S’il est un Borgia qui mérite sa légende noire, c’est bien lui : César, dévoré par l’ambition et la jalousie. Né vers 1476, c'est le deuxième fils de Rodrigo Lançol y Borgia, futur pape Alexandre VI Borgia, et de sa maîtresse Vanozza de Cattanei.
Il n’était pas forcément le champion, celui sur lequel Rodrigo Borgia misait au départ. Sans doute son père voyait-il en lui un jeune chien fou qu’il aurait du mal à contrôler ou à maîtriser.
Le pape préfère son aîné, Juan, celui qui hérite d’emblée de toutes les faveurs car porteur de tous les espoirs de sa race.
Juan a tout juste 18 ans lorsque son père le surcharge d’honneurs, duc, capitaine générale de la garde pontificale, Grand connétable de Naples… Les titres s’accumulent autour de lui aussi vite que la jalousie des princes romains. Et même celle de son frère César, qui lui, n’a reçu que la pourpre cardinalice alors que l’ambition le dévore.
En juin 1497, on retrouve le cadavre de Juan dans le Tibre, les mains liés et le corps lardé d’une dizaine de blessures. Une enquête rapidement menée et aussi vite étouffée fait porter la culpabilité du meurtre sur César, un fait jamais prouvé mais qui correspond bien au personnage tortueux qui inspira Le Prince de Machiavel.
L’avenir s’éclaircit soudain pour le second fils du pape. Ce dernier s’appuie désormais sur lui pour consolider sa politique et étendre la puissance de l’Eglise sur les grandes familles italiennes et les territoires adjacents. César abandonne la prêtrise et devient le bras armé du pontife, une mission qui correspond parfaitement à son caractère belliqueux – le jeune homme importe la tauromachie dans Rome et descend lui-même dans l’arène tuer des bêtes.
Son père est avant tout son patron, il obéit et ramasse l’or et les terres à l’issue des missions, et punit sans vergogne ceux qui bafouent ou insultent le nom des Borgia, à une époque où les coups de dagues sont monnaie courante. À la fin du XVe siècle, le voilà en France, pour remettre à Louis XII les dispenses nécessaires pour épouser Anne de Bretagne. En échange, il obtient le duché de Valentinois et la main de Charlotte d’Albret.
De retour en Italie il est puissant comme jamais. Comme un fauve en chasse, il mène les troupes du pape à travers les provinces pour récupérer les villes des seigneurs déchus. La péninsule est à cette époque tiraillée entre de multiples cités-États, tenues pour la plupart par des princes, et convoitées en partie par les Français (le rêve italien poursuivi jusqu’à François Ier), les Espagnols (au sud) et le Saint Empire romain germanique (au Nord).
Seul le traité du Cateau-Cambrésis, en 1559, apportera une certaine stabilité en sonnant le glas des ambitions françaises tout en installant la pax hispanica sur tout le pays.
En attendant, c’est l’époque des condottiere, ces seigneurs italiens qui se vendent au plus offrant ou qui tentent leur chance en se taillant des principautés à coups d’épée, à l’image des Sforza, des Vitelli ou des Gonzague…
César Borgia nourrit les mêmes rêves, poussé par son père, au gré des alliances souvent éphémères : en quelques années, il est à la tête d’un véritable petit empire en Romagne. Consacré duc de Romagne en 1501, il décide de se débarrasser de ses principaux ennemis et, pour cela, les convoque le 31 décembre 1502 au château de Senigallia et les fait froidement assassiner.
Mais lorsque son père disparaît en 1503, il perd évidemment son premier et seul soutien.
Le nouveau pape Jules II, qui a les Borgia en haine, le fait arrêter et le dépossède de ses biens, consolidant de fait l’État pontifical. À peine sorti de prison, César est de nouveau arrêté par Gonzalve de Cordoue, qui l'envoie au roi d'Espagne, un autre de ses ennemis. Il réussit à s'échapper et se réfugie auprès du roi de Navarre dont il a épousé la soeur. Il part en expédition à ses côtés contre le roi d'Espagne mais tombe dans une embuscade. Il meurt le 12 mai 1507 à Viana (Navarre), transpercé de coups par ses ennemis et abandonné aux bêtes. C’est la fin des rêves de gloire des Borgia.
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