Le 24 mars 1976, le gouvernement d'Isabel Perón, au pouvoir en république Argentine depuis la mort de son mari Juan Perón en 1974, est renversé par un coup d'État mené par le général Jorge Rafael Videla (49 ans), commandant en chef de l'armée de terre.
Inspirée par la phobie du communisme, la junte prend le pouvoir en vue de mettre fin à l'instabilité ministérielle et aux rébellions, devenues monnaie courante depuis les émeutes du 20 juin 1973, lors du retour d'exil de Juan Perón.
« Une lutte contre la subversion »
Sitôt après son coup d'État, Videla est nommé président de la République. Il dissout le Congrès, remplace la Cour suprême, impose la loi martiale et ne gouverne plus que par décrets.
Avec ce « Processus de réorganisation nationale » - selon ses termes -, la junte inaugure ce que l'on appelle aujourd'hui la « guerre sale ». Ce drame douloureux, qui va durer sept ans, est concomitant d'autres conflits entre extrême-droite et extrême-gauche dans le cône sud-américain, au Chili, où sévit la dictature d'Augusto Pinochet, et en Uruguay, où frappent les terroristes Tupamaros.
Une violente répression s'engage contre les mouvements et partis d'opposition. Certains sont interdits, comme le Parti communiste révolutionnaire ou le Parti socialiste des travailleurs, leurs membres sont au mieux intimidés, au pire torturés et exécutés. La peine de mort est rétablie et les journaux censurés.
L'enseignement étant considéré comme une source de la subversion, les frais de scolarité sont augmentés afin de minimiser le nombre d'étudiants, les cursus sont revus à la baisse et certaines universités sont tout simplement fermées.
Après les opposants politiques directs, certains syndicats, avocats ou religieux sont eux aussi pourchassés.
Enlèvements et tortures
Les enlèvements ont lieu en masse. Des centres de détentions clandestins sont créés à l'image de l'Esma, l'école de mécanique de la marine, où les opposants au régime sont retenus prisonniers, torturés ou assassinés. La junte pratique les « vols de la mort » : les prisonniers sont drogués et jetés vivants au-dessus de l'océan Atlantique !
Près de 500 bébés sont enlevés en même temps que leurs parents et adoptés par des familles de militaires ou policiers proches du régime en place afin de « purifier idéologiquement la population ». Ces adoptions suscitent la mobilisation des Grands-mères de la place de Mai (la place située devant le palais présidentiel, à Buenos Aires), qui vont s'efforcer pendant des années de retrouver enfants ou petits-enfants.
Quatre juntes en sept ans
En mars 1981, Videla est remplacé par le maréchal Roberto Eduardo Viola. Lui-même est destitué en décembre de la même année par le général Leopoldo Galtieri, commandant en chef des armées. Pour tenter de restaurer le crédit de l'armée, celui-ci entreprend l'année suivante l'invasion des Malouines. Disqualifié par l'échec de l'opération, il est remplacé par Reynaldo Bignone.
Affaiblie par sa défaite militaire, la junte se résigne à organiser des élections et rendre le pouvoir aux civils. Le candidat radical Raul Alfonsín remporte la présidentielle le 10 décembre 1983, mettant un terme à sept années de dictature, permettant au pays de renouer avec la démocratie.
Selon les organisations des droits de l'homme, le régime militaire a été responsable de 30 000 disparus et de l'exil d'un demi-million d'Argentins. Un procès, en 1985, a conduit à la condamnation de Videla à la perpétuité en raison de sa responsabilité directe dans différents crimes.
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Erik (20-03-2016 11:16:00)
Ce brave général Videla m'a clairement fait comprendre la différence fondamentale entre une dictature et une démocratie en 1978 quand, après la victoire de l'Argentine au Mundial, il remet la coupe au capitaine de l'équipe nationale et entame son discours par "A mi no me gusta el futbol" (Moi je n'aime pas le foot).
Imaginons un Dehaene qui aurait délaissé son "supportariat" brugeois, combien de voix aurait-il perdu?
Videla, il s'en fichait, lui, des voix et des urnes :-D