Le lundi 26 avril 1937, pendant un jour de marché, la petite ville basque de Guernica est bombardée par des avions allemands et italiens.
C'est la première fois dans l'Histoire moderne qu'une population urbaine est sciemment massacrée. Ce massacre a été voulu par Hitler, allié du général Franco dans la guerre civile espagnole, pour terroriser la population civile.
Terrain d'essais militaires
Dès le début de la guerre civile, Hitler a utilisé l'Espagne comme un banc d'essai pour des armes nouvelles et un terrain d'entraînement pour ses aviateurs. En octobre 1936 a été créée une unité aérienne spéciale, la Légion Condor, sous le commandement du général Hugo Speerle.
Lorsque les franquistes vont diriger leurs attaques sur le Pays basque et les Asturies, au nord-ouest de l'Espagne, elle va s'acquérir une sinistre notoriété.
La veille du drame, Guernica est traversée par les combattants républicains basques, les gudaris. Ils fuient l'avance des franquistes et tentent de gagner Bilbao, au nord, en vue d'y organiser une nouvelle ligne de défense. Le baron von Richthofen propose à ses alliés espagnols de couper la route aux fuyards en détruisant le pont de Rentería, au nord de Guernica. Il n'est officiellement pas question d'attaquer la ville proprement dite.
Dans les faits, la Légion Condor emporte non seulement des explosifs brisants et des bombes antipersonnelles utiles pour cette mission mais aussi 2 500 bombes incendiaires. Rien à voir avec la simple destruction d'un pont !
Accompagnés de plusieurs chasseurs et d'avions italiens, les bombardiers attaquent la ville en plusieurs vagues, au moment où se tient le marché, de 16h30 à 18h. Les deux tiers des maisons, la plupart en bois, sont détruites et incendiées.
À la faveur du bombardement, les nazis mettent au point une stratégie de terreur qu'ils auront l'occasion de réemployer pendant la Seconde Guerre mondiale, avec par exemple le sinistre sifflement des Stukas en piqué.
L'attaque fait selon les estimations les plus plausibles 800 à 1 000 morts.
Vos réactions à cet article
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Claude (25-04-2024 04:26:08)
Certains lecteurs ont raison de contester ce "la première fois". Votre titre lui-même induit en erreur. Les Français ont bombardé exprès le cirque de Karlsruhe en représentation (!) dès les premiers jours de la 1ère Guerre mondiale. Hitler a bombardé exprès Guernica, Londres, Coventry. Les Anglo-Américains ont bombardé exprès TOUTES les villes allemandes de 1943 à 45. Les US ont fini en triste beauté avec le double "essai nucléaire sur populations civiles" d'Hiroshima & Nagasaki. Non, Hitler n'était pas la seule ordure.
Jalopi (26-04-2023 15:26:38)
"C'est une manière pour eux de contourner le traité de Versailles de 1919 qui leur interdit de développer leur aviation de guerre." C'est inexact, la Luftwaffe a été créée en 1935. Le traité de Versailles était donc déjà caduc.
Et si, il s'agissait de détruire le pont de Renteria; pas de tuer des habitants. L'incapacité des Allemands à le détruire vient du manque de précision des bombardements. Les Alliés feront de même, tuant des milliers de civils.
DREVON (27-04-2022 20:29:32)
"C'est la première fois dans l'Histoire moderne qu'une population urbaine est sciemment massacrée"
Vous avez raison de préciser "dans l'histoire moderne"...
Parce que dans l'histoire tout court, on en a maints exemples.
neves Ottavio (11-12-2017 15:00:25)
Une chose ne justifie bien entendu pas les autres, mais compte tenu des horreurs infligées aux populations civiles allemandes par les bombardements anglo-américains, Guernica signifie vraiment très peu de chose. Hélas...
jean luc (04-07-2008 23:23:14)
Dans un dossier du Monde publié voici quelques années, l'historien Alexandre Adler développait une explication totalement différente, que je n'ai vu reprise nulle part.
Les Basques s'étaient alliés (2 provinces sur 4) aux républicains et voulaient conserver leur récente autonomie. Celà avait d'ailleurs provoqué des tiraillements dans cette société très catholique, certains refusant de s'allier aux "rouges bruleurs d'églises".
En avril 1937, voyant bien que le camp franquiste allait l'emporter, ils avaient négocié secrètement une paix séparée avec Mussolini, par l'entremise du comte Ciano pour :
-faire une paix séparée immédiate (ce qui supprimait le front du Nord),
-en contrepartie, créer un royaume basque indépendant, avec mise sur le trône d'un membre de la famille de Piémont Sardaigne. Inutile de dire que cet Etat n'aurait pas été farouchement démocratique...
Franco ayant eu vent du projet, et tenant à l'unité de l'Espagne comme à la prunelle de ses yeux, ne pouvait s'opposer drectement à Mussolini qui lui apportait une aide militaire conséquente. Pour faire cesser ses transactions, il ordonna le bombardement d'une ville, à titre d'avertissement au gouvernement basque : ce fut Guernica.
Cette thèse, que j'ignorais totalement n'est pas apparue dans un reportage sur Guernica diffusé sur Arte voici quelques mois, ni dans que le livre de Mathieu Elgohyen (*).
La tragédie est bien là, mais ainsi expliquée,celà procure une certaine "gêne"... Que pensez vous de cette thèse ?
(*) pour l'attitude des basques pendant la guerre civile, je vous conseille ce livre(éditions Elkar, 2007) : Gernika-La guerre civile d'Espagne au pays basque.
Herodote.net répond :
Nous ne connaissons pas plus que vous cette thèse et, notons-le, Alexandre Adler n'est pas connu pour être un historien spécialiste de la guerre d'Espagne ou du pays basque...
La thèse en question est tirée par les cheveux : on imagine mal, dans la confusion des années 1936-1937, que des Basques représentatifs de leur peuple puissent négocier quoi que ce soit avec Mussolini ; au demeurant, la victoire franquiste n'était pas le moins du monde acquise au début 1937.
En conclusion, soyons toujours méfiants à l'égard des reconstructions a posteriori de l'Histoire par des pseudo-historiens en mal de sensationnel...
chartier Dominique (17-07-2006 19:52:48)
Où est la vérité. Voici ce que l'on peut lire dans l'excellent article paru dans NRH de juillet-août 2006, :" Le nombre maximum de morts s'éleva à 126. La version légendaire fut imaginé par plusieurs journalistes britanniques, ceci afin de convaincre l'opinion publique
que le principal danger pour le Royaume-Uni provenait de l'Allemagne";
Bien sur l'histoire ne se résume pas à faire l'inventaire des morts. La tragédie est bien présente. Mais on peut se poser la question. N'a t'on pas voulu faire de Guenica une sorte de mythe ?