ses gardes et se méfie du poison...
Voilà donc comment il aurait procédé selon Suétone :
« Il imagina enfin un navire à soupape, construit de manière à ce qu'elle pérît noyée ou écrasée dans sa chambre. Il feignit donc une réconciliation, et l'invita, par une lettre des plus tendres, à venir à Baies célébrer avec lui les fètes de Minerve. Il eut soin de prolonger le festin, pour donner aux commandants des navires le temps de briser, comme par un choc fortuit, ainsi qu'ils en avaient l'ordre, la galère liburnienne qui l'avait amenée ; et quand elle voulut s'en retourner à Baules, il lui offrit, au lieu de sa galère avariée, le vaisseau construit pour sa perte. Il l'accompagna gaîment jusqu'au navire, lui baisa même le bout des seins en la quittant, et veilla une partie de la nuit, attendant avec anxiété le résultat de cette machination. Quand il apprit comment tout s'était passé, et qu'Agrippine s'était échappée à la nage, il ne sut plus que faire. Bientôt L. Agérinus, affranchi de sa mère, étant accouru, tout joyeux, lui annoncer qu'elle était sauvée, il jeta près de lui un poignard sans qu'il s'en aperçût, et il ordonna de le saisir et de le garrotter, comme un assassin envoyé par elle ; puis il fit tuer sa mère, et dit qu'elle s'était donné la mort, en voyant ce crime découvert » (Vies des douze Césars).
Là-dessus, en 62, Néron répudie Octavie pour stérilité et, douze jours après, se remarie avec Poppée. Mais la plèbe regrette Octavie et s'en prend à Poppée. L'empereur fait alors condamner et exécuter son ex-épouse sur la base de fausses accusations.
Néron, sous l'influence de Poppée, devenue sa femme, sombre dans la démesure, voire la démence. Il prend part aux jeux du cirque et fait des tournées de chant...
Il tente mais en vain d'entretenir sa popularité auprès de la plèbe et de l'armée en multipliant les spectacles et les prodigalités. Pour cela, il dépouille les sénateurs. L'un de ceux-ci, Pison, conspire contre l'empereur.
Il est démasqué par le nouveau préfet du prétoire Tigellin et tué en 65, ainsi que ses soutiens supposés, Sénèque, qui est contraint de s'ouvrir les veines, Lucain, Pétrone...
La même année, Poppée s'étant moquée de lui, il lui donne un coup de pied dans le ventre alors qu'elle est enceinte et elle décède peu après (c'est du moins ce que racontera beaucoup plus tard l'historien Suétone qui n'est en rien objectif). Qu'à cela ne tienne, bisexuel, Néron épouse en grande pompe un homme.
Enfin, lassé de tout, il part en Grèce participer aux Jeux Olympiques de 66. Il en revient en ayant triomphé dans toutes les épreuves - faut-il s'en étonner ? -.
Des rébellions éclatent dans différentes cités de l'empire. Néron est déclaré ennemi public par le Sénat. Se voyant perdu, il supplie son secrétaire Épaphrodite de le tuer. « Quel artiste meurt avec moi ! » aurait-il alors murmuré. Sa mort met fin à la dynastie julio-claudienne et ouvre une brève période de guerre civile, l'« année des quatre empereurs ».
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Cette carte montre l'empire romain dans sa plus grande extension (fin du Ier siècle après J.-C.). Au centre de cet immense empire était la mer Méditerranée, que les Romains appelaient avec orgueil et non sans justesse Mare Nostrum (Notre mer).
Cet empire est aujourd'hui éclaté en États rivaux que divisent la langue, la politique, la religion, la société et l'économie.
Vos réactions à cet article
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Grabinoulor (27-03-2016 23:36:13)
Il me semble que Marguerite Yourcenar, dans son ouvrage passionnant Les Mémoires d'Hadrien, affirme l'homosexualité d'Hadrien au point que sa femme se consolait qu'il la trompâ, puisque c'était avec un homme !
Quelqu'un pourrait-il confirmer ?
Gilles (17-02-2016 21:26:01)
Il n'est vraiment de valeurs que d'hommes dans cette Histoire romaine délirante, et l'on peut dire actuellement qu'il nous manque ces valeurs et l'homme qui doit aller avec! Espérons le au plus vite!
GM