Le 2 septembre 1870, les Prussiens reçoivent la capitulation d'une armée française enfermée à Sedan, dans les Ardennes. Ils font 83 000 prisonniers y compris l'empereur des Français. Napoléon III envoie un simple télégramme à l'impératrice Eugénie : « Grand désastre, l’armée est défaite et captive, moi-même je suis prisonnier ».
C'est la quatrième fois dans l'Histoire de France qu'un souverain est capturé sur un champ de bataille. Ce désastre signe l'échec de la guerre engagée à la légère par les Français six semaines plus tôt.
Une guerre mal engagée
Napoléon III a déclaré la guerre à la Confédération d'Allemagne du Nord le 19 juillet 1870 d'une façon maladroite et précipitée, sans prendre la peine de s'assurer le soutien des grands États européens ni de vérifier les dispositions de l'armée.
La France n'est en mesure de mobiliser que 265 000 hommes, sur un front de 250 kilomètres, de Thionville à Bâle. De leur côté, la Prusse et ses alliés d'Allemagne du Sud alignent immédiatement près de 500 000 hommes répartis en trois armées sous le commandement efficace du comte Hellmuth von Moltke, grâce à une organisation bien rodée et à un réseau ferroviaire très dense.
Les armées françaises sont très vite bousculées par la coalition allemande. Les Français subissent plusieurs défaites non dépourvues de panache comme à Wissembourg, le 4 août 1870, et surtout à Froeschwiller-Woerth, le 6 août. Ce jour-là, à deux reprises, près du village de Reichshoffen, les cuirassiers à cheval chargent sabre au clair dans les houblonnières. Empêtrés dans les piquets et les fils, hommes et chevaux se font absurdement massacrer.
À la suite de ces défaites, qui entraînent l'évacuation de l'Alsace et de la Lorraine, le commandement en chef passe au maréchal Bazaine. Brave mais indécis, celui-ci tente de replier ses armées de l'Est sur Verdun mais se voit barrer la route par l'ennemi à Rezonville le 16 août et Saint-Privat le 18 août. Plutôt que de forcer le passage, il se laisse enfermer dans la place forte de Metz.
Le piège de Sedan
Un mois après la déclaration de guerre, il ne reste à la France que 130 000 hommes de la première armée, regroupés au camp de Châlons sous le commandement du maréchal de Mac-Mahon. L'empereur l'accompagne mais, très malade en raison d'un caillou dans la vessie et pouvant à peine circuler en voiture, il se garde de diriger les opérations.
Napoléon songe avec raison à ramener ses troupes sur Paris pour défendre la capitale et reprendre des forces. Mais il en est dissuadé par ses ministres et l'impératrice Eugénie qui lui demandent instamment de marcher vers Sedan, au nord, tandis que Bazaine viendrait l'y rejoindre.
Mais le maréchal Bazaine, assiégé à Metz et bien qu'en supériorité numérique sur ses assiégeants, se refuse à quitter son camp retranché. Il reste étrangement inactif et sans doute songe-t-il déjà à se rendre. C'est ainsi que, faute de secours, Mac-Mahon est battu le 30 août à Beaumont et, faute de mieux, se replie sur la place forte de Sedan.
Les défenseurs mènent une résistance désespérée illustrée par les Dernières cartouches de l'auberge de Bazeilles. Des francs-tireurs et de simples villageois prennent des fusils et tirent sur les ennemis, y compris sur les blessés et les brancardiers ; de leur côté, les soldats bavarois et prussiens n'hésitent pas à tirer sur des civils inoffensifs ! Les deux camps se rendent également coupables de crimes de guerre...
Le 1er septembre au matin débute la bataille décisive. Blessé, le maréchal de Mac-Mahon laisse le commandement au général Ducrot et celui-ci au général Wimpffen, « le plus ancien dans le grade le plus élevé ». Écrasés par l'artillerie allemande, les Français sont impuissants à desserrer l'étau. L'empereur souffre le martyre et se désespère de laisser tant d'hommes aller à une mort inutile. Lui-même, malgré sa maladie, monte à cheval et va au-devant de la mitraille. Mais la mort se refuse à lui.
Le lendemain, un lieutenant-colonel prussien se présente à lui de la part du roi Guillaume Ier. Soucieux d'éviter un massacre inutile, Napoléon III se résigne à la capitulation. Il confie à son aide de camp le général André-Charles-Victor Reille une lettre à l'attention du roi. Elle est ainsi rédigée :
Monsieur mon frère,
N'ayant pas pu mourir au milieu de mes troupes,
il ne me reste qu'à remettre
mon épée entre les mains de Votre Majesté
Je suis de votre Majesté
le bon frère
Napoléon
L'empereur va lui-même en calèche au-devant de l'état-major allemand. Il est reçu dans une modeste auberge non par le roi Guillaume Ier mais par le chancelier Bismarck.
Vers la relance de la guerre
L'acte de capitulation est signé au château de Bellevue, sur une hauteur à quelques kilomètres de Sedan. À Lyon, Marseille et Paris, sitôt connu le désastre, l'empereur est déchu et la République proclamée.
Les députés forment à la hâte un Gouvernement de la Défense nationale, présidé par le gouverneur militaire de Paris, le général Louis Jules Trochu. L'avocat Jules Favre en est le vice-président et le ministre des Affaires étrangères. Comme beaucoup de Français, les députés sont convaincus que la guerre ayant été déclarée par l'Empereur, les Allemands n'auraient aucun motif d'en faire payer le prix à la République. Pour leur démontrer le contraire, les Allemands décident de se diriger à marches forcées vers Paris avec l'espoir que la reddition de la capitale entraîne la paix.
Le 19 septembre 1870, alors que les troupes allemandes entament le siège de la capitale, Jules Favre se rend secrètement au château de Ferrières, près de Meaux, où Bismarck a établi son quartier général. À l'issue de deux jours d'entretiens, il comprend alors qu'il n'y a rien à espérer du vainqueur. Bismarck présente ses exigences : l'annexion de l'Alsace et d'une partie de la Lorraine.
Le gouvernement provisoire choisit donc de poursuivre la guerre. Il bénéficie du soutien de la population de la capitale ainsi que des habitants des régions de l'Est, qui ont accumulé beaucoup de ressentiment à l'égard de l'envahisseur et ne veulent à aucun prix d'une annexion... Il n'empêche cependant que la majorité du pays aspire à la paix.
Dès le 19 septembre, les troupes allemandes arrivent aux portes de la capitale et ses deux millions d'habitants vont subir un siège éprouvant jusqu'à l'armistice de janvier 1871. Pendant ce temps, le 26 septembre, les 80 0000 habitants de Strasbourg se résignaient à ouvrir les portes de leur ville après avoir été eux-mêmes durement assiégés et bombardés.
De son côté, l'ex-empereur, d'abord détenu au château de Wilhelmshöhe, près de Cassel, dans la Hesse, ne tardera pas à être libéré et pourra rejoindre sa femme, l'ex-impératrice Eugénie, à Londres. C'est là qu'il mourra le 9 janvier 1873, en se faisant opérer de la maladie de la pierre. Son fils unique, le prince Eugène, sera tué en combattant les Zoulous d'Afrique du Sud au service de l'armée anglaise, en 1879. La mort tragique du Prince impérial laissera orphelins les derniers bonapartistes.
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Voir les 4 commentaires sur cet article
Jean-Claude PETERS (27-08-2017 18:19:23)
Le château où Napoléon III fut détenu est le château de "Wilhelmshöhe", dans la banlieue de Cassel en Hesse.
Amicalement.
kourdane (15-02-2014 23:15:43)
je ne peux être d'accord avec l'auteur qui qualifie BAZAINE de brave alors que par son procès présidé par le Duc D'Aumale il a été qualifié de traitre capitulant devant l'ennemi, ayant pris co... Lire la suite
allen (19-09-2006 00:51:34)
Une fois de plus, je suis consterné du raccourci fait par la plupart des historiens dans leur relation des évènements de la guerre franco-allemande de 1870. Ils se contentent de rappeler les premiÃ... Lire la suite