Le 15 juillet 1918, alors que l’Europe est enlisée dans la Grande Guerre depuis bientôt quatre ans, l’Allemagne lance une ultime offensive, à quelques kilomètres de Reims.
La bataille de Champagne (15-17 juillet) s’avère non seulement une victoire défensive des Français mais constitue surtout le grand tournant de la guerre. La contre-offensive alliée, engagée le 18 juillet, marque le point de départ du recul allemand.
Les offensives allemandes du printemps 1918
Au début de l’année 1918, une nouvelle reconfiguration géopolitique pouvant influer définitivement sur l’issue du conflit redonne l’espoir à chacun des deux camps.
Pour la France et l’Angleterre, l'entrée en guerre des États-Unis apparaît comme un renfort décisif. Il n’empêche que l’intervention des Sammies sera très tardive et limitée, d’autant que le président Wilson refuse l’amalgame de ces troupes fraîches avec les poilus alliés. C’est sous le haut commandement du général Pershing, en qualité de troupes associées, qu’elles combattront au Bois Belleau en juin 1918 puis à Montdidier et dans le saillant de Saint-Mihiel.
L’Allemagne a quant à elle signé le 3 mars 1918, à Brest-Litovsk, un traité de paix avec la Russie bolchévique qui lui permet de rapatrier à l’ouest toutes ses troupes mobilisées sur le front russe. Disposant provisoirement de la supériorité numérique sur ses adversaires, il lui est indispensable de frapper un grand coup avant que les Américains n’entrent en scène. C’est ainsi qu’au printemps 1918, trois grandes offensives allemandes ébranlent profondément le front allié.
Le 21 mars, l’offensive Michaël en direction d’Amiens ouvre une brèche de plusieurs kilomètres de large dans le front allié. Les alliés se hâtent de se doter d’un chef commun. C’est le général Ferdinand Foch (66 ans) qui est désigné à la conférence de Doullens, le 26 mars 1918.
Sitôt nommé, Foch arrête cette première offensive allemande. La seconde, lancée le 9 avril dans l’Aisne, marque le début de la seconde bataille de la Marne. En dix jours, les Allemands progressent de 45 kilomètres, jusqu’à Château-Thierry, à seulement 75 kilomètres de Paris.
Le Friedensturm ou « bataille pour la paix »
Après une quatrième offensive en juin 1918, l’armée allemande, qui a franchi une partie de la Marne, marque le pas. Le front se stabilise et pendant un mois, les deux armées se font face sans qu’aucune opération d’ampleur ne soit tentée.
Le général en chef allemand Ludendorff sait qu’il doit très rapidement tenter une ultime offensive dans le secteur pour briser l’étau français et remporter enfin la victoire.
Baptisée Friedensturm (« bataille pour la paix »), son attaque est prévue pour le 15 juillet à 4h15 du matin. Il prévoit d’attaquer par surprise simultanément sur la Marne et en Champagne afin d’encercler Reims et couper en deux l’armée française.
Mais par un coup de main inattendu, les Français ont connaissance de la date et de l'heure de l'offensive...
La bataille de Champagne
Le général Gouraud n’a que quelques heures pour agir. Contre les instructions de Foch, il choisit d’appliquer à la lettre une tactique mise au point par Pétain et fait évacuer la première ligne française.
Le 15 juillet, les bombardements allemands, d’une violence extrême, durent près de quatre heures mais sont perturbés par la météo : des vents défavorables ramènent les nuages toxiques vers leurs propres tranchées !
Quand l’assaut se produit comme prévu à 4h15, le gros des défenseurs français s’est déjà replié sur une puissante seconde ligne.
Après avoir progressé de plusieurs kilomètres, les Allemands, épuisés, sont brusquement arrêtés par les réseaux de barbelés et le barrage d’artillerie. Après deux jours de tentatives infructueuses, Ludendorff doit se rendre à l’évidence : il ne prendra pas Reims.
La bataille de Champagne est un échec pour l’Allemagne et brise le moral des troupes. Ce sera sa dernière offensive de la guerre.
La contre-offensive française
Si les Allemands ont échoué dans leur objectif, ils ont néanmoins réussi à progresser de plusieurs kilomètres. Alors que Pétain propose prudemment de suspendre les préparatifs en cours pour la contre-attaque, Foch refuse et maintient ses plans.
La contre-offensive française est lancée le 18 juillet dans la région de Villers-Cotterêts par la Xe armée du général Mangin. Celle-ci surprend d’autant plus les Allemands qu’elle n’a pas été précédée de préparation d’artillerie.
Pour la première fois, les Français utilisent en masse les chars Renault FT17, premiers chars de combat modernes, et qui portent le feu jusqu’au milieu des défenses allemandes, préparant la voie à l’infanterie. Face aux 2500 chars alliés ainsi qu’à leurs 1500 avions, les Allemands n’alignent que 40 chars et 1000 avions.
Ces nouvelles armes vont faire la différence. Avec elles, en juillet 1918, la guerre change de visage… En deux jours donc, dix kilomètres sont repris par les alliés et le 21 juillet Château-Thierry est libérée. Le lendemain, l’armée française repasse la Marne en direction du nord.
À partir de la contre-offensive du 18 juillet, qui porte un coup fatal au potentiel militaire allemand, la guerre bascule définitivement en faveur des Français et des Britanniques. Commencée le 27 mai, la seconde bataille de la Marne s’achève le 6 août par une victoire décisive des alliés. Foch en est aussitôt récompensé par le bâton de maréchal.
Le 8 août, une offensive franco-américaine, entre Albert et Montdidier, inflige un revers sans précédent à l’ennemi. Ludendorff déplore un « jour de deuil de l’armée allemande ». Tout le territoire acquis par les Allemands au printemps est repris.
Ludendorff comprend que la guerre est perdue. Dès le 13 août, il avoue à demi-mot au gouvernement et à l’Empereur le caractère inéluctable de l’armistice. Mais il faudra encore attendre trois mois et la menace d’une révolution prolétarienne pour l’obtenir.
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O. Danon (01-07-2018 21:12:37)
Bonjour Votre article est très intéressant et insiste bien sur les offensives foudroyantes du printemps 1918 qui ont littéralement transpercé un front immobile depuis plusieurs années. Il y a Ã... Lire la suite