Codes secrets

Déchiffrons-les !

Écrire pour ne pas être compris ! Paradoxalement, depuis qu'il communique, l'homme a cherché à dissimuler par tous les moyens le contenu de ses messages.

La diffusion de l'écriture, si elle a facilité les échanges, a aussi multiplié les personnes capables de déchiffrer missives et notes à caractère confidentiel. Il fallait trouver des systèmes partagés uniquement par des initiés.

C'est dans ce monde des codes chiffrés, des lettres insondables et du secret que nous vous invitons à entrer. Attisez votre logique !

Cylindre de la machine Enigma, Heinz Nixdorf Museum, Allemagne

Le temps des premières ruses

Saura-t-on jamais quand a été créé le premier message crypté ? Était-ce sur les parois des grottes préhistoriques, couvertes de signes toujours indéchiffrables ? Ou plus certainement en Mésopotamie, sur les premières tablettes ayant reçu des traces d'écriture ? On soupçonne en effet un simple potier d'avoir dissimulé les secrets de fabrication de son vernis dans une formule chiffrée.

Les successeurs de Champollion ont eu eux aussi la surprise de découvrir des signes étranges, ne correspondant en rien aux hiéroglyphes connus, comme si des scribes s'étaient amusés à réaliser de faux textes pour tester la perspicacité de leurs collègues !

Plus tard, Grecs et Romains laissent de côté l'aspect ludique du secret pour tirer parti de ses avantages stratégiques : on imagine par exemple, pour lancer la révolte contre les Perses (Ve s. av. J.-C.), de tatouer le crâne d'un esclave puis de laisser repousser ses cheveux... Méthode originale mais qui eut moins de succès que la scytale des Spartiates (IVe s. av. J.-C.), bandelette qui ne redevenait lisible qu'une fois enroulée sur un bâton d'un diamètre précis, ou encore l'encre invisible, en vogue pendant des siècles.

« Un inestimable rompement de cerveau » (Vigenère)

En 150 av. J.-C., l'historien grec Polybe, conseiller de l'armée romaine, a l'idée d'un carré permettant de substituer facilement des chiffres à des lettres.

Représentation d'Al-Kindi sur un timbre syrien

Par la suite, l'importance de ces chiffres dans le cryptage n'a cessé de grandir, comme le montre le fameux « chiffre de César », méthode consistant simplement à décaler les lettres de trois places dans l'alphabet.

Mais ce sont les Arabes qui ont permis au codage de devenir une science et non plus un « art de l'écriture secrète », comme le qualifiait le Kama-sutra (Ve s.).

Au IXe siècle, le grand savant Al-Kindi rédige le premier manuscrit sur le déchiffrement des messages cryptographiques où il met en évidence le principe de l'analyse de fréquence des lettres : plus une lettre est utilisée dans la langue, plus elle sera présente dans le texte secret.

Élémentaire, mais révolutionnaire pour les experts en dissimulation qui n'avaient pas imaginé que leurs méthodes étaient si prévisibles !

Boîte à chiffrer et à déchiffrer en forme de livre aux armes d'Henri II, 1550, musée national de la Renaissance, ÉcouenLes diplomates de la Renaissance ne peuvent plus s'en contenter et incitent donc les inventifs de leur époque à multiplier les difficultés : le marché du secret s'enrichit dès lors de cadrans (Leon Alberti, 1467) et autres carrés (Blaise de Vigenère, 1586) supposés impénétrables.

L'entrée en scène de la logique rend enfin la cryptographie respectable, au point que les gouvernements leur consacrent des « cabinets noirs » au sein de leur administration.

Le temps des spécialistes est arrivé !...

Publié ou mis à jour le : 2020-06-09 17:05:11
jeanne (10-01-2014 18:44:38)

légende : le logo de la firme Apple ?
Quelle en est réellement sa source ?
J'aimais bien la légende..

JEAN MUNIER (07-01-2014 10:21:53)

Désigner un passe-partout par rossignol est un hommage à la famille qui savait trouver les clé des codes

patrick (06-01-2014 22:38:34)

Pour être tout à fait exact, seuls les services polonais et les services français ont travaillé avant la guerre sur la machine Enigma. Dès 1931, un Allemand a fourni à la France, et à travers elle à la Pologne, de précieux renseignements techniques (et en particulier les clés de chiffrement)sur la machine à chiffrer des Allemands Enigma. Son nom : Hans-Thilo Schmidt, nom de code H.E.. Ce n’est que début 1940, que les Polonais ont pu apporter deux modèles reconstitués de cette machine à Paris ; c’est le commandant Bertrand, des services français, qui en apporta une à Londres. C’est à partir de cet exemplaire que les Anglais ont pu développer l’immense travail effectué à Bletchley Park. Le secret qui a entouré l’arrivée de la machine Enigma, fait que les Anglais de ce centre, puis les historiens, en ont ignoré la provenance et le rôle des services français. Jusqu’en 1942, une équipe de déchiffreurs polonais a travaillé en Zone Libre pour intercepter et traduire les liaisons allemandes.

biesse (29-03-2013 21:37:03)

Article très intéressant. Cependant, vous avez oublié de citer la télégraphie de Claude Chappe. Son système était bien crypté, codé; seuls les directeurs sur les lignes étaient en mesure de décoder le message.
cordialement JP Biesse

yvon (27-03-2013 08:45:52)

Durant la guerre de 39-45, l'encodage a joué un rôle important pour la Résistance dans plusieurs pays, dont la France. À ce sujet, voir le livre de Leo Marks, «From Silk to Cyanide» sur le rôle du Special Operatives Executive (SOE).

jacques (27-03-2013 08:45:18)

Un personnage historique important est oublié: François Viette.François Viète naquit à Fontenay-le-Comte en 1540 et mourut à Paris en 1603. D'abord avocat à
Fontenay-le-Comte, il fut, dans la suite, conseiller au Parlement de Bretagne (1567) puis maître des requêtes de l'hôtel du roi (1580). Henri IV le prit comme membre de son conseil privé. Viète resta surtout célèbre par la transformation complète qu'il apporta à l'algèbre, c'est en fait le vrai créateur de l'algèbre. L'algèbre doit à Viète l'usage des lettres pour représenter les quantités, l'intervention des différentes transformations simples qu'on peut faire subir aux équations, l'addition et la multiplication des quantités algébriques ; l'élévation d'un binôme aux différentes puissances, jusqu'à la sixième. Quant à la géométrie, Viète, après avoir su trouver par le calcul les expressions des inconnues, enseigna la manière de les construire.Enfin, il établit les formules des cordes de tous les arcs multiples d'un autre et sut expliquer la présence de toutes les racines étrangères dans les équations des cordes des sous-multiples. Il donna à la trigonométrie sa forme définitive.
Viète ayant été chargé par Henri IV de découvrir la clef des caractères de convention dont se servaient les Espagnols pour correspondre durant les guerres civiles en France, y parvint facilement et trouva même le moyen de suivre le chiffre dans toutes ses variations.

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