Baron Louis (1755 - 1837)

Un ministre des Finances (presque) exemplaire

Le baron Louis fait partie de ces personnages historiques dont chacun connaît le nom, sans parvenir pour autant à le situer. Il est resté fameux par sa réplique «Faites-moi de bonnes politiques, je vous ferai de bonnes finances» prononcée en conseil des ministres sous Louis-Philippe, mais sa notoriété posthume ne va guère au-delà. Réparons cette injustice...

Michel Psellos

Dans le sillage de Talleyrand

Le baron Joseph-Dominique Louis (1755-1837), gravure d'époqueJoseph-Dominique Louis est le fils d’un avocat au Parlement de Metz, qui fera son chemin dans l’ombre de Talleyrand en profitant des opportunités que la Révolution offrait aux ambitieux.

Né en 1755 à Toul, il commence par être séminariste, devient diacre et sert la messe célébrée par l’évêque d’Autun à la Fête de la Fédération le 14 juillet 1790, ce qui lui vaut d'être d'abord appelé l'«abbé Louis». Comme Talleyrand, il est plus tard excommunié pour avoir signé la Constitution civile du clergé.

Sous la Révolution, sa carrière connaît les hauts et les bas de son mentor. On le trouve un jour représentant de la France au Danemark, puis en exil à Londres après la chute de la monarchie. Il rentre d'Angleterre après l'accession de Bonaparte au Consulat. À Paris, il retrouve Talleyrand, qui s'est lui-même établi aux États-Unis pendant la Terreur.

L’Empire le voit entamer une carrière de haut fonctionnaire dans le sillage de Talleyrand, d’abord dans les services de la Légion d’Honneur puis au ministère des Finances et au Conseil d’État, en qualité de maître des requêtes.

Un financier très demandé

Ses aptitudes en matière financière valent à Joseph-Dominique Louis d'être réclamé par le gouvernement napolitain mais Napoléon refuse de le laisser partir : «Quel est donc cet homme pour lequel tout le monde demande et qui, lui, ne demande rien ?». Il le nomme baron d'Empire en 1809.

L'heureux homme engage en parallèle, pour son compte personnel, une spéculation sur des terrains achetés en bord de Seine à Bercy où, avec deux siècles d'avance, il envisage d'installer le ministère des Finances.

La chute de l'Empire et la Restauration lui permettent de donner toute sa mesure : le 1er avril 1815, Talleyrand, devenu chef du gouvernement provisoire, le nomme ministre des Finances. Il est confirmé à ce poste par le roi Louis XVIII et va l'occuper par intermittence à cinq reprises. Par ailleurs député, il fait des passages dans l’opposition parlementaire lorsqu'adviennent les gouvernements ultra-royalistes et réactionnaires de Villèle et Polignac.

Sa dernière nomination intervient dans le gouvernement Casimir Périer, sous le règne de Louis-Philippe 1er, après qu’il ait contribué à la chute de Charles X. Sa longévité dans la fonction, comparable à celle de son lointain successeur Valéry Giscard d’Estaing, lui a permis d’imprimer sa marque sur le ministère des Finances.

Un surdoué des finances

Le baron Louis appartient, comme VGE, à l’espèce des conservateurs intelligents, nul ne s’attendant d’ailleurs à ce qu’un collaborateur de longue date de Talleyrand fût borné. Son credo est le sérieux dans la gestion des finances publiques, afin de restaurer le crédit de l’État bien entamé par la période révolutionnaire et la banqueroute des deux-tiers qui avait suivi l’expérience des assignats.

En 1815, pour faire des économies budgétaires et épargner au pays une nouvelle banqueroute, il n’hésite pas à démobiliser une grande partie de l’armée impériale qu’il met en «demi-solde». Il rembourse rubis sur l’ongle les dettes du régime précédent en expliquant que «l'État doit être le plus honnête homme de France», ce qui n’allait pas de soi à l’époque, quitte à souscrire dans ce but de nouveaux emprunts publics selon une pratique désormais institutionnalisée.

Le baron Louis (1755-1837), par Yves Guéna (Perrin, 1999)Il modernise la gestion du budget de l’État et celle du «grand livre de la dette publique», ancêtre de l’actuelle agence France Trésor, et crée l’Inspection Générale des Finances qui sera promise à un grand avenir.

Il se montre aussi avant-gardiste dans la gestion de ses finances privées avec sa spéculation heureuse sur les terrains de Bercy, revendus à prix d’or à la faveur des aménagements progressivement effectués en amont de la Seine par les pouvoirs publics parisiens, dans des conditions que l’on qualifierait sans doute aujourd’hui de «délit d’initié».

Cela lui vaut de laisser à ses héritiers une fortune considérable, qui aurait fait les délices des déclarations contemporaines de patrimoine des ministres, et comprend notamment le château de Bry-sur-Marne, acquis sur les conseils de Talleyrand. C'est dans cette petite ville, à l'est de Paris, qu'il est enterré en 1837.

On peut lire sur le baron Louis une très complète biographie signée Yves Guéna (Perrin, 1999).

Publié ou mis à jour le : 2019-11-12 15:13:13

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