20 septembre 1898

Guangxu échoue à transformer la Chine en empire libéral

Le 20 septembre 1898, un coup de force de l'impératrice douairière Cixi met brutalement fin à la tentative du jeune empereur Guangxu (26 ans) de réformer le vieil empire chinois.

L'« empire libéral » n'aura duré que cent jours. Sa faillite va précipiter la chute de la dynastie mandchoue et la plongée de la Chine dans un demi-siècles de guerres pour la conquête du pouvoir.

Béatrice Roman-Amat
Les Mandchous humiliés et contestés

La dynastie des empereurs Qing, fondée par des envahisseurs venus de Mandchourie, règne sur la Chine depuis la prise de Pékin en 1644. Après avoir rendu un bel éclat à l'empire du Milieu, elle entre dans une dégénérescence rapide au XIXe siècle. Les puissances occidentales en profitent pour obtenir des facilités commerciales. Les traités inégaux, signé à l'issue des défaites chinoises dans les guerres de l'opium, leur confèrent le droit d'établir des concessions dans les grandes villes chinoises, en y disposant du privilège d'extraterritorialité.

Un fort sentiment anti-mandchou se développe parmi la population chinoise et se traduit par des soulèvements paysans. Une secte millénariste, les Taiping, menée par un Cantonnais qui se fait appeler « le Roi Céleste » parvient à prendre Nankin en 1853 et marche sur Pékin pour renverser les Mandchous. Les rebelles ne sont vaincus que grâce au soutien apporté à l'armée impériale par les Occidentaux, qui veulent éviter que le pouvoir ne tombe entre les mains d'usurpateurs plus vaillants que les Qing.

Une ambitieuse vague de réformes

En 1898, le jeune empereur Guangxu, conscient du retard pris par la Chine sur les puissances occidentales, décide de moderniser l'empire du milieu, en prenant exemple sur les réformes menées au Japon sous l'ère Meiji. Il s'entoure de personnalités réformatrices, dont le lettré Kang Youwei, qui a séjourné au Japon.

L'empereur accorde sa confiance à des « purs Chinois » plutôt qu'aux dignitaires mandchous.

Ensemble, ils tentent de mettre sur pied une très importante vague de réformes institutionnelles, économiques, administratives et militaires, susceptible d'aboutir à une monarchie constitutionnelle.

Un édit impérial annonce ces réformes en juin 1898. L'empereur souhaite également répandre la connaissance des sciences et techniques occidentales et crée un « bureau des traductions » à cette fin.

Mais, d'un naturel impulsif et ignorant des réalités chinoises, Guangxu néglige de s'appuyer sur les gouverneurs provinciaux. Ces hommes généralement dévoués au service public auraient pu relayer ses réformes et les soutenir.

Faute de s'être assuré de ces relais, l'empereur va se montrer incapable de résister à la réaction conservatrice. 

La réaction conservatrice

Les opposants au réformisme de Guangxu, aristocrates mandchous et militaires, s'organisent autour de l'impératrice douairière Cixi. Celle-ci fut la concubine de l'empereur Xianfeng à partir de 1852 et la mère d'un jeune empereur, décédé prématurément, à l'âge de 21 ans. Tante de l'empereur Guangxu, elle s'irrite de voir le pouvoir lui échapper au profit de ce jeune homme qu'elle a placé elle-même sur le trône.

Le 15 septembre 1898, elle somme l'empereur de congédier ses conseillers réformistes. Guangxu demande alors à l'un de ses conseillers, le grand-juge Yuan Shih-kai, qui commande les premiers bataillons chinois formés à l'européenne d'arrêter Cixi. Mais Yuan Shih-kai, intelligent et réaliste, suppute les chances du jeune empereur et finalement choisit de le trahir. Il prévient l'impératrice douairière qui fait alors encercler la Cité Interdite par l'armée et exécuter les conseillers de Guangxu qui ne parviennent pas à s'enfuir.

Elle fait emprisonner l'empereur dans un pavillon du palais d'où il ne peut avoir aucun contact avec le monde extérieur. Guangxu n'en sortira plus jusqu'à se mort, due à un empoisonnement à l'arsenic en 1908, sans doute fomenté par l'impitoyable Cixi. Reprenant les rênes du pouvoir, celle-ci casse tous les décrets promulgués par l'empereur réformiste.

En 1905, les victoires japonaises sur les Russes convainquent Cixi que l'adoption de méthodes occidentales peut être un moyen de tenir tête aux Européens. Changeant de cap, elle se tourne à son tour vers les réformes avec le concours de l'inusable Yuan Shih-kai. Mais ce retournement est trop tardif : en 1911, une révolution met fin au règne de la dynastie mandchoue.

Publié ou mis à jour le : 2019-06-19 15:15:07

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