Le 30 août 1914, un mois après l'ouverture des hostilités, la victoire surprise des Allemands sur les Russes à Tannenberg révèle aux Européens les plus avertis que cette guerre sera longue et sans pitié.
Les Français avaient demandé à leurs alliés russes d'attaquer au plus tôt l'Allemagne pour obliger celle-ci à combattre sur deux fronts. Deux armées russes attaquent donc dès la mi-août la province allemande de Prusse orientale (aujourd'hui partagée entre la Pologne et la Russie).
Le 20 août, la VIIIe Armée allemande est bousculée à Gumbinnen. A Paris et à Londres, chez les alliés du tsar, on célèbre les vertus du «rouleau compresseur russe». Le chef d'état-major général allemand Helmuth von Moltke, affolé, enlève deux corps d'armée au front occidental pour renforcer le front oriental.
C'est une bénédiction pour les Français qui, bousculés de toutes parts, en profitent pour se ressaisir et préparer une contre-offensive qui sauvera leur pays de l'invasion et d'une nouvelle défaite...
Richard Fremder vous raconte la bataille de Tannenberg :
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En attendant, le général Paul von Hindenburg (67 ans) quitte sa retraite pour prendre en catastrophe la tête de la VIIIe Armée. Il se fait assister du général Erich Ludendorff (49 ans).
Les Allemands interceptent des messages radio entre les généraux russes - transmis en clair - et comprennent aussitôt que les deux armées ennemies sont beaucoup plus éloignées qu'ils ne le pensaient. Hindenburg et Ludendorff décident d'attaquer l'armée du général Samsonov. Connaissant la haine qui le sépare de l'autre général russe, Rennenkampf, ils font le pari que ce dernier hésitera à le secourir.
Pari gagné. Les 150 000 Russes de Samsonov sont bousculés à Tannenberg et leur retraite est coupée. Les Allemands capturent 92.000 hommes ainsi que 500 canons. Il ne faudra pas moins de 60 trains pour amener ceux-ci à l'ouest.
30.000 Russes sont tués ou blessés. Les Allemands ont moins de 20.000 pertes. Anéanti, Samsonov se suicide. La semaine suivante, sur les bords des lacs Mazures, le général Rennenkampf est à son tour défait.
Mais leur armée ne se débande pas et jusqu'à la fin de 1917, les Russes continueront de faire pression sur la frontière orientale de l'Allemagne.
En France, dans le même temps, le général Joffre remporte la contre-offensive de la Marne. Le front est désormais stabilisé pour quatre longues années.
Paul von Hindenburg, vainqueur de Tannenberg et des lacs Mazures, devient feld-maréchal. Son prestige dans le peuple est immense... et dépasse sa véritable valeur (on pourrait en dire autant de son homologue français, le général Joseph Joffre, vainqueur de la Marne).
Pour les Allemands, la victoire de 1914 constitue aussi une revanche sur une autre bataille, au même endroit, en 1410, qui se solda par la défaite des Chevaliers Teutoniques face à une coalition de Polonais et de Lituaniens.
Vos réactions à cet article
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Alain Sterckx (28-08-2006 09:32:02)
Pour une longue description, vivante et magistrale, de cet épisode de la Grande Guerre, il faut relire le roman célèbre d'Alexandre Soljénitsyne: Août 14.
GP (27-08-2006 15:25:32)
Il ne faut oublier de dire que les Allemands considèrent alors cette victoire comme une espèce de revanche de la défaite de l'Ordre Teutonique lequel, en 1410, perd contre "l'Est" (lituaniens et Po... Lire la suite