10 septembre 1915

Premier numéro du Canard Enchaîné

Le 10 septembre 1915, Maurice et Jeanne Maréchal publient le premier numéro du Canard Enchaîné (son titre fait allusion à un autre journal contestataire, L'Homme enchaîné de Clemenceau). Appelé à devenir une institution de réputation mondiale, le journal satirique naît pendant la Première Guerre mondiale, avec la volonté de dénoncer la censure, la propagande, les mensonges et le « bourrage de crâne », selon une formule popularisée par Albert Londres en 1914. Mais sa sortie ne va pas sans difficultés. L'hebdomadaire interrompt sa parution dès le cinquième numéro avant de la reprendre l'année suivante.

En juin 1917, Le Canard Enchaîné lance sa première offensive contre les mensonges et les outrances de la presse.  Il organise auprès de ses lecteurs le concours du « grand chef de la tribu des bourreurs de crânes ». La compétition est rude car les concurrents sont nombreux et talentueux. La palme est attribuée au journaliste Gustave Hervé (46 ans).

Gustave Hervé a été avant la guerre professeur d'Histoire au lycée de Sens. Il a aussi milité  dans les rangs socialistes. Libertaire, il a été poursuivi pour des propos antimilitaristes dans son journal La Guerre sociale. Ainsi en 1901, pour l'anniversaire de Wagram, il préconisait dans Le Travailleur Socialiste de l'Yonne que l'on rassemble « dans la principale cour du quartier toutes les ordures et tout le fumier de la caserne et que, solennellement, [...] le colonel en grand plumet y plante le drapeau du régiment ». Mais quand éclate la guerre, il tourne casaque et se rallie à l'Union sacrée. En 1916, il rebaptise son journal La Victoire. On y lit : « Quelle est la maman, quelle est l'épouse qui, en ce moment où se joue la vie de la France, n'est pas prête à accepter le suprême sacrifice ? Crois-tu, maman, que les hommes qui meurent en un tel jour meurent réellement ? » (note). Entre les deux guerres, Gustave Hervé se signalera encore à l'attention de ses compatriotes avec cette manchette récurrente de La Victoire : « C'est Pétain qu'il nous faut ».

La propagande de guerre, une réalité toujours actuelle

Dix ans après la Première Guerre mondiale, en 1928, le diplomate anglais Lord Ponsonby publie un essai lumineux sur la propagande de guerre : Falsehood in War-Time: Propaganda Lies of the First World War (« Le mensonge en temps de guerre : Les bobards de la propagande dans la Première Guerre mondiale »). Arthur Ponsonby y voit une caractéristique des conflits modernes. Elle s'avère indispensable dans tous les camps pour mobiliser les masses et soutenir l'effort de guerre.

En 2001, dans Principes élémentaires de propagande de guerre, l'historienne Anne Morelli s'inspirera du travail de Lord Ponsonby pour définir les dix principes de la propagande de guerre ; ces principes paraissent toujours d'une cruelle actualité :
1- Nous ne voulons pas la guerre.
2- La partie adverse est seule coupable de guerre.
3- L'ennemi est intrinsèquement mauvais et ressemble au diable.
4- Nous défendons une noble cause, pas nos propres intérêts.
5- L'ennemi commet des atrocités exprès ; nos bavures sont involontaires.
6- L'ennemi utilise des armes interdites.
7- Nous subissons de petites pertes, celles de l'ennemi sont énormes.
8- Des artistes et intellectuels reconnus soutiennent notre cause.
9- Notre cause est sacrée.
10- Tous ceux qui doutent de notre propagande sont des traîtres.
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André Larané
Publié ou mis à jour le : 2022-04-20 18:17:15

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