La Chine populaire

La dernière dynastie...

Mao Zedong (55 ans) proclame le 1er octobre 1949 l'avènement de la République populaire de Chine.  la présidence d'une Chine presque totalement réunifiée. Son fidèle Zhou Enlai devient le chef du gouvernement. 

Cumulant les fonctions de président du Parti communiste chinois et de président de la République, le leader chinois jouit d'une autorité sans partage sur le pays le plus peuplé du monde (un cinquième de l'humanité). Il peut tirer fierté d'avoir rétabli l'unité de l'Empire du Milieu, Taiwan excepté, et d'avoir libéré la Chine de toute immixtion étrangère après cent cinquante ans d'humiliations, d'appauvrissement et de guerres civiles en tous genres.

La stabilité retrouvée fait penser à un changement de dynastie comme il s'en produit en Chine tous les trois siècles après une longue période d'anarchie. Mais cette stabilité n'est que de façade. Les exécutions des opposants politiques et les tensions nées de la confiscation des terres vont faire des victimes par millions.

André Larané

De la dynastie mandchoue à la République populaire

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Le 10 octobre 1911 (« Double-Dix »), des troupes républicaines renversent la dynastie mandchoue (Qing). Au terme d'une longue guerre civile, ponctuée par la Longue Marche et la terrible invasion japonaise, les communistes s'emparent du pouvoir en Chine continentale...

Un pays dévasté

Pendant plus de vingt ans se sont opposés les frères ennemis de la République, Mao Zedong, leader du Parti communiste chinois, et Tchang Kaï-chek, chef du parti nationaliste Guomindang. Ce parti, créé par le fondateur de la République, Sun Yat-sen, a été victime de l'usure du pouvoir et s'est corrompu. Battu, Tchang Kaï-chek a dû se réfugier à Taïwan (l'île de Formose) sous la protection de la flotte américaine.

La Chine dont s'emparent les communistes en 1949 figure avec la Corée (!) parmi les pays les plus pauvres du monde. Elle compte 95% de ruraux et le revenu par habitant est la moitié de celui des Africains selon l'économiste Michel Aglietta.

Chacun avait oublié que la Chine fut jusqu'à la fin du XVIIIe siècle le plus riche pays du monde, héritier d'une grande civilisation plurimillénaire. Quelques décennies plus tôt, les dames patronnesses de la bourgeoisie occidentale s'honoraient de tricoter des lainages pour habiller les petits Chinois... que les agissements mercantiles de leurs conjoints avaient réduits à la misère. Plus rien ne subsistait de la séduction exercée par l'Empire du Milieu sur les Européens, de Marco Polo aux philosophes des Lumières.

Malheureusement, les communistes chinois eux-mêmes, nourris de la doxa marxiste-léniniste, ignoraient très largement ce lointain héritage. Il en allait tout autrement des gens du Guomindang. Attachés aux traditions nationales, ils eurent soin de rafler un maximum d'oeuvres d'art et de les amener avec eux à Taiwan. Grâce à quoi ce patrimoine échappa aux ravages de la « Révolution culturelle ». C'est ainsi qu'aujourd'hui, l'immense musée de Taipeh demeure le plus grand conservatoire d'art chinois au monde. 

À Pékin, Mao, en bon stalinien, mit d'emblée l'accent sur l'industrie lourde et les « biens premiers » (santé, éducation) indispensables à la cohésion sociale. L'échec fut cinglant. En 1956, pour tenter d'apaiser les revendications, il encouragea chacun à critiquer les défauts du régime et lança la « campagne des Cent-Fleurs ». Mais l'ampleur des critiques et, concomitamment, le soulèvement des Hongrois contre l'oppression soviétique ne manquèrent pas d'inquiéter les dirigeants chinois.

Ils changèrent de visage et lancèrent une féroce campagne « antidroitière » avant d'inaugurer en 1958 le « Grand Bond en avant ». Cette entreprise folle se donna pour but de rattraper le niveau de la Grande-Bretagne par la mise en oeuvre, sous la contrainte, de toutes les ressources productives du pays ! L'effet fut des plus dramatiques avec d'épouvantables famines qui firent plusieurs dizaines de millions de victimes.

En marge de cette campagne, le gouvernement introduisit le hukou, un passeport intérieur qui assignait chacun à son lieu de résidence et surtout établissait une distinction entre les détenteurs d'un hukou urbain, qui pouvaient accéder à une grande variété d'emplois, et les détenteurs d'un hukou rural, astreints à des emplois mineurs. L'urbanisation et l'industrialisation, au siècle suivant, allaient conduire des dizaines de millions de ruraux à bafouer la loi et s'établir en ville dans le statut inconfortable d'immigrés clandestins (nongmingong ou « paysans ouvriers »)...

En 1960, les communistes chinois se brouillent avec le « Grand Frère » soviétique. La rupture et le retrait brutal des experts soviétiques occasionnent une nouvelle récession et entraînent les deux pays au bord de la guerre. Dans une ultime tentative pour sauver son pouvoir, le président Mao, surnommé le « Grand Timonier », lance en 1966 les jeunes à l'assaut des institutions politiques. C'est la « Révolution culturelle », une nouvelle source de drames.

Le retour en force de l'« Empire du Milieu » (Zhongguo)

À la mort de Mao, en 1976, l'échec du communisme dogmatique est patent. Avec un cinquième de la population mondiale, le pays ne pèse guère plus de 3% du PNB mondial et il ne manque pas de prophètes pour prédire une famine catastrophique... Mais au fond de l'abîme vont apparaître des dirigeants pragmatiques, sous la conduite de Deng Xiaoping, qui a lui-même, à 72 ans, connu des disgrâces et des épreuves sans nom mais s'en est toujours relevé. 

Le « petit timonier » (1,50 mètre) entreprend de moderniser à marches forcées le pays en faisant confiance à l'initiative individuelle. Il allège le poids de l'État sur les entreprises, rend la propriété de la terre aux paysans, fait entrer la Chine au FMI et à la Banque Mondiale, crée quatre Zones économiques spéciales, des zones franches sans impôts destinées à accueillir les investissements étrangers. Dans le même temps, désireux de prévenir la surpopulation, il instaure la politique de l'enfant unique, sans voir que la fécondité des Chinoises est déjà en chute libre (2,5 enfants par femme en 1980). 

La croissance économique va dès lors s'accélérer et se maintenir durablement au-dessus de 10% par an, la Chine devenant l'atelier du monde et, dans un premier temps, le pourvoyeur de l'Occident en artefacts bon marché (pacotille, vêtements ordinaires, etc.). Pas moins de cinq cent millions de personnes sont ainsi arrachées à la pauvreté absolue.

Les exportations chinoises sont soutenues par l'État qui continue de piloter tout le système bancaire. Au lieu de convertir en monnaie chinoise les devises étrangères procurées par ces exportations, lesdites banques les prêtent au Trésor américain, en déficit du fait de ses engagements militaires au Vietnam et ailleurs. Il s'ensuit que la monnaie chinoise, le yuan, demeure à un taux de conversion très bas et garantit donc aux produits chinois une compétitivité sans égale.

En 2001, la Chine populaire est accueillie dans l'OMC (Organisation mondiale du Commerce) bien qu'elle ne respecte en aucune façon le libéralisme économique. Pour les industriels occidentaux, l'opération vise à faciliter leurs investissements dans le pays et exploiter au mieux la main-d'oeuvre chinoise à bas prix. Il s'ensuit une désindustrialisation à tout va de l'Europe et de l'Amérique, les multinationales s'offrant le luxe de produire en Chine à des coûts chinois et de vendre en Occident à des prix européens, avec une marge phénoménale pour leurs actionnaires.

L'État chinois n'en garde pas moins le contrôle de ses grandes entreprises, y compris dans l'internet. Lui-même, fort de ses excédents commerciaux, ne se fait pas faute de racheter en Occident les entreprises de haute technologie destinées à combler son retard industriel. C'est ainsi qu'en ce début du XXIe siècle, le pays a pu se hisser à l'avant-scène de l'économie planétaire, un succès que symbolisent les Jeux Olympiques de Pékin, en 2008, les Nouvelles routes de la soie et la conquête spatiale.

Le Parti communiste n'en continue pas moins de tenir solidement les rênes du pouvoir. La libéralisation politique n'est pas d'actualité mais la Chine retrouve la place qui est la sienne depuis deux millénaires, la première, et remet à l'honneur son passé national. 

Publié ou mis à jour le : 2022-01-12 19:38:42
riussi (01-01-2014 16:07:26)

le XXème siècle nous aura donc fourni les monstres les plus abominables de l'histoire -au tout premier rang desquels Mao (qui n'a nullement "sorti son peuple de l'ombre"!). Les ouvrages les mieux documentés ("Stèles" de Yang Jisheng et la biographie "Mao" de Jung Chang et Jon Halliday) démontent parfaitement le mythe et ramènent l'homme à ce qu'il était: un dictateur sanguinaire sans élévation. Quant à tous ses anciens adorateurs occidentaux -la plupart encore bien en vue, tirant même parti de leur délirant engagement, comme Rollin et ses "tigres de papier"- ils reposent la même question que ceux qui les avaient devancés en idolâtrie communiste: comment une élite de la pensée française a-t-elle pu à ce point se fourvoyer ? Avec en annexe celle-ci: pourquoi n'avoir que si peu analysé un tel criminel aveuglement ?

Gérard Morin (31-12-2013 13:24:22)

Il faut rester sérieux quand même! Oser amalgamer Mao, Staline et Pol Pot à Louis XIII ou Louis XIV est tout simplement indécent. Il n'y aurait guère d’équivalent, quant au nombre de morts, ... Lire la suite

jean-marie (31-12-2013 10:32:06)

Ce n'est pas l'article qui est anti-communiste, c'était Mao lui-même qui, à l'instar de Staline Brejnev et autres Poutine, a accaparé le pouvoir pour son intérêt et celui de ses mandarins (dont ... Lire la suite

maurice (30-12-2013 23:36:35)

Article intéressant , nous faisant découvrir le vrai Visage de Mao Zedong, qui certes sortit son Peuple de l'ombre , mais il abusa de son Pouvoir dictatorial par la soumission des Chinois dans d'ho... Lire la suite

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