Chanteuse lyrique, orientaliste, exploratrice, aventurière, anarchiste, féministe, écrivain, « jétsunema » (« dame-lama »)... Aucun substantif n'est suffisant pour définir Alexandra David-Néel, première Occidentale à pénétrer à Lhassa, au cœur du Tibet interdit, le 28 janvier 1924. Elle a 55 ans.
Née le 24 octobre 1868 près de Paris, dans un milieu bourgeois, et dotée d'un goût très précoce pour les fugues, elle étudie les philosophies orientales et fréquente des sociétés secrètes, notamment franc-maçonnes. Elle côtoie aussi dans la maison familiale le grand géographe et penseur anarchiste Élisée Reclus et épouse Philippe Néel, ingénieur en chef des Chemins de fer tunisiens.
En 1911, elle a déjà 43 ans quand elle obtient de trois ministères une aide financière pour un voyage d'études aux Indes. Partie en disant à son mari qu'elle reviendrait au bout de huit mois, elle ne remettra les pieds en Europe que 14 ans plus tard. Pendant toutes ces années, elle va arpenter l'Inde, la Chine, le Japon et le Tibet et s'immerger sans relâche dans les philosophies bouddhistes et hindouistes.
Alexandra arrive en 1912 au Sikkim, petit royaume au coeur de l'Himalaya, et se lie d'amitié avec le roi Sidkéong Tulku Namgyal. Deux ans plus tard, elle rencontre dans un monastère bouddhiste Aphur Yongden (15 ans) dont elle fera son fils adoptif. Mais son objectif ultime demeure le Tibet et mieux encore la ville sainte Lhassa.
Partie de Chine avec son fils adoptif et un lama tibétain, Alexandra David-Néel gagne le désert de Gobi puis la Mongolie et enfin le « Toit du monde ». En 1923, elle séjourne avec Yongden dans le monastère de Kumbum puis se prépare au voyage vers Lhassa.
Pour cela, elle se déguise en mendiante tibétaine. Elle mêle des crins de yack à ses cheveux, se poudre avec un mélange de cendres et de cacao pour noircir sa peau et se cantonne à un humble mutisme, alors qu'elle parle couramment tibétain.
Les deux voyageurs mendient leur nourriture, l'obtenant souvent en échange de prophéties que Yongden, en lama savant, révèle aux paysans et pèlerins croisés en route.
L'accoutrement de l'exploratrice lui permet d'observer de tout près les mœurs des Tibétains. Dans les zones où elle craint d'être reconnue par les autorités tibétaines, elle voyage de nuit et dort le jour, cachée dans des fourrés.
Plus d'une fois, les voyageurs manquent de se faire tuer au détour d'un chemin.
Bloqués par la neige dans des solitudes glacées, ils sont contraints de manger le cuir de leurs bottes dans une soupe pour ne pas mourir de faim.
Après avoir traversé plusieurs rivières accrochés à un câble et passés des cols à plus de 5000 mètres d'altitude, les prétendus chemineaux tibétains arrivent enfin à Lhassa. Ils ont alors quitté le Yunnan depuis quatre mois. Alexandra David-Néel écrit à son mari qu'elle arrive à Lhassa « réduite à l'état de squelette ». Elle peut néanmoins crier « Lha gyalo ! » (les dieux ont triomphé !) en contemplant le Potala, palais-forteresse du dalaï-lama.
Sur le retour, débarrassée de son déguisement, Alexandra David-Néel se rend en Inde, à Bombay, où elle accorde de nombreuses interviews. Enfin, elle embarque pour l'Europe. En mai 1924, elle est accueillie au Havre comme une vraie héroïne nationale et fait la une des journaux...
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Kuromaku (24-10-2018 22:02:55)
Il serait intéressant de connaître l'avis des Tibétains qui ont rencontré Mme David-Neel. Qu'était la femme derrière la légende qu'elle a en grande partie créée ? On est souvent surpris de l'... Lire la suite
pierre (25-01-2011 10:05:40)
Il y a quelques mois, à Paris j'ai eu la chance d'assister à la représentation d'une pièce de theatre dont le titre était je crois "Mon Thibet" relatant la fin de vie de Mme David Lean. L'auteur ... Lire la suite