Après quatre décennies de pouvoir sans partage, le dictateur libyen Mouammar Kadhafi voit son autorité contestée par les habitants de Benghazi. La guerre civile s'installe.
Traqué par ses opposants, qui ont reçu l'appui des Occidentaux, le dictateur résiste à Syrte, avec le dernier carré de ses fidèle, jusqu'à ce qu'une attaque aérienne de l'OTAN frappe sa ville natale, le 20 octobre 2011. En fuite et blessé, il est abattu par ses ennemis.
Pour la Libye, cette « libération » est le début d'un cauchemar aussi effroyable que la dictature antérieure, sinon davantage.
Les déboires du « printemps arabe »
Inspirés par l'exemple de la Tunisie, les peuples de l'Égypte, du Yémen, du Bahreïn, de la Syrie et de la Libye se sont soulevés à leur tour. Tandis que les Égyptiens ont pu chasser sans trop de mal le vieil autocrate Hosni Moubarak, il n'en a pas été de même des autres.
Au Bahreïn, petit émirat du Golfe à majorité chiite mais gouverné par un souverain sunnite, la contestation est sauvagement réprimée le 15 mars 2011 avec le concours de l'armée séoudienne.
En Syrie, où les minorités religieuses (chrétiens et Alaouites, musulmans apparentés aux chiites) appréhendent la dictature de la majorité sunnite, le gouvernement alaouite de Bachar El-Assad réprime la rébellion sans état d'âme, entraînant le pays dans le chaos (200 000 morts et plusieurs millions de personnes déplacées ou exilées).
Au Yémen, à la pointe de la péninsule arabique, des immolations par le feu, suivant l'exemple tunisien, débouchent sur de massives manifestations de rues. Le vieux président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, dont 21 à la tête du Yémen réunifié, quitte le pouvoir en février 2012. Son successeur, confronté à une rébellion chiite soutenue par l'Iran, doit s'enfuir en Arabie séoudite. Celle-ci engage aussitôt son armée au Yémen dans une guerre sans merci.
Rien de tel en Libye où une révolte éclate dès le 13 février 2011 à Benghazi, capitale de la Cyrénaïque, province orientale rivale de la Tripolitaine, laquelle demeure grosso modo fidèle à Mouammar Kadhafi. Celui-ci déclenche une véritable guerre contre la rébellion en faisant appel à des mercenaires africains. En suivant la côte méditerranéenne, ses troupes envahissent la Cyrénaïque en multipliant les exactions contre les populations civiles.
Une intervention occidentale mal avisée à Benghazi
En France et à l'ONU, on s'alarme du risque que la population de Benghazi ne soit massacrée en cas de victoire des kadhafistes. Le président français Nicolas Sarkozy se laisse convaincre par l'intellectuel Bernard-Henri Lévy d'intervenir activement. Le 10 mars 2011, il reconnaît le gouvernement rebelle de Benghazi et, le 17 mars 2011, son ministre des Affaires étrangères Alain Juppé convainc le Conseil de sécurité de l'ONU d'organiser une zone d'exclusion aérienne autour de la capitale de la Cyrénaïque. Ainsi est votée la résolution 1973.
En attendant que les avions de l'OTAN soient opérationnels, l'aviation française donne aussitôt la chasse aux colonnes blindées kadhafistes. Rapidement, l'OTAN déborde le cadre de la mission confiée par l'ONU et traque les kadhafistes jusqu'en Tripolitaine, permettant aux insurgés de lancer une contre-offensive laborieuse mais victorieuse.
La Russie, membre du Conseil de sécurité, qui a autorisé du bout des lèvres l'intervention en Libye, manifeste son irritation devant l'initiative de l'OTAN, qui outrepasse le cadre de sa mission. Ses représentants promettent - mais un peu tard - qu'on ne les y reprendra plus !
Au bout de plusieurs mois de combats indécis et au prix de quelques milliers de morts, les opposants s'emparent de Tripoli. Les Occidentaux rejettent le projet d'une exfiltration du dictateur et de son remplacement par un gouvernement de transition.
En désespoir de cause, Kadhafi quitte Syrte avec un convoi de plusieurs véhicules civils en direction du Niger. Avertis de sa fuite, les alliés disposent sur le parcours des miliciens de l'organisation rebelle Misrata. Des avions de l'OTAN se mettent en chasse du convoi et attaquent celui-ci. Le dictateur se réfugie dans une buse en béton. Il en est extrait par les miliciens de Misrata et sauvagement assassiné.
Fiasco
Après ce succès de la coalition démocratique, l'anarchie s'installe. Les Occidentaux fuient le désordre qu'ils ont contribué à créer. Du fait de l'insécurité générale, la production pétrolière s'effondre de 1,5 million de barils/jour en 2011 à 200 000 en 2014. Le pays devient la proie de chefs de bande locaux qui tentent de s'approprier les ressources pétrolières ou spéculent sur le transit des migrants africains vers l'Europe.
Par ailleurs, les mercenaires africains de l'ancien dictateur, touaregs et autres, se replient vers le désert avec armes et bagages et ne tardent pas à déstabiliser les pays du Sahel, du Mali à la Centrafrique, obligeant la France à intervenir une nouvelle fois en catastrophe.
La chute de Kadhafi restera dans l'Histoire contemporaine comme l'un plus beaux exploits de Gribouille, ce héros de la comtesse de Ségur qui, pour échapper à la pluie, se jetait dans la rivière.
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Cedeba (20-10-2021 09:59:30)
Bonjour, Je suis assez d'accord avec les deux commentaires de Khaled. Je me souviens d'un temps où les réalisations économiques et agronomiques du Colonel Kadhafi étaient vantées par la presse ... Lire la suite
khaled (16-10-2016 13:15:30)
Les recherche et sanction de responsables dans cette catastrophe humanitaire ne semblent pas retenir l'attention. Après tout il n'y a aucun ...."occidental" dans les victimes et pays touchés. Enfi... Lire la suite
khaled (21-03-2014 12:21:15)
"Pour la Libye, cette « libération » est le début d'un cauchemar au moins aussi effroyable que la dictature antérieure." écrit Alban Dignat. En fait jamais sous le "Dictateur&quo... Lire la suite