La Seconde Guerre mondiale se termine officiellement en Europe le 8 mai 1945, à 23h01 (heure allemande), au lendemain de la capitulation sans condition de l'Allemagne nazie, signée le 7 mai à Reims.
Elle laisse un bilan sans équivalent dans l'Histoire avec plus de cinquante millions de morts, majoritairement des civils : 400 000 Américains, autant de Britanniques, 600 000 Français, huit millions d'Allemands, vingt millions de Soviétiques, etc. Notons que cette date du 8 mai 1945 marque avant tout une victoire militaire, le nazisme proprement dit étant mort avec son fondateur dans le bunker de Berlin, le 30 avril précédent.
Défaite totale de l'Allemagne nazie
À partir de la bataille d'El-Alamein (23 octobre 1942), les armées allemandes ont subi défaite sur défaite et reculé sur tous les fronts jusqu'au 25 avril 1945, date à laquelle les troupes soviétiques et anglo-américaines ont fait leur jonction au milieu de l'Allemagne, sur l'Elbe, à Torgau.
Hitler, terré dans son bunker de Berlin, avec son dernier carré de fidèles, se suicide le 30 avril.
Il revient à son successeur, le grand-amiral Karl Dönitz, replié à Flensburg, sur la frontière avec le Danemark, de demander la cessation des combats aux puissances alliées, les Anglo-Saxons et les Soviétiques.
Le 6 mai, Dönitz envoie le général Alfred Jodl, chef d'état-major de la Wehrmacht, à Reims (France), au quartier général des forces alliées (en anglais : Supreme headquarters allied expeditionnary force, SHAEF).
Celui-ci est installé depuis février 1945 dans le grand bâtiment de briques rouges de l'École professionnelle de Reims, à proximité immédiate de la gare ferroviaire.
NB : l'établissement porte aujourd'hui le nom de lycée Roosevelt ; la salle de la capitulation est un musée public.
L'Allemand s'entretient avec le général américain Walter Bedell Smith, chef d'état-major du général Dwight David Eisenhower (54 ans), commandant en chef des forces alliées en Europe. Il tente de négocier une paix séparée avec les Anglo-Saxons mais doit bien vite y renoncer et se résigne à une capitulation générale sans condition.
Signature de la capitulation à Reims (7 mai)
C'est ainsi qu'avec les pleins pouvoirs de Dönitz, le général Alfred Jodl (55 ans) signe le 7 mai 1945, à 2h 41 du matin, la capitulation sans condition de l'Allemagne...
NB : Dönitz et Alfred Jodl, ainsi que l'architecte Albert Speer, seront arrêtés à Flensburg le 23 mai 1945 et déférés au Tribunal de Nuremberg ; Jodl sera condamné à mort pour avoir contresigné des ordres contraires au droit international (exécution d'otages ou de prisonniers) et pendu le 16 octobre 1946.
Côté vainqueurs, l'acte de capitulation (*) est signé par le général Walter Bedell-Smith et le général soviétique Ivan Sousloparov. Le général français François Sevez, adjoint du général Juin et chef d'état-major de la France Libre, est invité à le contresigner à la fin de la cérémonie en qualité de simple témoin.
En l'absence d'un officier général allemand d'un rang égal au sien, le général Eisenhower a choisi pour sa part de rester dans son bureau. Mais c'est à lui que revient l'annonce radiophonique de la victoire, à 3h39 du matin, dans la salle de la signature. « Il est particulièrement symbolique que la reddition ait été signée au coeur de la France, ce pays qui a tant souffert, ce pays où nous avons débarqué en juin dernier et dont les forces armées et les mouvements de résistance nous ont tant aidés », déclare-t-il.
La cessation des combats est fixée au lendemain 8 mai, à 23h01, le temps que les ordres nécessaires puissent être communiqués à toutes les unités.
NB : certaines troupes allemandes résisteront au-delà de cette date, notamment dans la place forte de Saint-Nazaire.
Ratification de la capitulation à Berlin (8 mai)
Pour Staline, l'allié soviétique pas content du tout, il ne suffit pas que la capitulation ait été signée à Reims, dans la zone occupée par les Anglo-Saxons. Il faut aussi qu'elle soit ratifiée à Berlin, au coeur du IIIe Reich, et accessoirement dans la zone d'occupation soviétique. Cette exigence puise sa justification dans la part essentielle qu'ont pris les Soviétiques à la victoire, par le sang versé. À eux seuls, ils ont encaissé 80% de l'effort de guerre nazi.
Pour cette formalité, les chefs des armées combattantes se retrouvent donc le lendemain 8 mai 1945, à 15 heures, au quartier général des forces soviétiques du maréchal Gueorgui Joukov (49 ans), dans une école militaire du génie du quartier de Karlshorst.
Les trois armes allemandes sont représentées par le général Hans Juergen Stumpff, commandant en chef de la Luftwaffe, le maréchal Wilhelm Keitel, chef d'état-major de la Wehrmacht, l'amiral Hans Georg Von Friedebourg, Kriegsmarine.
La séance se tient dans le mess de l'école, sous les drapeaux des vainqueurs, à 23 heures (minuit, heure de Moscou). Glacial, Keitel signe les protocoles pendant un bon quart d'heure (il sera plus tard jugé à Nuremberg et exécuté le 16 octobre 1946).
Côté allié, c'est à Joukov et au maréchal en chef de l'air britannique Arthur Tedder qu'il revient de signer les protocoles. Le général américain Spaatz et le Français de Lattre de Tassigny les paraphent comme témoins.
Une fois les signatures terminées, le maître de cérémonie Joukov lance sèchement : « La délégation allemande peut quitter la salle ». Aussitôt après, l'atmosphère se détend et les vainqueurs passent à table à l'invitation de Joukov qui a prévu deux cents couverts pour un banquet qui va se terminer au petit matin au milieu des chants et des danses.
Pendant ce temps, les chefs d'État et de gouvernement alliés, dont le général de Gaulle, annoncent simultanément sur les radios la cessation officielle des hostilités en Europe. Aux États-Unis, l'annonce de la victoire revient au président Harry Truman, son prédécesseur Franklin Roosevelt étant mort d'épuisement et de maladie le mois précédent, le 12 avril 1945.
NB : la ratification de la capitulation à Berlin ayant été enregistrée en URSS le lendemain, à 01h01 (heure de Moscou), c'est le 9 mai que, depuis lors, Soviétiques et Russes commémorent leur victoire dans la « Grande Guerre patriotique ».
Bien que la France se fût officiellement retirée de la guerre avec l'armistice du 22 juin 1940, Charles de Gaulle estimait que son pays avait bien mérité de la Victoire. Pour le chef de la France libre, le conflit qui s'achevait avait commencé non pas en 1939 mais en 1914.
Au terme de cette guerre de trente ans, il espère donc une place à la table des vainqueurs et mandate à cet effet le chef de la 1ère armée française, le général Jean de Lattre de Tassigny (56 ans), bien que ce dernier ne se soit rallié à lui qu'en novembre 1943. Staline saisit cette occasion de diviser les Occidentaux. À sa demande, Joukov introduit de Lattre dans la salle de conférences.
Lorsque de Lattre exige qu'un drapeau français soit joint aux drapeaux anglais, américain et soviétique dans la salle de capitulation, il s'attire cette réflexion d'un officier britannique : « Et pourquoi pas le drapeau chinois ? »
Conciliant, Joukov fait coudre à la hâte un drapeau tricolore à partir de quelques chiffons de hasard. Le maréchal Keitel, chef d'état-major de l'armée allemande, s'exclame en voyant le drapeau français entre la bannière étoilée et l'Union Jack : « Ah, il y a aussi des Français ! Il ne manquait plus que cela ! »
Une nouvelle occasion de protester s'offre à de Lattre pendant le banquet de la nuit, quand Joukov lève des toasts en oubliant le Français. Celui-ci repousse son couvert et manifeste à haute voix son mécontentement. Joukov, bon enfant, se ravise et lève un toast à la gloire de l'armée française. Ainsi la France a-t-elle gagné la place de Quatrième Grand et un siège de membre permanent au Conseil de sécurité de l'ONU.
La capitulation n'est pas la paix
La guerre ne se termine cependant pas avec la capitulation de l'Allemagne nazie... Le Japon de l'empereur Showa, allié de Hitler, poursuit un combat désespéré contre les Américains dans l'océan Pacifique. Il faudra les deux explosions atomiques de Hiroshima et Nagasaki, les 6 et 9 août 1945, pour amener ce pays à résipiscence.
C'est seulement avec la capitulation du Japon le 2 septembre 1945, près de quatre mois après celle de l'Allemagne, que prend donc véritablement fin la Seconde Guerre mondiale.
Les Américains distinguent ainsi le V-E (Victory-Europe) Day, jour de la victoire en Europe et le V-J (Victory-Japan) Day, jour de la victoire sur le Japon.
Les Français n'ayant eu aucune part à la capitulation militaire de l'Allemagne, à Reims, le 7 mai 1945, ils ont choisi par la suite de commémorer exclusivement la fin des combats, le 8 mai 1945. En 1975, le président Giscard d'Estaing a souhaité mettre un terme à cette commémoration dans le désir de se réconcilier avec les Allemands... mais au grand scandale des associations d'anciens combattants.
En 1981, le président Mitterrand a voulu prendre le contrepied de son prédécesseur. Il ne s'est pas contenté de refaire du 8 mai un jour férié. Il en a aussi fait un jour chômé sans rencontrer d'objections chez les citoyens (faut-il s'en étonner ? un jour de congé supplémentaire, ça ne se refuse pas). Cela fait avec le 11 novembre deux jours chômés pour autant de victoires sur nos « amis allemands » ! L'attention portée à cette célébration paraît d'autant plus incongrue que le 8 mai 1945 est aussi marqué par la répression sanglante de Sétif.
À noter que ni les Anglais, ni les Américains ne chôment le 8 mai bien qu'ils aient les meilleures raisons du monde de commémorer cet anniversaire. Quant aux Russes, rappelons-le, c'est le 9 mai qu'ils célèbrent la capitulation de l'Allemagne, la cessation des combats ayant été enregistrée ce jour-là à Moscou en raison du décalage horaire.
Vos réactions à cet article
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Michel (08-05-2024 15:32:46)
Presque 80 ans après les réactions sont toujours vives de la part de français qui n'étaient souvent pas déjà nés, alors qu'est - ce que cela devait être à l'époque... Personnellement je su... Lire la suite
AHJE (08-05-2022 17:11:35)
Votre encart sur "La capitulation vue de... Paris" est assez incongru. En effet, nos "amis allemands" n'étaient pas censés être des nazis et nombre d'entre eux étaient encore en vie en 1975, dont ... Lire la suite
Andrzej Cisek (26-08-2020 12:46:36)
Je suis un Polonais élevé dans l'admiration de la France. C'est pourquoi je me sens obligé de vous dire la vérité en face. Votre participation à la Seconde Guerre mondiale a été la même du d... Lire la suite
Jean Paul MAÏS (25-06-2020 08:25:22)
Retenir EL ALAMEIN comme tournant de WW2 est pour le moins hardi, et pour tout dire pas très conforme au consensus habituel des historiens dignes de ce nom, lesquels situent ce tournant à STALINGRAD... Lire la suite
GROULT (24-06-2020 14:18:35)
"Elles (les commémorations en cours) rappellent la part prépondérante des Soviétiques dans la chute du IIIe Reich." vont-elles rappeler la part prépondérante des USA en 1942 pour aider l'Union ... Lire la suite
maryse (22-06-2015 11:57:16)
Sim'nancy, il ne faut pas confondre jour fériés et jours chômés. Seul le 1er mai est jour chômé, alors que le 1er janvier, lundi de Pâques, 8 mai, Ascencion, lundi de Pentecôte, 14 juillet, 15... Lire la suite
Maryse (22-06-2015 11:44:29)
Sim'nancy, il ne faut pas confondre jour fériés et jours chômés. Seul le 1er mai est jour chômé, alors que le 1er janvier, lundi de Pâques, 8 mai, Ascencion, lundi de Pentecôte, 14 juillet, 15... Lire la suite
Anonyme (08-05-2015 07:24:24)
Merci de rappeler que 80 % des forces allemandes les plus fortes étaient du côté est. Réécoutez M. Védrine de ce matin vendredi 8 sur FrCu à 7h20
arlette (07-05-2015 10:32:11)
la résistance les résistants mérittaient le drapeau francais
Michel (07-05-2015 08:25:06)
@ Sim'nancy vous avez raison, en France il n'y a qu'un seul jour férié chômé et obligatoirement payé : le 1er mai. Pour les autres jours fériés, cela dépend des conventions collectives ou, à ... Lire la suite
Michel (07-05-2015 08:20:40)
Je crois bien malheureusement que le nazisme n'est pas mort avec Hitler.
Jean Desmarès (11-03-2015 09:30:23)
Bonjour à tous, Un point à préciser : il y a eu 100.000 morts pendant la campagne de France de 1940 et non 200.000 ! La violence des massacres de Sétif a marqué le début du refus algérien de... Lire la suite
Jean Louis TAXIL (07-05-2014 22:35:06)
Qu'importe le 7, le 8 ou le 9 juin. C'est la fin du nazisme qui est commémorée, du nazisme. Les massacres de Sétif n'avaient pas pour but d'exterminer les Algériens. Mais ce n'est pas une raison d... Lire la suite
sim'nancy (08-05-2013 10:56:23)
Bonjour, Il me semble que le 8 mai n'est pas chômé et férié comme l'est le 1er mai, sans quoi les magasins ne seraient pas ouverts ce jour-là. Il y a très peu de jours chômés et fériés dans... Lire la suite
allen (23-10-2006 00:35:12)
Pour répondre à Simon, 200.000 soldats français sont morts pendant la campagne de France en 1939 et les 500000 français et indigènes ont participés au débarquement de Provence, aux campagnes d'... Lire la suite
Claudine Gillon-Marshall (01-10-2006 17:55:32)
Dans cette sale guerre, aucun pays participants ou occuppes n´a les mains propres, surtout au sujet du peuple Juif. Des gens de toutes nationalites ont collabores avec les nazis en aidant au regroup... Lire la suite
simon (04-06-2006 14:23:55)
Je trouve quand même fort la présence de la France lors de la signature de la capitulation allemande... Encore un coup de De Gaulle l'opportuniste. Le planqué comme on l'appelle hors de France.