Le 20 juillet 1944, Hitler échappe à la bombe qui devait le tuer tandis qu'il examinait des cartes avec ses généraux au Grand Quartier Général de Rastenburg, en Prusse orientale, dans son repaire dit la « Tanière du Loup » (Wolfsschanze).
De son nom de code « Opération Walkyrie », cet attentat est le deuxième auquel échappe le dictateur après celui du menuisier Georg Elser, à Munich, en 1939...
En fait d'attentat, il s'agit plutôt d'une tentative de coup d'État par une coalition d'opposants au régime, à un moment où celui-ci est de toute façon condamné : les Soviétiques sont déjà en Allemagne et les Anglo-Saxons ont débarqué en Normandie.
Malgré douze ans de dictature et de terreur, le Führer n'a jamais pu rallier à sa cause la noblesse militaire prussienne, attachée à ses traditions et à son honneur, ni les démocrates sincères, portés par la foi chrétienne. Il a dû aussi combattre les défections et les manigances de ses plus proches collaborateurs, comme Rudolph Hess ou Hermann Goering. Les uns et les autres ont sans trêve comploté contre le dictateur, non sans parfois payer très cher leur audace...
Avocat international, le comte Helmuth von Moltke est le fils du chef d'état-major de 1914 et d'une Anglaise. C'est aussi le petit-fils du comte Helmuth von Moltke, chef d'état-major qui a fait de l'armée prussienne la première armée du monde au temps de Bismarck et concouru aux victoires sur l'Autriche (1866) et la France (1870).
L'héritier de cette prestigieuse lignée anime la résistance souterraine à Hitler en réunissant de 1938 à 1944 des membres de l'aristocratie dans le domaine familial de Kreisau (ou Greisau). Ce groupe sera appelé a posteriori « cercle de Kreisau » par la Gestapo.
Compromis dans l'attentat du 20 juillet 1944, Moltke écrit dans un document qui sera retrouvé après son exécution : « Pour nous, l'image de l'Europe d'après guerre dépendra de la façon dont nous pourrons rendre à nos concitoyens le respect de l'homme ».
Les conjurés de l'« Opération Walkyrie » veulent tuer Hitler pour renverser le régime et établir à sa place une dictature conservatrice en rétablissant éventuellement la monarchie. Ils espèrent faire la paix avec les Anglo-Américains tout en continuant la guerre contre l'Union soviétique.
Parmi eux figurent des hauts gradés comme le général Ludwig Beck, ancien chef d'état-major de l'armée de terre, démis de ses fonctions en 1938 et mis à la retraite d'office. Il est pressenti pour remplacer Hitler à la tête de l'État. Autre conjuré notable : le général Hans Speidel, chef d'état-major du prestigieux maréchal Erwin Rommel, le « Renard du désert ». Ce dernier, comme les conjurés, a acquis la conviction que la guerre est perdue et qu'il serait temps de se détacher de Hitler. Il est informé du complot mais s'en tient à l'écart comme le montrera l'enquête ultérieure de la Gestapo.
L'un des conjurés les plus actifs est le comte Claus von Stauffenberg (36 ans). Issu d'une vieille famille de l'aristocratie souabe, celui-ci a découvert en Russie, pendant l'hiver 1941/1942, la brutalité des SS et s'est lié à des groupes de comploteurs. Bien que catholique fervent, opposé à la violence illégitime, il s'est alors convaincu de la nécessité d'assassiner Hitler, y voyant le seul moyen de retourner l'armée contre le régime nazi.
Stauffenberg combat ensuite aux côtés du maréchal Rommel en Afrique et accède au grade de lieutenant-colonel d'état-major. Blessé en Tunisie le 7 avril 1943 dans une attaque aérienne, il perd un oeil et le bras gauche. Il rentre en Allemagne, plus décidé que jamais à en finir avec Hitler.
Le général Friedrich Olbricht, chef du service général de l'armée de terre, partage en secret la même idée et prépare depuis plus d'un an déjà un coup d'État militaire sous le nom de « Walkyrie ». À cet effet, il fait en sorte de promouvoir les opposants au nazisme à des postes importants. C'est ainsi qu'il fait venir Stauffenberg à ses côtés en vue d'en faire son chef d'état-major avec le grade de colonel.
Celui-ci est enfin nommé en juillet 1944 chef d'état-major de l'armée de réserve du général Fromm. À ce titre, il a désormais accès aux conférences militaires de la Tanière du Loup...
Carl Friedrich Goerdeler, ancien maire de Leipzig (conservateur), l'un des rares leaders politiques qui s'opposent à Hitler, est associé au complot. Protestant courageux et intègre, animé par de fortes convictions religieuses, il a profité de ses voyages à l'étranger avant la guerre pour éclairer les dirigeants occidentaux, dont Churchill, sur la menace représentée par Hitler. Pendant la guerre, il anime un « gouvernement de l'ombre ».
Les conjurés de « Walkyrie » projettent d'en faire le chancelier de la nouvelle Allemagne en cas de succès. Arrêté sur dénonciation et longuement torturé, il écrit dans sa lettre d'adieu, avant sa décapitation le 2 février 1945 : « Mais je demande au monde d'accepter notre mort en martyrs comme un acte de contrition en faveur du peuple allemand ».
Le 20 juillet 1944, date choisie pour l'attentat, la conférence a été avancée à 12h30 au lieu de 13h, en raison d'une visite de Mussolini. Le dictateur italien doit arriver en train à 14h30 à Rastenburg. D'autre part, en raison de la chaleur de l'été, la réunion se tient dans un chaleten bois et non dans un bunker en béton, comme à l'ordinaire.
Au moment propice, Stauffenberg en personne dépose une valise piégée près de Hitler, sous la table autour de laquelle se déroule la conférence... Par manque de temps et du fait de son handicap, il n'a eu le temps que d'amorcer l'une des deux bombes contenues dans la valise. Puis il quitte la pièce sous le prétexte de donner un coup de fil.
Comme la valise dérange un des militaires, celui-ci la déplace de sorte qu'elle est désormais séparée de Hitler par le lourd support en chêne de la table. Lorsque se produit l'explosion, à 12h 42, les parois du chalet sont soufflées, ce qui amoindrit la puissance de l'explosion. Et le Führer, protégé par le pied de la table, n'est en fin de compte que légèrement blessé.
Stauffenberg a vu le chalet se volatiliser et des corps expulsés par les ouvertures. Il est convaincu qu'il ne reste plus personne de vivant à l'intérieur et, sans perdre une minute, se rend à Berlin dans l'intention de participer au soulèvement. À son arrivée à l'aéroport, trois heures plus tard, il téléphone aux autres conjurés et apprend, consterné, que ceux-ci n'ont pas osé déclencher le soulèvement faute de certitude sur le sort de Hitler.
Beaucoup de participants à la conférence ont été tués ou grièvement blessés mais Hitler et le général Keitel qui se tenait à ses côtés ont eu une chance inouïe... Quand Mussolini arrive pour ce qui sera la dernière rencontre des deux dictateurs, il est accueilli sur le quai de la gare par un Hitler surexcité, les cheveux roussis, le bras partiellement paralysé, qui l'amène sans attendre visiter le lieu de l'explosion... Les deux hommes, après une phase d'agitation, s'installent pour le thé.
C'est alors qu'arrive de Berlin l'information selon laquelle l'armée se serait soulevée. Aussitôt, les dignitaires présents (Ribbentrop, Doenitz....) s'envoient des reproches et des injures à la figure sous le regard de Hitler, silencieux.
À Berlin, Stauffenberg, suppléant à l'inertie de ses complices, a fait arrêter son supérieur, le général Fromm... mais il a négligé de couper les communications téléphoniques avec le Grand Quartier Général et de se saisir de la radio. Le ministre de la propagande, Joseph Goebbels, reprend habilement la main et retourne en sa faveur l'officier venu l'arrêter. À 18h30, la radio annonce que Hitler vient d'échapper à un attentat. À Prague et Vienne, les généraux qui avaient entamé le soulèvement font machine arrière.
Le ministre de l'Intérieur, Heinrich Himmler, prend le commandement de l'armée de l'intérieur. Les troupes investissent le quartier général de la conjuration, la Bendlerstrasse. Quelques officiers d'état-major libèrent le commandant de l'armée de réserve Friedrich Fromm. Celui-ci reprend la main. Peu avant minuit, il fait exécuter dans la cour de l'immeuble Stauffenberg, Olbricht ainsi que d'autres chefs de la conjuration. Le général Beck, eu égard à sa notoriété, est contraint au suicide. À 1h du matin, Hitler lui-même s'exprime à la radio et annonce une sévère répression. Il tiendra parole.
Le 8 août, un premier groupe de conspirateurs passe en procès devant le Tribunal du Peuple présidé par Roland Freisler, celui-là même qui condamna les étudiants de la « Rose blanche ». Ils sont immédiatement pendus. L'attentat raté va donner lieu à un total de 55 procès et 170 condamnés à mort (dont 110 exécutés à Berlin-Plötzen), non compris les exécutions sommaires, beaucoup plus nombreuses.
Les « Tribunaux du Peuple » (Volksgerichtshof) ont reçu de Hitler la charge de réprimer les menées anti-nazies. Ils sont responsables de 13 000 condamnations à mort de 1934 à 1944. Le plus redouté est celui de Berlin. Il est présidé depuis août 1942 par un ancien communiste du nom de Roland Freisler, qui participa quelques mois plus tôt à la « conférence de Wannsee ».
Il prononce 23 condamnations à mort entre 1934 et 1936, 85 entre 1937 et 1939, 53 en 1940, 102 en 1941, 1192 en 1942 et 5191 de 1943 à juillet 1944.
Tué lors d'un bombardement, en février 1945, pendant une audience du tribunal, Freisler échappera lui-même à une probable condamnation à mort par le tribunal de Nuremberg...
Le 14 octobre, le feld-maréchal Erwin Rommel sera sommé de se suicider. Eu égard à sa grande popularité, Hitler lui accordera des funérailles nationales.
L'amiral Wilhelm Canaris, ancien chef de l'Abwehr (le service de renseignement) est soupçonné de participation au complot. Il est envoyé au camp de concentration de Flössenburg où il sera étranglé avec une corde à piano le 9 avril 1945 !
Au total, la Gestapo procède à 7 000 arrestations suite à l'attentat du 20 juillet et 5 000 personnes payent de leur vie cette tentative tardive de se débarrasser du tyran et de laver l'honneur de l'Allemagne. Le régime ne connaît plus d'opposition et la Wehrmacht introduit même le salut hitlérien en lieu et place des salutations hiérarchiques traditionnelles sans se faire prier.
Paradoxalement, l'échec de l'attentat soude les Allemands autour du Führer. Celui-ci apparaît comme protégé par la Providence et se présente comme l'ultime bouclier contre l'invasion soviétique et les exactions qui l'accompagnent. Le ministre de la propagande Joseph Goebbels ne fait plus d'effort pour cacher celles-ci afin d'instiller chez ses concitoyens l'énergie du désespoir. Ainsi des enfants de quinze ans et des sexagénaires s'engagent-ils dans les derniers combats.
Plus déterminé que jamais, Hitler entraîne l'Allemagne jusqu'au bout de sa folie.
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Anonyme (17-07-2014 15:00:47)
en plus Hitler un aryen blond et puissant ? un nabot végétarien et laid oui
Anonyme (17-07-2014 14:58:00)
la barakka n'appartient-elle qu'aux fous délirants comme Hitler