Le 28 octobre 312, Constantin bat son rival Maxence au Pont Milvius, sur le Tibre, à la sortie de Rome.
Cette bataille entre les deux prétendants à l'empire va s'inscrire dans les mémoires en raison moins de son aspect militaire que de son aspect symbolique : pour la première fois, en effet, le futur empereur Constantin le Grand révèle son empathie pour la religion chrétienne, bien que celle-ci soit encore très minoritaire autour de la Méditerranée.
Une bataille pour Rome
Maxence et Constantin sont les fils de deux tétrarques qui ont gouverné l'empire à l'ombre de Dioclétien. Le premier, Maximien Hercule, s'est retiré volontairement le 1er mai 305, de même que Dioclétien. Le second est mort à York, au cours d'une campagne contre les Pictes, le 25 juillet 306.
S'engage alors une lutte pour le pouvoir dans laquelle s'affrontent et parfois s'allient les héritiers des deux tétrarques ainsi que d'autres militaires d'origine illyrienne, au premier rang desquels Licinius.
Décidé à prendre de vitesse son plus proche adversaire, Constantin quitte sa capitale, Trèves, en Rhénanie, et franchit les Alpes au printemps 312. Il dispose de quelques dizaines de milliers d'hommes, constitués en légions, en régiments de cavalerie (les vexillationes) et en troupes auxiliaires.
Il repousse une première fois la cavalerie de Maxence aux environs de Turin. Enfin, son armée, épuisée, arrive en vue de Rome. Elle campe au nord du Tibre, à trois kilomètres de la colline du Vatican, en face du pont Milvius que franchit la via Flaminia. Ce pont de pierre est toujours visible sous le nom de ponte Milvio.
Maxence aligne face à lui une armée d'importance sans doute comparable. Il a dû détourner de ses troupes vers l'Italie du Nord pour parer à une attaque de revers de Licinius, allié de Constantin. Il appréhende aussi l'hostilité des Romains, irrités par les exactions de ses prétoriens et la rapacité de ses collecteurs de taxes.
Soit que le pont est en mauvais état, soit qu'il est trop étroit, les troupes de Maxence traversent le Tibre sur un pont provisoire constitué de bateaux accolés l'un à l'autre. Une fois de l'autre côté, elles se trouvent trop à l'étroit sur la plaine pour pouvoir manoeuvrer. Constantin en profite. Il lance sa cavalerie à l'assaut et désorganise les troupes ennemies.
Dans la confusion, chacun tente de s'enfuir par le fleuve, Maxence le premier. On retrouve son cadavre le lendemain dans le lit du fleuve.
Vainqueur, Constantin entre à Rome et s'impose comme le seul maître de l'Occident. Il abolit la garde prétorienne qui a soutenu Maxence. Cette troupe d'élite a régulièrement usé de sa force pour faire et défaire des empereurs. Ses soldats sont dispersés dans les garnisons frontalières.
Une bataille pour le Christ
Une chronique postérieure, transmise par l'évêque Eusèbe de Césarée, auteur d'un panégyrique de Constantin le Grand, assure que celui-ci aurait vu avant la bataille du pont Milvius une Croix dans le ciel, avec les mots ci-après : «In hoc signo vinces», soit en français, «Par ce signe tu vaincras».
Le futur empereur aurait alors fait peindre ces mots sur les boucliers de ses soldats et sur son étendard, le labarum, en les surmontant du chrisme, un symbole désignant Jésus-Christ et constitué des deux premières lettres de son nom, le X et le Rho grec.
Tant avant qu'après Constantin, il est assez fréquent que des chroniqueurs évoquent des interventions divines dans les batailles. Le fait inédit est qu'il s'agit du Christ et non d'une quelconque divinité païenne.
L'avènement de Constantin, élevé dans le paganisme et mort dans le christianisme, marque la conversion officielle de Rome à la nouvelle religion. La légende du pont Milvius a été plus tard adaptée par les pieux chroniqueurs du règne de Clovis à la bataille de Tolbiac.
Quoi qu'il en soit de la réalité de cette vision et de l'utilisation du chrisme, il ne fait guère de doute que l'empereur affiche à partir de 312 une attitude plus que bienveillante à l'égard de la minorité chrétienne. Dès l'année suivante, il convainc son alter ego oriental Licinius de s'associer à la rédaction d'un édit de tolérance qui va légaliser le christianisme et l'assurer de la protection impériale.
Vos réactions à cet article
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Stef (28-10-2023 07:34:04)
Un petit rectificatif concernant le début de l'article. Contrairement à ce qui se lit souvent, y compris dans l'article, César n' jamais été empereur.
Frantz Reine (27-06-2016 14:18:54)
Quel plaisir de vous lire. Me permet de mettre à jour mes (petites) connaissances historiques . J'aime l' éclectisme et la rigueur de votre site. Merci !
benoit de BIEN (30-10-2014 10:47:32)
Toujours bien intéressant le site "Hérodote" et très bien structuré.
Un grand merci.