21 juillet 1857

Premier bataillon de tirailleurs sénégalais

En 1854, Louis Faidherbe, colonel des troupes de marine, est nommé par Napoléon III gouverneur de Saint-Louis-du-Sénégal, un modeste comptoir colonial hérité de l’Ancien Régime. L'officier se prend de sympathie pour la population dont il a la charge, essentiellement des traitants noirs ou métis qui font commerce de la gomme arabique. Il est déterminé à les protéger contre les attaques des Maures qui menacent leurs approvisionnements et leurs vies.

Ne disposant que d'une poignée d'hommes des troupes de marine, il constitue le 21 juillet 1857 un premier bataillon de « tirailleurs sénégalais », sur le modèle des zouaves et spahis algériens, avec un encadrement français. Le terme de tirailleur, qui remonte au XVIe siècle, désigne un soldat détaché de la ligne et habilité à tirer en tout sens.

Tirailleur du régiment des tirailleurs sénégalais, 1890.Parmi ces premiers tirailleurs, certains, d’un rang social plutôt élevé, étaient choisis dans les familles de chefs vaincus. D’autres étaient des piroguiers du fleuve Sénégal. Mais la majorité étaient des esclaves rachetés et affranchis par les autorités françaises.

Grâce à ces troupes formées et commandées par ses hommes, le gouverneur Faidherbe va sécuriser les implantations françaises du littoral. Puis, de proche en proche, en remontant la vallée du Sénégal, il va être conduit à pacifier l'arrière-pays et lutter contre El Hadj Omar et les troupes de l’empire toucouleur. Il en viendra à établir l'autorité de la France sur tout le bassin du Sénégal (à l'exclusion de la vallée de la Gambie, sous influence britannique). C'est l'origine du Sénégal actuel.

Dans les années 1880, la gauche républicaine, au pouvoir à Paris sous l'autorité de Jules Ferry prend le parti d'étendre cette implantation française en soumettant les royaumes locaux. Cette conquête est toujours le fait des troupes de marine et de la Légion étrangère, renforcées par les bataillons de tirailleurs sénégalais, lesquels se recrutent de moins en moins au Sénégal proprement dit et plus largement dans toute l'Afrique occidentale française (AOF). Les recrues les plus prisées du commandement français sont les Bambaras du sud du Mali, réputés pour leurs qualités militaires.

Les tirailleurs sénégalais sont tous des volontaires attirés par la solde et le prestige de l'uniforme. Enrôlés comme auxiliaires avant de devenir soldats de deuxième classe, ils conservent le droit de se faire accompagner de leur famille. Les meilleurs ont l'espoir de devenir sous-officiers, voire lieutenant ou capitaine. À la veille de la Grande Guerre, ils sont environ 30 000 (y compris de nombreux engagés français venus de la métropole). Mais les troupes coloniales comptent aussi bien sûr d'autres régiments : zouaves et spahis algériens, tabors marocains, tirailleurs annamites, malgaches, etc.

Le 1er régiment de tirailleurs sénégalais à la revue de Longchamp le 14 juillet 1913, Agence Rol, Paris, BnF, Gallica.

La mission dévoyée des tirailleurs sénégalais

Quand éclate le conflit en 1914, la tentation grandit chez les gouvernants français d'utiliser les troupes coloniales sur le front européen. C'est une rupture préconisée par le général Louis-Eugène Mangin, héros de Fachoda et auteur en 1910 d'un livre à succès : La Force noire. À partir de 1915, les gouverneurs des colonies sont sommés d'accélérer les recrutements et ceux-ci se font dès lors souvent sous la contrainte. En Haute-Volta (actuel Burkina Faso), des villages en viennent à se soulever. Les rébellions s'amplifient après les offensives sanglantes du général Nivelle sur le Chemin des Dames, en Picardie, au printemps 1917.

Le gouverneur de l'AOF Just Van Vollenhaven met alors un terme aux enrôlements contraints par crainte d'un soulèvement général. Mais à la fin de l'année, quand Georges Clemenceau accède à la présidence du Conseil, changement de ton : il importe de mobiliser toutes les énergies en vue de la victoire et pour cela, le « Tigre »  requiert les services du député africain Blaise Diagne, qui représente à la Chambre les citoyens des « quatre communes » de Saint-Louis, Rufisque, Gorée et Dakar.

Épaulé par les chefs religieux africains, Blaise Diagne va mener campagne en AOF comme en Afrique Équatoriale Française (AEF) en faisant miroiter les avantages financiers promis aux engagés par Clemenceau mais aussi la promesse pour les anciens combattants de la citoyenneté française et d'emplois réservés ainsi qu'un assouplissement du code de l'indigénat.

Il s'ensuit au total, durant tout le conflit, l'engagement d'environ 180 000 Africains noirs (c'est nettement moins que de Nord-Africains et sans comparaison avec les près de 8 millions de jeunes Français envoyés dans les tranchées). Le taux de pertes est similaire quelle que soit l'origine des combattants. Dans les unités, soldats des colonies et soldats de la métropole se côtoient dans une totale fraternité d'armes face au danger et à la mort.

Alban Dignat
Publié ou mis à jour le : 2023-07-23 08:07:23
Michel J. (18-07-2023 11:40:51)

Mon père né en 1903, jeune parisien du 15° arrondissement et fier de l’être, avait fait la "guerre du Rif" au 15° régiment de tirailleurs Nord-Africains en 1923... C'était sans doute avant l... Lire la suite

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