Les Huns, de terrible réputation, sont battus aux environs du 20 juin 451, en un lieu que les chroniqueurs ont appelé « Champs Catalauniques » parce qu'ils le situaient aux environs de Châlons-en-Champagne (Duro Catalaunum à l'époque gallo-romaine)...
Aujourd'hui, on croit savoir que la bataille se serait en réalité déroulée près de Troyes, en un lieu appelé « Campus Mauriacus », dans la plaine de Moirey (commune de Dierrey Saint-Julien). Quoi qu'il en soit du lieu exact de la bataille, l'essentiel est qu'elle entraîne l'éviction des Huns hors de Gaule, après une brève mais terrible incursion. Leur départ laisse le champ libre... aux Francs de Clovis.
Brusque apparition
Les Huns sont des nomades de type mongoloïde (asiatique) et de langue ourano-altaïque, quelque peu apparentés aux Turcs.
Surgis de la lointaine Asie, ils s'installent au IIIe siècle de notre ère dans la région du Danube en poussant devant eux les Germains. Sous leur pression, ces derniers se mettent à leur tour en marche vers l'ouest et pénètrent dans l'Empire romain. C'est ainsi qu'en 378, des Germains dénommés Wisigoths franchissent le Danube et attaquent l'armée de l'empereur Valens.
Tandis que les Huns stationnent dans les plaines sauvages d'Europe orientale, l'un de leurs princes, Attila, est élevé à la cour de l'empereur romain d'Orient, à Constantinople, en qualité d'otage. En 434, alors âgé d'une quarantaine d'années, il succède sur le trône des Huns à son oncle Rudas (ou Ruga), au côté de son frère Bleda. Dix ans plus tard, il assassine celui-ci et devient roi de tous les Huns. Quelque peu mégalomane, il s'attribue le titre d'Europæ Orbator (empereur d'Europe).
Attiré par les richesses de l'empire romain à son crépuscule, dont il a mesuré la séduction lors de son séjour dans les palais de la Corne d'Or (Constantinople), Attila arrive sous les murs de Constantinople mais renonce au siège et se contente de la promesse d'un colossal tribut.
Puis il tourne ses regards vers l'Occident gallo-romain. S'ensuit une histoire vaudevillesque...
Vaudeville
Honoria, fille de l'impératrice Galla Placida et soeur de l'empereur romain d'Occident Valentinien III, appelle Attila à l'aide contre son frère. Celui-ci a tué son amant et veut l'envoyer à Constantinople dans un monastère. Honoria, qui n'a pas la réputation d'une oie blanche, promet sa main à Attila et lui envoie sa bague en signe de fiançailles.
Dans le même temps, le roi des Vandales, Genséric, encourage Attila à attaquer le royaume rival des Wisigoths de Toulouse. Attila ne se le fait pas dire deux fois. Il accepte la bague d'Honoria et réclame la Gaule en guise de dot. Bon prince, il propose à Valentinien III de s'allier à lui contre les Wisigoths. Mais l'empereur repousse son offre et préfère faire alliance contre lui avec les Wisigoths.
C'est ainsi que le roi des Huns franchit le Rhin et envahit la Gaule à la tête d'une colossale armée de 200.000 hommes de toutes origines (Huns mais aussi Germains, tels que Gépides, Skires, Suèves, Francs....), non compris les troupeaux de chevaux et de boeufs qui servent de garde-manger. Metz est détruite le 7 avril 451 et ses habitants massacrés.
Tragédie
À Paris, qu'on appelle encore Lutèce, sainte Geneviève, l'une des autorités de la ville, fait valoir à ses concitoyens qu'il est plus judicieux de résister derrière les murailles de l'île de la Cité que de s'enfuir sur les routes où ils seraient immanquablement rattrapés par les cavaliers huns. Elle leur recommande de jeûner pendant trois jours pour s'attirer la bienveillance de Dieu. Ô miracle, celui-ci exauce leurs prières. Attila, considérant en effet que le jeu n'en vaut pas la chandelle, renonce à prendre la ville et poursuit sa marche vers Orléans.
Voilà qu'une armée se porte à la rencontre des envahisseurs, avec à sa tête le « maître de la milice » Aétius, un général romain qui fut son compagnon d'armes dans sa jeunesse, et Théodoric Ier, le roi wisigoth de Toulouse. Attila se replie vers le Rhin mais il est rejoint par la coalition de Gallo-Romains et de Wisigoths aux « Champs Catalauniques ». S'ensuit une mêlée confuse de plusieurs jours, sans véritable vainqueur, où Théodoric trouve la mort.
Le roi des Huns repasse le Rhin, refait ses forces et décide d'enlever Rome, mais le pape Léon Ier le Grand, principale autorité locale, va à sa rencontre aux portes de la ville. Les deux hommes devisent agréablement en latin et le redoutable guerrier se laisse convaincre de rebrousser chemin (quelques mois plus tard, la ville n'aura pas la même chance quand surviendront les Vandales de Genséric).
Attila s'en retourne vers la Pannonie et la région du Danube avec ses troupes, ses trésors, ses troupeaux, ses femmes et ses serviteurs. Il meurt peu après, victime d'une attaque d'apoplexie à moins qu'il n'ait été assassiné par sa concubine de la nuit.
Les Huns sortent de l'Histoire aussi soudainement qu'ils y étaient entrés. Ils n'auront rien fait d'autre que de réveiller et pousser devant eux les tribus germaines éparpillées entre le Rhin et le Dniepr.
Épopée germano-hunnique
Le souvenir des Huns se conserve dans le plus célèbre chant épique de langue germanique, le Chant des Nibelungen, composé au XIIe siècle du côté de l'Autriche. Ce chant est le pendant oriental de la Chanson de Roland ou des Chevaliers de la Table ronde.
Magnifié par un opéra de Richard Wagner, au XIXe siècle, il raconte le sort tragique du chevalier Siegfried, en quête du mythique trésor des Nibelungen et victime d'une vengeance personnelle.
L'épopée mêle plusieurs éléments de l'histoire des Huns, notamment leur victoire sur les Burgondes de la région de Worms, vers 435, et la mort d'Attila, mystérieusement assassiné par une concubine d'origine germanique (burgonde?) du nom d'Hildiko.
Attila, personnage mal connu, se prête à toutes les interprétations. Il demeure un héros très populaire en Hongrie où son prénom est porté par beaucoup d'hommes, car les Hongrois se réclament des Magyars, peuple nomade finno-ougrien apparenté aux Huns.
En Occident, par contre, le dernier roi des Huns garde l'image d'un barbare intégral. Cela vient de ce que les chroniqueurs chrétiens du Moyen Âge l'avaient surnommé le « Fléau de Dieu ». Le fléau est un outil dont se servaient les paysans pour battre les épis de blé et en extraire les grains. De la même façon, selon les clercs de son époque, Attila aurait été envoyé par Dieu pour punir les hommes de leurs péchés et les ramener à lui.
« On me craint, on me hait, on me nomme en tout lieu
La terreur des mortels et le fléau de Dieu », écrit Corneille (Attila, 1667).
Bibliographie
Sur Attila et les principaux acteurs de cette époque pleine de tragédies, on peut lire la biographie romanesque de Maurice Bouvier-Ajam : Attila, le Fléau de Dieu (éditions Tallandier, 1982).
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Voir les 14 commentaires sur cet article
Piguet (21-06-2021 05:27:51)
Ne pas parler Aetius quand on parle d'Atila me semble fautif. Ignoré qu'Atila fut souvent le mercenaire pour mettre les barbares au pas. Pourquoi ne pas dire qu'Aetius et Atila étaient amis et que s... Lire la suite
BONHOURE (25-02-2021 08:37:03)
Dans la légende de Siegfried, après la mort de Siegfried, sa femme Krimhild, se remariera avec Etzel (Attila) le roi des hongrois pour se venger de la mort de son mari.
FRANCOISE (21-06-2018 17:26:10)
Merci. Toujours aussi intéressant.