Albert 1er (1875 - 1934)

Le roi-chevalier

Le roi des Belges Albert 1er en 1910 (8 avril 1875, Bruxelles -17 février 1934)Quand Albert 1er devient le troisième roi des Belges, le 23 décembre 1909, à la mort de son oncle Léopold II, la monarchie est au plus mal, frappée par l'impopularité de l'ancien souverain.

Il a scandalisé ses concitoyens par ses frasques mais il a aussi donné à la Belgique, État improbable, un statut de «puissance planétaire» grâce à ses entreprises coloniales.

Albert 1er va quant à lui restaurer l'honorabilité de la famille royale.

Il va surtout, dans les épreuves de la Grande Guerre, offrir à la monarchie ses lettres de noblesse et installer la Belgique à l'avant-scène de la diplomatie européenne.

Son courage et son engagement au service de la paix lui ont justement valu le surnom de «roi-chevalier».

Du bonheur conjugal à la guerre

Quand il est appelé sur le trône, à 34 ans, Albert est déjà un homme mûr. Marié à Élisabeth, duchesse en Bavière, il a trois enfants : Léopold, qui succèdera à son père, Charles, qui assumera la fonction de régent, et Marie-José, dont le mari deviendra le roi d'Italie Humbert II.

La famille offre l'image du bonheur conjugal, de quoi rassurer les Belges après les turpitudes de la fin de règne de Léopold II. Tout bascule avec l'invasion de la Belgique, État neutre, par l'armée allemande, le 4 août 1914.

Le roi prend le parti de résister et exige d'assumer sa prérogative de commander l'armée. En octobre 1914, comme le général Joffre lui ordonne d'évacuer la Belgique avec les débris de son armée, il décide de n'en rien faire et  prend la décision inouïe de se replier sur la ligne de l'Yser, le dos à la mer.

Sur ce territoire grand comme un mouchoir de poche, protégé de l'invasion par l'ouverture des digues et l'inondation de la plaine environnante, il va dès lors résister à l'occupation pendant toute la durée de la guerre.

Albert 1er mène en parallèle une action diplomatique vigoureuse dans le but d'aboutir au plus vite à une paix de compromis. Il soutient le pape Benoît XV dans ses tentatives de conciliation et, en 1917, engage les jeunes princes Sixte et Xavier de Bourbon-Parme dans la plus grande négociation secrète de la guerre, avec la complicité de l'empereur d'Autriche Charles 1er. 

Les deux officiers ont l'avantage d'être les frères de Zita, épouse de Charles 1er et vont user de cette relation familiale pour transmettre les messages entre les négociateurs des deux camps. La négociation va échouer au bout de quatre mois, du fait en particulier du refus de l'Italie de renoncer à ses prétentions territoriales !...

Enfin, le 22 novembre 1918, le «roi-chevalier», la reine et leurs enfants font une entrée triomphale à Bruxelles.

Le devoir

Sans attendre la libération complète du territoire, le 11 novembre 1918, au château de Loppem, le roi reçoit les représentants des principaux partis et met sur pied un gouvernement d'union nationale en vue de reconstruire le pays.

Il soutient l'instauration du suffrage universel, à partir de vingt-et-un ans, qui sera voté en décembre 1918. Il donne aussi son aval à la création, à Gand, d'un établissement d'enseignement supérieur en néerlandais.

Albert 1er intervient comme il va de soi dans les tractations qui vont mener au traité de paix de Versailles, le 28 juin 1919.  À la grande différence des Français et de Clemenceau en particulier, il refuse d'accabler l'Allemagne, digne en cela aussi de son surnom de «roi-chevalier».

Il ne veut pas que soit soulevée la question des atrocités allemandes commises sur son territoire en août 1914 et regrette que son armée participe à l'occupation de la rive gauche du Rhin. Il obtient que soit abrogé le statut de neutralité de 1831, qui a si mal servi la Belgique. Mais c'est à son corps défendant que son pays annexe les districts d'Eupen et Malmédy, en partie francophones et germanophones (ainsi que les petites colonies allemandes du Rwanda et du Burundi).

Deux ans plus tard, il concourt à la signature, le 25 juillet 1921, du traité instituant l'Union économique belgo-luxembourgeoise avec le grand-duché de Luxembourg.

C'est une très lointaine préfiguration du Benelux institué le 5 septembre 1944 avec les Pays-Bas.

Quelque peu las, le roi n'aura pas le loisir de vieillir. Parti en solitaire pour l'ascension d'une aiguille, à Marche-les-Dames, près de Namur, il fait une chute mortelle le 17 février 1934. Il n'a pas encore 59 ans.

Son fils Léopold III (33 ans) lui succède. Servi par la popularité de sa belle épouse, la reine Astrid, il ne témoignera pas, pendant la Seconde Guerre mondiale, du même courage que son père et sera à l'origine d'une grave crise monarchique.

Publié ou mis à jour le : 2020-04-06 11:53:04
lambil (17-02-2014 19:39:15)

En tant que Belge, je m'étonne de cette présentation "fleur bleue" du roi Albert Ier ! Certes fut-il un militaire exemplaire (comme décrit) mais sa diplomatie internationale aurait précipité sa mort: l'abandon de la neutralité par accord militaire avec la France le 7-9-1920, l'occupation la Ruhr en 1923 et le mythe du Roi Chevalier l'ont définitivement rangé parmi les adversaires irréductibles de l'Allemagne. A l'arrivée au pouvoir d'Hitler en 1933, il était favorable à une réoccupation de la Ruhr: sa mort "accidentelle" lors d'un rendez-vous avec un émissaire allemand tombe à pic (pardon du jeu de mots) le 17 février 1934. Le 29 août 1935, c'est son fils le jeune Roi Léopold III qui est victime d'un "accident" de voiture à Küssnacht en Suisse: le Roi conduisait (pas son chauffeur), un "défaut" dans la direction de la Rolls-Royce fait déraper la voiture, blesse le Roi et tue la Reine Astrid (voir les photos sur le net). Conséquence, l'alliance militaire avec la France est dénoncée en 1936 et la Belgique recouvre sa neutralité: l'inviolabilité de son territoire est garantie en 1937 par l'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne. Comment ne pas comprendre les erreurs de Léopold III, notamment son remariage en pleine guerre ?
En politique intérieure, on peut dire que le Roi Albert Ier a couru après le train du nationalisme linguistique flamand: n'oublions pas que la Lettre au Roi du wallon Jules Destrée ("Sire... il n'y a pas de Belges") date du 15 août 1912 !
J'apprécie le travail d'Hérodote mais cette présentation "à la française" du Roi Albert Ier me laisse rêveur...
Au plaisir de partager d'autres Histoires.

J.P. LAFAILLE (17-02-2014 00:07:47)

M. M. FAUCON met l' "indulgence" d'Albert Ier sur le compte de ses liens familiaux avec l'Allemagne. S'il en était ainsi, Albert Ier aurait tout aussi bien pu n'opposer qu'une résistance de principe aux troupes allemandes en 1914 et appliquer une politique de "neutralité perméable".
En fait son attitude raisonnable correspond tout à fait aux positions de J. M. KEYNES ("Les conséquences économiques de la paix" - 1919). En 1919, "Keynes n'était pas encore "LE" Keynes ("Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie" - 1936). Il était le conseiller du négociateur britannique (Lloyd George, Premier Ministre) pour le Traité de Versailles. Il préconisait un traitement raisonnable du vaincu (voir son ouvrage "Les conséquences..." cité ci-dessus), arguant qu'un acharnement conduirait inévitablement à un désir de revanche de l'Allemagne et que, de toutes façons, l'Allemagne serait incapable de payer les indemnités qu'on lui demandait.
Les représentants britannique (Lloyd George, Premier Ministre) et américain (Woodrow Wilson, Président) étaient favorables à cette idée. Par contre, le représentant français (G. Clemenceau, Président du Conseil) se montrera inflexible sur ses exigences tant territoriales que financières : "L'Allemagne paiera" était son leitmotiv. On sait ce qu'il en est advenu une vingtaine d'années plus tard. Sa hargne était vraisemblablement alimentée par le fait qu'il considérait que l'Allemagne était seule responsable de la guerre, ce qui est une vision pour le moins partisane de l'Histoire. Raymond Poincaré, Président de la République, semble pour le moins, avoir "soufflé sur les braises" en 1914. Dame ! Il fallait reprendre l'Alsace et la Lorraine !
Je me permets enfin de citer WIKIPEDIA (http://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_Versailles) :
"La Belgique, qui est le pays qui a connu le plus d'exactions et d'exécutions de civils de la part de l'Occupant, relativement à sa population, est la première nation dédommagée financièrement par l'Allemagne et la seule à l'être totalement, ce qui contribue à sa rapide reconstruction."
Non ! Albert Ier n'a pas fait "de fleurs" à l'Allemagne.

Lerat (29-08-2013 14:44:18)

Est-il vrai que Clémenceau a dit qu'il ne traiterait jamais avec " les Papistes " ????

Claude Pluyaud (29-08-2013 09:49:43)

Article très intéressant.Bonne synthèse mais vous ne faites pas état d'une thèse récente qui remet en cause le role du roi pendant la guerre ( rapport avec l'Allemagne).En tout cas une figure très attachante .

Claude Pluyaud (29-08-2013 09:49:43)

Article très intéressant.Bonne synthèse mais vous ne faites pas état d'une thèse récente qui remet en cause le role du roi pendant la guerre ( rapport avec l'Allemagne).En tout cas une figure très attachante .

Claude Pluyaud (29-08-2013 09:48:31)

Article très intéressant.Bonne synthèse mais vous ne faites pas état d'une thèse récente qui remet en cause le role du roi pendant la guerre ( rapport avec l'Allemagne).En tout cas une figure très attachante .

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